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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 17.1864

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Nr. 5
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Blanc, Charles: Grammaire des arts du dessin, 2, Sculpture, 10-11: architecture, sculpture, peinture
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https://doi.org/10.11588/diglit.18740#0452

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638

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

que nous appelons la pudeur ? La question est délicate et vaut la peine
qu'on s’y arrête un instant.

« La pudeur, dit Hégel, est un commencement de courroux intérieur
contre quelque chose qui ne doit pas être. L’homme, qui a la conscience
de sa haute destination intellectuelle, doit considérer la simple animalité
comme indigne de lui; il doit cacher, comme ne répondant pas à la
noblesse de l’âme, les parties du corps qui ne servent qu’aux fonctions
organiques, et n’ont aucune expression spirituelle. » Il y a, ce nous
semble, dans ces paroles de l’illustre philosophe, une erreur ou un mal-
entendu. Si la pudeur était produite en nous par la conscience que nous
avons de la sublimité de l’esprit, l’homme, qui est un être pensant plus
encore que la femme, aurait encore plus de pudeur qu’elle; et pourtant
c’est le contraire qui est vrai. La pudeur n’est donc pas née de l’orgueil.
A tout prendre, elle est l’inverse de la naïveté, car là où l’innocence finit
la pudeur commence. Eve ne rougit de sa nudité dans le Paradis ter-
restre, que lorsque, ayant touché à l’arbre de la science, elle connut le
bien et le mal. Si l’antiquité habilla presque toutes les statues de femmes,
si le philosophe Socrate, quand il modela le groupe des trois Grâces, les
représenta vêtues, ce ne fut pas sans doute pour obéir à un sentiment de
pudeur. Nous savons, en effet, que chez les Grecs les statues des dieux,
des héros, des athlètes et des génies, étaient absolument nues, ou du
moins que la draperie n’y jouait qu’un rôle tout à fait accessoire. Or un
peuple aussi délicat, s’il eut écouté les conseils de la pudeur, eût trouvé
certainement plus d’inconvenance à montrer aux femmes la nudité de
l’homme qu’à montrer aux hommes la nudité de la femme. 11 est donc
permis de penser que le sentiment de la pudeur demeura étranger à
l’usage des draperies dans l’art sculptural.

Au surplus, elle est toujours chaste, la beauté statuaire. Pourquoi?
Parce qu’elle est idéale, c’est-à-dire qu’au lieu d’avoir les accents de la
vie individuelle, qui seule pourrait éveiller nos désirs, elle porte les
empreintes de la vie générique, de la vie divine. Un portrait peut exciter
l’amour sensuel, un type ne peut provoquer que l’admiration. Aucune
idée, aucun soupçon même d’impudeur ne saurait s’attacher à Vénus, si
elle est une statue impersonnelle de l’amour. Tout autre serait l’image
fidèle d’une Phryné, que Praxitèle aurait vue sortant des vagues de la
mer ou au moment de s’y plonger.

Telle que la conçut le génie antique, la draperie, invention de l’art,
fut tantôt un motif de variété, tantôt un auxiliaire de l’expression ou un
raffinement de la grâce. Afin d’ajouter un attrait à la beauté, on l’enve-
loppa de mystère, mais d’un mystère non impénétrable qui, laissant de-
 
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