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Perrot, Georges; Chipiez, Charles
Histoire de l'art dans l'antiquité: Egypte, Assyrie, Perse, Asie Mineure, Grèce, Étrurie, Rome (Band 3): Phénice - Cypre — Paris, 1885

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https://doi.org/10.11588/diglit.11735#0899

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LE ROLE HISTORIQUE DES PHÉNICIENS. 889

avec eux, presque dans leur intimité, on finit par les voir avec d'autres
yeux et par leur porter intérêt; ils étaient si actifs, si industrieux et
même, à leur manière, si braves, si dédaigneux de la fatigue, du danger
et de la mort ! Pour ces qualités, on pourrait presque dire pour ces
vertus, ils méritent l'estime et la reconnaissance. Pourquoi donc les
Grecs et les Romains, qui leur doivent tant, ont-ils toujours parlé d'eux
avec si peu de sympathie? Pourquoi l'historien moderne, malgré sa
largeur d'esprit et son impartialité, a-t-il lui-même à faire effort afin
d'être au moins juste à leur égard?

C'est d'abord que leurs contemporains de race aryenne, les peuples
de la Grèce et de l'Italie, tout en ayant avec eux des relations quoti-
diennes, ne les ont jamais bien connus et n'ont pas appris leur langue;
c'est qu'aujourd'hui, malgré tout ce que nous tentons pour recueillir
les moindres bribes de leur écriture et les moindres traces de leurs
pensées, nous ne les connaissons guère mieux. Entre le Grec et le
Romain, d'une part, et, d'autre part, le Phénicien et le Carthaginois,
il y a toujours eu comme une barrière, qui ne s'est jamais abaissée; on
a commercé et l'on s'est battu, mais sans jamais conclure une paix
durable et cordiale, sans arriver à s'entendre et à se pénétrer les uns
les autres; on s'est ignoré jusqu'au bout, tout en se faisant de mutuels
emprunts, et par suite on est toujours resté séparé par des sentiments
hostiles et par une antipathie persistante. Plus tard, lorsque les races
se furent mêlées dans l'apparente unité de la domination romaine, le
même antagonisme s'est encore manifesté, sous une autre forme et dans
d'autres conditions. C'était un peuple sémitique, le peuple hébreu, qui
donnait au monde une religion nouvelle, le christianisme, et qui lui
imposait sa littérature, contenue dans la Bible ; or, dès le lendemain
du jour où celte religion avait pris le dessus et où le livre hébraïque
était devenu le livre sacré de tout l'Occident, celui-ci recommençait à
haïr et à persécuter le juif. Entre les deux races, depuis l'heure où elles
se sont rencontrées, il y a eu tout à la fois de fécondes et constantes
communications et un malentendu perpétuel, qui remplit toute l'his-
toire. Elles n'ont pu se passer l'une de l'autre et elles se sont toujours
jalousées et détestées.

C'est aussi un peu la faute des Phéniciens si, aujourd'hui encore,
nous avons tant de peine à réagir contre ces préjugés pour reconnaître
et proclamer les titres qu'ils ont au respect et à la gratitude même de
l'humanité. Us n'ont eu ni la passion du vrai ni celle du beau; la
seule qu'on leur connaisse, c'est la passion du gain, et ils ont pu la

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