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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 17.1864

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Blanc, Charles: Grammaire des arts du dessin, 2, Sculpture, 5-7: architecture, sculpture, peinture
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https://doi.org/10.11588/diglit.18740#0069

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62

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

géra des appuis dont la seule vue nous rappellera le poids du marbre, et
déconcertera peut-être notre admiration. Vienne le peintre : il évoquera
l’image du héros dans le milieu même où s’agitait son éloquence; il creu-
sera sur sa toile le ciel de l’Attiqueet les profondeurs delà mer. La scène
entière sera saisie d’un coup d’œil, et l’orateur aux prises avec les vagues
qui lui représentent la multitude de l'agora, n’aura plus rien que de na-
turel dans son emportement ; il pourra être l’objet d’une peinture sublime.
Isolée au contraire sur son piédestal, une ligure aussi fortement agitée ne
serait plus intelligible pour l’esprit ni rassurante pour les yeux. Sa colère
immobile serait ridicule, sans parler ici de son expression, qui, dans un
visage muet, ne serait plus qu’une contorsion éternelle. Et si la statue
n’était pas un outrage à la statique, elle marquerait l’impuissance du
statuaire par les soutiens apparents qu’il lui faudrait ménager dans
l’épaisseur du marbre.

Lorsqu’un homme est immobile, on sent qu’il va bientôt se mouvoir;
le sang qui circule sous sa peau, la vie qui anime son regard nous disent
qu’il est capable d’agir, que son immobilité en ce moment est volontaire
et qu’elle cessera. Voilà pourquoi la figure humaine en peinture, avec la
vérité de ses carnations, la fluidité visible de son sang, la transparence
de sa peau, ne semble jamais immobile ; tandis qu'elle est immobile évi-
demment dans une statue qui ne nous montre que l’extérieur de l’homme,
sans laisser transparaître la circulation de la vie, sans en laisser voir les
colorations. La sculpture est donc moins propre que la peinture à repré-
senter la vivacité du mouvement, parce que la matière qu’elle met en
œuvre semble ajouter encore à son immobilité et nous interdire toute
illusion.

C’est une juste remarque de M. Guizot (Etudes sur les Beaux-Avis),
que la même action exécutée par une personne isolée ou par plusieurs
personnes donne lieu à des attitudes bien différentes. « Ainsi, dit-il, un
homme qui, pour s’exercer, fait des armes contre un mur, ne se place
point en garde et ne se fend point comme celui qui fait assaut avec un
autre. Un homme qui jette une pierre pour apprendre à lancer avec force et
avec adresse n’a ni dans le bras ni dans le reste du corps le mouvement
et la pose de celui qui jette des pierres à un ennemi. Quoique leur action
soit la même, leur intention est différente, et l'intention change le mode
de l’action. 11 y a dans la chaleur d’une action animée, dans les attitudes
qu’elle fait naître, quelque chose de vif et de varié que la peinture doit
reproduire, mais dont la sculpture ne peut donner l’idée. La flexibilité du
corps humain prend, au milieu de ces mouvements rapides d’hommes
qui se touchent et agissent puissamment les uns sur les autres, des
 
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