DOI Heft:
Nr. 1
DOI Artikel:Mantz, Paul: Recherches sur l'histoire de l'orfèvrerie française, [1]
DOI Seite / Zitierlink: https://doi.org/10.11588/diglit.17225#0021
L'ORFÈVRERIE FRANÇAISE. 17
testons — le génie de nos artistes eût baissé à ce point pendant la période
moderne, nous n'en croirions pas moins que leurs efforts sont dignes
d'être racontés. C'est pourquoi nous voudrions commencer nos études
sur l'orfèvrerie au moment précis où les écrivains qui nous ont précédé
ont jugé à propos d'interrompre son histoire.
Ainsi décapité, le sujet reste bien vaste encore. Eh quoi! dire ce que
fut l'orfèvrerie française depuis Louis XII jusqu'à l'année qui vient de
s'achever; en suivre les annales de Mathieu Le Vacher jusqu'à Froment-
Meurice ; rechercher la trace disparue de tant de chefs-d'œuvre donnés
par nos rois aux églises ou à leurs maîtresses; entr'ouvrir, avec une
curiosité rétrospective, l'écrin d'Anne de Bretagne, de la reine Éléonore,
de Diane de Poitiers, de Catherine cle Médicis, de Gabrielle d'Estrées,
d'Anne d'Autriche, de madame de Montespan, de madame de Pompadour,
de Marie-Antoinette et cle l'impératrice Joséphine; étudier, dans le vase
sacré, dans la nef qui décorait la table royale, dans le joyau ciselé qui
scintillait au cou de la favorite, le caprice de la mode tous les jours nou-
velle, la fantaisie changeante de l'idéal, n'est-ce pas se proposer une
lourde tâche, et vouloir enfermer en quelques pages les aventures de -
l'art lui-même? n'est-ce pas, à propos du bijou, refaire toute l'histoire
de France ?
Et telles sont, à vrai dire, les difficultés d'un pareil programme, que
nous n'avons nullement songé à le remplir, et que, si attentif que nous
ayons été à rassembler pendant de longs mois les éléments de ce travail,
nous ne pouvons le présenter au lecteur que comme une esquisse à peine
préparée, une étude incomplète et essentiellement provisoire. Qui donc
d'ailleurs, parmi ceux qui se sont occupés de recherches analogues,
ignore les inévitables périls, les éternelles mésaventures de ces voyages
dans le passé? Lorsque les romanciers et les poètes ont fait leur œuvre,
ils peuvent entonner l'hymne de victoire et chanter Yexegi moniimentwn ;
mais ce droit a été refusé aux historiens. L'édifice dont ils posent les
premières assises est semblable à la cathédrale de Cologne: on y travaille
toujours, on ne le termine jamais.
I
SEIZIÈME SIÈCLE
Le xve siècle avait été à la fois un crépuscule et une aurore. Dans
cette longue période de transformation et de recherche, l'art du moyen
ix. H
testons — le génie de nos artistes eût baissé à ce point pendant la période
moderne, nous n'en croirions pas moins que leurs efforts sont dignes
d'être racontés. C'est pourquoi nous voudrions commencer nos études
sur l'orfèvrerie au moment précis où les écrivains qui nous ont précédé
ont jugé à propos d'interrompre son histoire.
Ainsi décapité, le sujet reste bien vaste encore. Eh quoi! dire ce que
fut l'orfèvrerie française depuis Louis XII jusqu'à l'année qui vient de
s'achever; en suivre les annales de Mathieu Le Vacher jusqu'à Froment-
Meurice ; rechercher la trace disparue de tant de chefs-d'œuvre donnés
par nos rois aux églises ou à leurs maîtresses; entr'ouvrir, avec une
curiosité rétrospective, l'écrin d'Anne de Bretagne, de la reine Éléonore,
de Diane de Poitiers, de Catherine cle Médicis, de Gabrielle d'Estrées,
d'Anne d'Autriche, de madame de Montespan, de madame de Pompadour,
de Marie-Antoinette et cle l'impératrice Joséphine; étudier, dans le vase
sacré, dans la nef qui décorait la table royale, dans le joyau ciselé qui
scintillait au cou de la favorite, le caprice de la mode tous les jours nou-
velle, la fantaisie changeante de l'idéal, n'est-ce pas se proposer une
lourde tâche, et vouloir enfermer en quelques pages les aventures de -
l'art lui-même? n'est-ce pas, à propos du bijou, refaire toute l'histoire
de France ?
Et telles sont, à vrai dire, les difficultés d'un pareil programme, que
nous n'avons nullement songé à le remplir, et que, si attentif que nous
ayons été à rassembler pendant de longs mois les éléments de ce travail,
nous ne pouvons le présenter au lecteur que comme une esquisse à peine
préparée, une étude incomplète et essentiellement provisoire. Qui donc
d'ailleurs, parmi ceux qui se sont occupés de recherches analogues,
ignore les inévitables périls, les éternelles mésaventures de ces voyages
dans le passé? Lorsque les romanciers et les poètes ont fait leur œuvre,
ils peuvent entonner l'hymne de victoire et chanter Yexegi moniimentwn ;
mais ce droit a été refusé aux historiens. L'édifice dont ils posent les
premières assises est semblable à la cathédrale de Cologne: on y travaille
toujours, on ne le termine jamais.
I
SEIZIÈME SIÈCLE
Le xve siècle avait été à la fois un crépuscule et une aurore. Dans
cette longue période de transformation et de recherche, l'art du moyen
ix. H