LA CÉRAMIQUE PHÉNICIENNE. 683
quatre compartiments1. Des vases fabriqués dans l'Inde et envoyés à
l'Exposition universelle de 1867 avaient tout à fait le même émail et le
même aspect que ces alabastres découverts à Camiros. Quoique toutes
ces pièces proviennent d'une terre où l'art grec s'est développé de
bonne heure, nous ne croyons pas que l'on puisse hésiter à reconnaître
ici la tradition et l'esprit de l'art oriental ; celui-ci seul a pu compter à
ce point sur la beauté de son émail et sur le plaisir qu'il donnerait à
l'œil. Ici, en effet, la forme même du vase ne semble pas aspirer à l'élé-
gance, et le dessin de l'ornement est d'une pauvreté singulière; l'ou-
vrier n'a eu qu'une préoccupation, offrir au regard des tons francs et
d'heureux contrastes de couleur; une fois ce résultat obtenu, il s'est
tenu quitte de tout autre effort.
Quel âge convient-il d'assigner à ces vases où le décor, tout élé-
mentaire, est posé à plat, sans gravure ni reliefs? Sont-ils nécessaire-
ment plus anciens que ceux où se trahit partout la connaissance et
l'imitation des formes égyptiennes? Nous ne le croyons pas, et ce
qui suffirait à nous en faire douter, c'est que ces deux genres de
vases émaillés se sont trouvés ensemble à Camiros ; ils sont sortis
des mêmes tombes. Ce qu'il faut donc voir dans ces vases à che-
vrons et h glaçure verte, blanche et brune, ce sont les produits
d'une fabrication spéciale, qui a eu son heure de succès et de vogue,
c'est une poterie émaillée de moindre valeur, qui n'exigeait pas la
main d'un ouvrier aussi adroit et qui ne demandait pas grands frais
d'imagination.
Ces vases communs en terre vernissée, nous les avons mis au
compte de l'industrie phénicienne, quoique aucun d'eux n'ait été
recueilli sur la côte de Syrie ou même à Cypre. La matière et le pro-
cédé sont les mêmes que dans les vases dont le caractère égypto-phé-
nicien est le plus marqué; d'autre part, il n'y a pas le moindre indice
qui puisse faire soupçonner que les Grecs se soient essayés à fabriquer
des vases en terre émaillée. La céramique grecque, dès ses débuts, a
été animée d'un tout autre esprit que la céramique orientale; celle-ci
songe avant tout à la gaieté de la couleur, tandis que le potier grec a
recherché tout d'abord la noblesse de la forme et qu'il a voulu trouver
dans le décor l'occasion de parler à l'intelligence, de lui rappeler et
de lui représenter quelque chose qui l'intéressât.
De l'Egypte à Rhodes, de la Syrie à la Sardaigne, nous avons par-
d. On trouvera les principales variétés de ce type réunies dans les planches L et LI
du Musée Napoléon III.
quatre compartiments1. Des vases fabriqués dans l'Inde et envoyés à
l'Exposition universelle de 1867 avaient tout à fait le même émail et le
même aspect que ces alabastres découverts à Camiros. Quoique toutes
ces pièces proviennent d'une terre où l'art grec s'est développé de
bonne heure, nous ne croyons pas que l'on puisse hésiter à reconnaître
ici la tradition et l'esprit de l'art oriental ; celui-ci seul a pu compter à
ce point sur la beauté de son émail et sur le plaisir qu'il donnerait à
l'œil. Ici, en effet, la forme même du vase ne semble pas aspirer à l'élé-
gance, et le dessin de l'ornement est d'une pauvreté singulière; l'ou-
vrier n'a eu qu'une préoccupation, offrir au regard des tons francs et
d'heureux contrastes de couleur; une fois ce résultat obtenu, il s'est
tenu quitte de tout autre effort.
Quel âge convient-il d'assigner à ces vases où le décor, tout élé-
mentaire, est posé à plat, sans gravure ni reliefs? Sont-ils nécessaire-
ment plus anciens que ceux où se trahit partout la connaissance et
l'imitation des formes égyptiennes? Nous ne le croyons pas, et ce
qui suffirait à nous en faire douter, c'est que ces deux genres de
vases émaillés se sont trouvés ensemble à Camiros ; ils sont sortis
des mêmes tombes. Ce qu'il faut donc voir dans ces vases à che-
vrons et h glaçure verte, blanche et brune, ce sont les produits
d'une fabrication spéciale, qui a eu son heure de succès et de vogue,
c'est une poterie émaillée de moindre valeur, qui n'exigeait pas la
main d'un ouvrier aussi adroit et qui ne demandait pas grands frais
d'imagination.
Ces vases communs en terre vernissée, nous les avons mis au
compte de l'industrie phénicienne, quoique aucun d'eux n'ait été
recueilli sur la côte de Syrie ou même à Cypre. La matière et le pro-
cédé sont les mêmes que dans les vases dont le caractère égypto-phé-
nicien est le plus marqué; d'autre part, il n'y a pas le moindre indice
qui puisse faire soupçonner que les Grecs se soient essayés à fabriquer
des vases en terre émaillée. La céramique grecque, dès ses débuts, a
été animée d'un tout autre esprit que la céramique orientale; celle-ci
songe avant tout à la gaieté de la couleur, tandis que le potier grec a
recherché tout d'abord la noblesse de la forme et qu'il a voulu trouver
dans le décor l'occasion de parler à l'intelligence, de lui rappeler et
de lui représenter quelque chose qui l'intéressât.
De l'Egypte à Rhodes, de la Syrie à la Sardaigne, nous avons par-
d. On trouvera les principales variétés de ce type réunies dans les planches L et LI
du Musée Napoléon III.