N° 25. - 1909. BUREAUX ; 106, BOULEVARD SAINT-GERMAIN (6e) 3 Juillet.
LA
CHRONIQUE DES ARTS
ET DE LA CURIOSITÉ
SUPPLÉMENT A LA GAZETTE DES BEAUX-ARTS
PARAISSANT LI SAMEDI MATIN
Leu abonnés à la Gazette des Beaux-Arts reçoivent gratuitement la Chronique des Arts et de Curiosité
Prix de l'abonnement pour un an
Paris, Seine et Seine-et-Oise. ... 10 fr. Étranger (Etats faisant partie de
Départements. 12 fr. l'Union postale).
Xj« Numéro O fr. 3 B
15 fr.
PROPOS DU JOUR
E musee du Louvre a reçu recem-
ment un legs qui a fait quelque
bruit. Il est certainement heureux
que notre grand musée soit en-
richi par les particuliers. Mais on ne peut’se
défendre de quelque inquiétude quand on
songe aux conditions où se font le plus sou-
vent les donations. Les collectionneurs veu-
lent tous une salle spéciale à leurs collec-
tions ; ils veulent tous qu’elles demeurent
entières, indivisibles et sacrées. Et, si le sys-
tème se généralisait, nous verrions bientôt
une série de musées installés dans le musée,
des salles commémoratives se suivant comme
des mausolées sur une voie antique.
Qui ne comprend les inconvénients d’une
telle pratique? Nous signalons sans insister
l’embarras d’accepter en bloc des collections
où toutes les pièces n’ont pas la môme va-
leur : le tact et la diplomatie des conserva-
teurs ont su le plus souvent y remédier. Mais
il y a plus : la nécessité de laisser les collec-
tions données former un tout intangible ruine
toute classification. C’est l’ordre dispersé in-
troduit à perpétuité. Il est beau pour un
musée de recevoir un Corot ou un Millet ;
mais encore convient-il qu’on puisse les
mettre à leur place, avec les autres toiles du
môme maître, dans une série qui a son unité
historique, son caractère, sa vie propre.
L’habitude de constituer des salles dont la
seule âme est la mémoire d’un donateur
flatte les vanités humaines ; elle rend impos-
sible toute ordonnance dans une galerie na-
tionale.
On voudrait que la générosité des collec-
tionneurs se fit complète, c’est-à-dire assez
discrète pour laisser toute liberté à l’Admi-
nistration du musée. Il ne faut pas que la
façon de donner vaille moins que ce qu’on
donne, et que, pour honorer le Louvre, on
lui impose des servitudes qui, à la longue,
deviendraient fort gênantes. Un musée n’est
pas seulement l’asile sacré de ce que l’art des
hommes a créé de plus beau : il est aussi à
sa manière une école, et son enseignement ne
peut se passer de clarté, d’ordre, de méthode.
Il ne lui suffit pas d’entasser des richesses :
il a besoin de les présenter de manière à les
faire comprendre et à les faire aimer.
Il y a eu récemment une exposition remar-
quable de dessins intéressant l’histoire et les
monuments de Paris. Elle a eu le suffrage des
amateurs et des travailleurs, qui l’ont visitée
avec attention et y ont trouvé un intérêt évi-
dent. On regrette que les représentants de la
Ville et du Musée Carnavalet n’aient pas eu
le môme empressement, et qu’une exposition
discrète mais sérieuse ne leur ait point paru
mériter la considération qu’ils accordent à
des manifestations ayant peut-être plus de
notoriété, mais assurément moins de mé-
rite.
NOUVELLES
*** Ont été inaugurés pendant la dernière
quinzaine :
Le dimanche 27 juin, à Angers, une statue
de Jeanne d’Arc, œuvre du sculpteur Aubert,
et dont le piédestal est dû à l’architecte
Dubos ;
Le lundi 28 juin, à Tours, un monument
élevé au caricaturiste Jules Baric, et dû au
sculpteur Henri Bouillon.
*** Par arrêté du 10 juin 19ü9, M. Emile
Bourgeois, professeur à l’Université de Paris,
1 a été délégué dans les fonctions d’adminis-
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PROPOS DU JOUR
E musee du Louvre a reçu recem-
ment un legs qui a fait quelque
bruit. Il est certainement heureux
que notre grand musée soit en-
richi par les particuliers. Mais on ne peut’se
défendre de quelque inquiétude quand on
songe aux conditions où se font le plus sou-
vent les donations. Les collectionneurs veu-
lent tous une salle spéciale à leurs collec-
tions ; ils veulent tous qu’elles demeurent
entières, indivisibles et sacrées. Et, si le sys-
tème se généralisait, nous verrions bientôt
une série de musées installés dans le musée,
des salles commémoratives se suivant comme
des mausolées sur une voie antique.
Qui ne comprend les inconvénients d’une
telle pratique? Nous signalons sans insister
l’embarras d’accepter en bloc des collections
où toutes les pièces n’ont pas la môme va-
leur : le tact et la diplomatie des conserva-
teurs ont su le plus souvent y remédier. Mais
il y a plus : la nécessité de laisser les collec-
tions données former un tout intangible ruine
toute classification. C’est l’ordre dispersé in-
troduit à perpétuité. Il est beau pour un
musée de recevoir un Corot ou un Millet ;
mais encore convient-il qu’on puisse les
mettre à leur place, avec les autres toiles du
môme maître, dans une série qui a son unité
historique, son caractère, sa vie propre.
L’habitude de constituer des salles dont la
seule âme est la mémoire d’un donateur
flatte les vanités humaines ; elle rend impos-
sible toute ordonnance dans une galerie na-
tionale.
On voudrait que la générosité des collec-
tionneurs se fit complète, c’est-à-dire assez
discrète pour laisser toute liberté à l’Admi-
nistration du musée. Il ne faut pas que la
façon de donner vaille moins que ce qu’on
donne, et que, pour honorer le Louvre, on
lui impose des servitudes qui, à la longue,
deviendraient fort gênantes. Un musée n’est
pas seulement l’asile sacré de ce que l’art des
hommes a créé de plus beau : il est aussi à
sa manière une école, et son enseignement ne
peut se passer de clarté, d’ordre, de méthode.
Il ne lui suffit pas d’entasser des richesses :
il a besoin de les présenter de manière à les
faire comprendre et à les faire aimer.
Il y a eu récemment une exposition remar-
quable de dessins intéressant l’histoire et les
monuments de Paris. Elle a eu le suffrage des
amateurs et des travailleurs, qui l’ont visitée
avec attention et y ont trouvé un intérêt évi-
dent. On regrette que les représentants de la
Ville et du Musée Carnavalet n’aient pas eu
le môme empressement, et qu’une exposition
discrète mais sérieuse ne leur ait point paru
mériter la considération qu’ils accordent à
des manifestations ayant peut-être plus de
notoriété, mais assurément moins de mé-
rite.
NOUVELLES
*** Ont été inaugurés pendant la dernière
quinzaine :
Le dimanche 27 juin, à Angers, une statue
de Jeanne d’Arc, œuvre du sculpteur Aubert,
et dont le piédestal est dû à l’architecte
Dubos ;
Le lundi 28 juin, à Tours, un monument
élevé au caricaturiste Jules Baric, et dû au
sculpteur Henri Bouillon.
*** Par arrêté du 10 juin 19ü9, M. Emile
Bourgeois, professeur à l’Université de Paris,
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