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La chronique des arts et de la curiosité — 1912

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Nr. 11 (16 Mars)
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https://doi.org/10.11588/diglit.19769#0093
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ET DE LA CURIOSITÉ 88

nous sommes en contact avec la vie du monde
entier... », « Il importe que le sujet soit animé
d'un rythme vivant qui lui soit propre... ».

Et, en effet, à l'heure où nos architectes décora-
teurs s'affirment dans des expositions d'ensembles
qui sont plus que des promesses, il faut trop souvent
constater que ce qui leur fait défaut c'est le souci
d'une harmonie supérieure coordonnant entre elles
les énergies qui réagissent les unes sur les autres,
« chacune d'elles exerçant sa force par rapport
aux autres ». Ce qui manque dans le concert où
chacun joue à merveille de l'instrument qui lui est
propre, c'est le chef d'orchestre qui, dirigeant les
efforts séparés, les fait coopérer à l'unité sympho-
nique. Ce chef d'orchestre, ce maître d'oeuvre,
sera-t-il l'architecte ? Sera-t-il l'amateur intelligent
et éclairé qui jugera lui-même de ce qu'il désire ?
Qu'importe. Une fois de plus on peut constater que
tous les éléments, pour un intérieur moderne d'un
style qui n'aurait rien à envier à ceux des siècles
passés, existent autour de nous. La seule production
d'une année montre une somme d'efforts, une série
de résultats, dont notre époque peut tirer gloire. Mais,
parmi ces ameublements réunis, en est-il un qu'un
homme de goût puisse accepter d'enthousiasme,
sans songer à des modifications qui en accroîtraient
la beauté? Bien audacieux qui oserait le préten-
dre. Ce n'est pas le salon exécuté par la manu-
facture de Sèvres sous la direction de M. René
Lalique, lequel s'est trompé — ce qui arrive même
à de grands artistes comme lui — et n'a réussi,
dans les lignes grêles d'un décor qu'il imagina,
qu'à donner à ce Salon l'aspect d'une salle de
bains. Ce n'est pas non plus le boudoir ovale
de M." Paul Follot, où les meubles prétentieux,
d'aspect raide et sec, s'unissent à un décor
où le goût allemand serait mâtiné avec le xvni* siè-
cle anglais, décadent et amaigri. Le petit salon
de M. André Groult plaît par sa coloration chaude
et intime, mais les meubles sont laids et man-
quent d'architecture : si au rythme des couleurs
s'ajoutait ici le rythme des lignes, on pourrait
admirer quelque chose de parfait en son genre.
Chez M. Majorelle, au contraire, des meubles de
belles proportions, parfaitement équilibrés — sauf
les fauteuils, cependant — sont placés dans un
cadre sans goût et sans souci des colorations géné-
rales. Dans la salle à manger que présente M. Pierre
Selmersheim, il existe un désaccord absolu entre
les tentures bleu ciel, délicates, assorties aux vi-
traux de M. Edmond Socard, grêles et fluets, et les
meubles massifs, frustes et inélégants. La salle à
manger de M. Mathieu Gallerey a de belles qualités
de solidité et de robustesse, mais panneaux et
meubles semblent un peu trop travail de menuisier
et non pas d'ébéniste. Celle que M. Abel Landry
exécuta donne une note charmante; cependant l'on
regrette que leur auteur n'ait pas donné à sa pen-
sée toute sa cadence : il faudrait peu de chose pour
ajouter au confortable de certains sièges, comme à
l'élégance trop sacrifiée de certaines lignes. Il faut
aussi applaudir à l'effort de M. Maurice Dufrêne,
tout en regrettant la lourdeur de son ornementa-
tion, et à celui de M. Georges Nowak, dont le petit
fumoir, bien qu'un peu froid d'aspect, est soi-
gneusement composé. Enfin, M11» de Félice a exé-
cuté une série de meubles d'antichambre qui mon-
trent tout ce que, entre ses mains, le cuir peut
apporter à une ornementation à la fois simple et
somptueuse. Il y a, de sa part, une intelligente
recherche d'inédit.

La desserte et l'armoire-bibliothèque de M.
Emile Bernaux, décorées de sculptures en plein
bois, sont d'une architecture sévère et sobre ; on
aimerait que cet artiste nous donnât un jour une
salle entière exécutée selon ses plans et meublée
à sa façon.

Certains objets dénotent, de la part de leurs au-
teurs, une ingéniosité unie à un goût excellent,
telles les portières de cuir incisées d'argent de
M11» Louise Germain, les coussins et la frise brodés
par M"'* Marie Lemeilleur, les plaques de pro-
preté de Mm" Berthe Gazin, les tentures peintes
par M. Roustan, les tapisseries décoratives de
M- Fernand Maillaud et celles de Mme Blanche
Ory-Robin, si admirables clans la simplicité de
leur composition.

Si la peinture décorative tient ici une place se-
condaire, les noms de MM. Morisset, Jaulmes,
Devambez, Deltombe, ceux de Mm" Jeanne Bar-
dey et Chauchet-Guilleré la représentent dans
diverses tendances affirmant leur vitalité et leur
force. Les travaux de M. Emile Robert suffisent à
rappeler que le vieil art des ferronniers français
est plus florissant que jamais, et M. Lebourgeois
applique avec esprit ses qualités de sculpteur à
des détails d'architecture et d'aménagement inté-
rieurs.

Quant aux objets d'usage courant, aux « bibe-
lots », les artisans du xr siècle égalent ceux de
n'importe quel temps et de n'importe quel pays.
Les pâtes de verre de M. Decorchemont, les céra-
miques de M. Decœur, les émaux de M. Léon
Jouhaud, les grès de M. Gandais voisinent avec
les cornes ciselées par M11» O'Iîin, les boîtes com-
posées par M11» George, les merveilles de nacre
créées par M. Georges Bastard, les boîtes origi-
nales de M. Clément Mère et ces objets en
métaux repousses et ciselés où M. Ed. Monod-
Herzen, prestigieusement habile, a mis le meilleur
de son talent.

Ajoutez à cela les animaux peints par M. Ray-
mond Bigot, les aquarelles do M. G. Barbier et les
dessins de M. Jouve, les reliures de M. Kieffer et
celles de M. Marius-Michel, les orfèvreries do
MM. Dunand, Bonvallet et Capon, les bijoux de
M. Rivaud, ceux de Mmo Guastalla, les lustres de
M. Szabo : c'est, dans une énumération trop rapide
et trop brève, donner, en évoquant les noms de ces
divers artistes, une idée de la variété de l'Exposi-
tion des Artistes décorateurs et rendre hommage
à l'effort qu'elle représente.

« Société Nouvelle »
(Galerie G. Petit)

Le prélude au Salon de la Société Nationale des
Beaux-Arts qu'est la Société Nouvelle vient do se
faire entendre. Il est un peu alourdi par les treize
toiles où M. J.-E. Blanche exerce sa faconde di-
verse et érudite et par les portraits compassés de
M. La Gandara. Mais M. J.-F. Raffadlli, avec une
verve que les années semblent renouveler, trace
quelques nouvelles et spirituelles pages de la vie
des campagnes et des provinces où tout vit sous
des ciels légers, près de la transparence des eaux
fluides et du calme des jours d'été ; un nu de
M. Lucien Simon est modelé avec une force véri-
dique; M. Aman-Jean, dans un médaillon ovale
qu'il intitule Le Matin, montre le groupe attrayant
que forment deux femmes, l'une poignant l'autre
et laissant entre ses doigts longs glisser la masse
 
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