ET DE LA CURIOSITÉ
3
PETITES EXPOSITIONS
Aquarelles et dessins (Galerie Druet). — Aqua-
relles, dessins et croquis (Galerie Weill). —
Maurice Meyer (6, cité clu Retiro). — Art
moderne italien (Galerie Grubicv). — Intérieur
DU A LA COLLABORATION DE DIVERS ARTISTES
(Office artistique).
Les expositions chôment un peu, par ces temps
de fêtes, et les marchands réservent leurs peintres.
Aussi aurons-nous vite fait, cette semaine, de
parler des dessins, croquis et aquarelles qui, chez
Mme Weill et chez M. Druet, garnissent les murs.
On pourrait être fort sévère pour ces deux exposi-
tions. Que de gaucherie, que de laisser-aller, et,
comme la plupart de ces peintres sont vite satis-
faits ! Mais quoi ! ce sont là des croquis, disent
les catalogues. Ne donnons donc pas trop d’impor-
tance à ces coups de crayon. Et tirons de cet
ensemble confus les aquarelles acides de M. Le-
basque, les dessins puissants de M. Dethomas, les
japonaiseries de M. Bonnard, les charmants nus
sur papier gris rehaussés de sanguine de M.
Roussel, les belles études de MM.. Maurice Denis et
Maillol, les aquarelles fraîches et vives de MM. Si-
gnac, Luce et Cross, les études de MM. Lehmann,
Laprade, Redon, et vouons aux divinités infernales
M. Rouveyre et son art affreux, dégoûtant et cou-
pable .
*
* *
M. Maurice Meyer expose dans la salle de
danse de M. de Soria, cité du Retiro, des
paysages, des portraits et quelques « scènes de
genre ». Tout cela est assez banal, et parfois,
tout à fait mauvais. Ici et là, une jolie aquarelle.
*
* sfs
Voici quelques années déjà que M. Grubicy
s’est voué à répandre les oeuvres de Segantini et
de ses élèves les « divisionnistes » italiens. Les
« divisionnistes » italiens n'ont pas tous du génie,
et il y en a même dont le talent est fort petit.
Mais ils ont une préoccupation que l’on n’avait
plus guère dans leur pays : ils s’efforcent à autre
chose qu’au trompe-l’œil et à la « chromo ».
Segantini a laissé un exemple plutôt qu’une
œuvre. Mais, s’il a eu parfois une mièvrerie qui
était presque du mauvais goût, il a atteint aussi
une eu deux fois à la grandeur par les moyens
les plus simples, et notamment dans ce trip-
tyque que l’on voyait à l’Exposition de Milan et
qui, dans de vastes paysages de montagnes, mon-
trait les âges de la vie et les âges du jour.
Les «divisionnistes » italiens, ce sont un peu les
« pointillistes » français : les uns et les autres
sont des disciples des « impressionnistes » — que
de mots nouveaux ! Ce procédé est un pou mo-
notone et il convient surtout à la décoration. De
plus, il est arrivé fatalement que la plupart des
élèves de Si gantmi ont outré le procédé du maî-
tre, et plusieurs des toiles que Ton voit à la galerie
Grubicy ressemblent beaucoup à ces petits ta-
bleaux qui sontoxposés, avenue de l’Opéra, chez un
fabricant de machines à coudre, et qui représen-
tent, «peintes » avec des laines de couleurs variées,
des scènes comiques ou sentimentales.
M. Filibert Minozzi est peut-être, de ces «divi-
sionnistes », celui qui montre le plus de souplesse
et de goût; ses marines ont de l’étendue, et la
façon « divisionniste » n’y est pas agressive. M.
Guido Dinotli peint aussi avec une rigueur moins
permanente. MM. Ramponi, Baracchini-Caputi et
Carlo Fornara sont des violents. M. Fornara est
peut-être le plus « peintre » de tous ces artistes :
ses études, où le théoricien s’oublie, ont de l’ac-
cent et de la vérité. Le cas de M. Gaetano Previali
est plus complexe : M. Previali est un poète, et il
ne peint pas ce qu'il voit, mais ce qu’il imagine ;
il rappelle tour à tour AVatts et M. La Touche.
Mais M. Previati a plus d’ambition que de savoir,
et il peint avec mollesse de grands sujets.
Le plaisir de cette exposition, c’est M. Libero
Andreotti qui le donne. Ce sculpteur, inconnu à
Paris, je crois, modèle avec une facilité surpre-
nante des corps de femmes perdus dans des fleurs
et d’où l’agrément littéraire n’est point absent.
*
* *
A l’Office artistique, rue de la Pépinière, on peut
voir jusqu’à la fin du mois la reconstitution d'un
petit salon tout à fait charmant et qui donne envie
d’aller habiter l’hôtel de voyageurs pour lequel il
a été fait. Il s’agissait de créer un mobilier éléganti
confortable, et que Ton pût exécuter à peu de frais.
M. Paul Baignères y a pleinement réussi. L’acajou
est le bois employé, avec quelques incrustations
noires, très discrètes. Les proportions de l’armoire
sont particulièrement heureuses.
Autour de ces meubles agréables, on a disposé
des aquarelles florentines de M. Laprade où la
lumière est abondante, des pochades de MM. De-
nis, Piot, Jourdain, et des grès de M. Metliey.
Jean-Louis Vaudoyer.
Académie des Beaux-Arts
Séance du 26 décembre
Élection du bureau. —- M. Massenet, membre
de la section de composition musicale, a été élu
vice-président pour 1909 en remplacement de
M. Nénot, qui passe de droit à la présidence.
Concours. — L’Académie a choisi pour sujet du
concours Roux (enluminure) à décerner en 1909, le
frontispice des mémoires de Joinville intitulés Le
Livre des saintes paroles et des bonnes actions
du roi saint Louis.
Élection. — Il a été procédé à l’élection d’un
membre titulaire de la section de gravure, en rem-
placement de M. Achille Jacquet, décédé. Au troi-
sième tour, M. Waltner a été déclaré élu par
17 voix, contre 18 à M. Laguillcrmie, 1 à M. Jules
Jacquet, 1 à M. Mignon et 1 à M. Dez&rrois.
Le nouvel élu, qui a été élève de Iienri-
quel, Gérôme et Martinet, a obtenu le premier
grand-prix de Rome en 1808 et la médaille d’hon-
neur du Salon en 1882. Il est né à Paris le
24 mars 1846. On lui doit de nombreuses planches
à l’eau-forte d’une vigueur et d’une coloration
admirables, d’après Gainsborough, Courbet, Jules
Breton, Benjamin Constant, Hébert, Garolus
Duran, Dagnan-Bouveret, etc., et surtout Rem-
brandt. La Gazette, qui est heureuse de féliciter
le nouvel élu, a publié plusieurs d’entre elles.
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PETITES EXPOSITIONS
Aquarelles et dessins (Galerie Druet). — Aqua-
relles, dessins et croquis (Galerie Weill). —
Maurice Meyer (6, cité clu Retiro). — Art
moderne italien (Galerie Grubicv). — Intérieur
DU A LA COLLABORATION DE DIVERS ARTISTES
(Office artistique).
Les expositions chôment un peu, par ces temps
de fêtes, et les marchands réservent leurs peintres.
Aussi aurons-nous vite fait, cette semaine, de
parler des dessins, croquis et aquarelles qui, chez
Mme Weill et chez M. Druet, garnissent les murs.
On pourrait être fort sévère pour ces deux exposi-
tions. Que de gaucherie, que de laisser-aller, et,
comme la plupart de ces peintres sont vite satis-
faits ! Mais quoi ! ce sont là des croquis, disent
les catalogues. Ne donnons donc pas trop d’impor-
tance à ces coups de crayon. Et tirons de cet
ensemble confus les aquarelles acides de M. Le-
basque, les dessins puissants de M. Dethomas, les
japonaiseries de M. Bonnard, les charmants nus
sur papier gris rehaussés de sanguine de M.
Roussel, les belles études de MM.. Maurice Denis et
Maillol, les aquarelles fraîches et vives de MM. Si-
gnac, Luce et Cross, les études de MM. Lehmann,
Laprade, Redon, et vouons aux divinités infernales
M. Rouveyre et son art affreux, dégoûtant et cou-
pable .
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M. Maurice Meyer expose dans la salle de
danse de M. de Soria, cité du Retiro, des
paysages, des portraits et quelques « scènes de
genre ». Tout cela est assez banal, et parfois,
tout à fait mauvais. Ici et là, une jolie aquarelle.
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* sfs
Voici quelques années déjà que M. Grubicy
s’est voué à répandre les oeuvres de Segantini et
de ses élèves les « divisionnistes » italiens. Les
« divisionnistes » italiens n'ont pas tous du génie,
et il y en a même dont le talent est fort petit.
Mais ils ont une préoccupation que l’on n’avait
plus guère dans leur pays : ils s’efforcent à autre
chose qu’au trompe-l’œil et à la « chromo ».
Segantini a laissé un exemple plutôt qu’une
œuvre. Mais, s’il a eu parfois une mièvrerie qui
était presque du mauvais goût, il a atteint aussi
une eu deux fois à la grandeur par les moyens
les plus simples, et notamment dans ce trip-
tyque que l’on voyait à l’Exposition de Milan et
qui, dans de vastes paysages de montagnes, mon-
trait les âges de la vie et les âges du jour.
Les «divisionnistes » italiens, ce sont un peu les
« pointillistes » français : les uns et les autres
sont des disciples des « impressionnistes » — que
de mots nouveaux ! Ce procédé est un pou mo-
notone et il convient surtout à la décoration. De
plus, il est arrivé fatalement que la plupart des
élèves de Si gantmi ont outré le procédé du maî-
tre, et plusieurs des toiles que Ton voit à la galerie
Grubicy ressemblent beaucoup à ces petits ta-
bleaux qui sontoxposés, avenue de l’Opéra, chez un
fabricant de machines à coudre, et qui représen-
tent, «peintes » avec des laines de couleurs variées,
des scènes comiques ou sentimentales.
M. Filibert Minozzi est peut-être, de ces «divi-
sionnistes », celui qui montre le plus de souplesse
et de goût; ses marines ont de l’étendue, et la
façon « divisionniste » n’y est pas agressive. M.
Guido Dinotli peint aussi avec une rigueur moins
permanente. MM. Ramponi, Baracchini-Caputi et
Carlo Fornara sont des violents. M. Fornara est
peut-être le plus « peintre » de tous ces artistes :
ses études, où le théoricien s’oublie, ont de l’ac-
cent et de la vérité. Le cas de M. Gaetano Previali
est plus complexe : M. Previali est un poète, et il
ne peint pas ce qu'il voit, mais ce qu’il imagine ;
il rappelle tour à tour AVatts et M. La Touche.
Mais M. Previati a plus d’ambition que de savoir,
et il peint avec mollesse de grands sujets.
Le plaisir de cette exposition, c’est M. Libero
Andreotti qui le donne. Ce sculpteur, inconnu à
Paris, je crois, modèle avec une facilité surpre-
nante des corps de femmes perdus dans des fleurs
et d’où l’agrément littéraire n’est point absent.
*
* *
A l’Office artistique, rue de la Pépinière, on peut
voir jusqu’à la fin du mois la reconstitution d'un
petit salon tout à fait charmant et qui donne envie
d’aller habiter l’hôtel de voyageurs pour lequel il
a été fait. Il s’agissait de créer un mobilier éléganti
confortable, et que Ton pût exécuter à peu de frais.
M. Paul Baignères y a pleinement réussi. L’acajou
est le bois employé, avec quelques incrustations
noires, très discrètes. Les proportions de l’armoire
sont particulièrement heureuses.
Autour de ces meubles agréables, on a disposé
des aquarelles florentines de M. Laprade où la
lumière est abondante, des pochades de MM. De-
nis, Piot, Jourdain, et des grès de M. Metliey.
Jean-Louis Vaudoyer.
Académie des Beaux-Arts
Séance du 26 décembre
Élection du bureau. —- M. Massenet, membre
de la section de composition musicale, a été élu
vice-président pour 1909 en remplacement de
M. Nénot, qui passe de droit à la présidence.
Concours. — L’Académie a choisi pour sujet du
concours Roux (enluminure) à décerner en 1909, le
frontispice des mémoires de Joinville intitulés Le
Livre des saintes paroles et des bonnes actions
du roi saint Louis.
Élection. — Il a été procédé à l’élection d’un
membre titulaire de la section de gravure, en rem-
placement de M. Achille Jacquet, décédé. Au troi-
sième tour, M. Waltner a été déclaré élu par
17 voix, contre 18 à M. Laguillcrmie, 1 à M. Jules
Jacquet, 1 à M. Mignon et 1 à M. Dez&rrois.
Le nouvel élu, qui a été élève de Iienri-
quel, Gérôme et Martinet, a obtenu le premier
grand-prix de Rome en 1808 et la médaille d’hon-
neur du Salon en 1882. Il est né à Paris le
24 mars 1846. On lui doit de nombreuses planches
à l’eau-forte d’une vigueur et d’une coloration
admirables, d’après Gainsborough, Courbet, Jules
Breton, Benjamin Constant, Hébert, Garolus
Duran, Dagnan-Bouveret, etc., et surtout Rem-
brandt. La Gazette, qui est heureuse de féliciter
le nouvel élu, a publié plusieurs d’entre elles.