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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 20.1866

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Nr. 3
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Goncourt, Jules de; Goncourt, Edmond de: Debucourt
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https://doi.org/10.11588/diglit.19277#0204

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106

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

sous le bras un carton presque aussi grand que lui. Trois autres, bras
dessus, bras dessous, forment un groupe enlacé qui se balance en toutes
sortes de poses agaçantes et de gracieux penchements, et d’où part
l’œillade de six yeux noirs: trio charmant d’où se détache, en avant,
toute la personne de la plus jolie, en demi-redingote de taffetas couleur
queue de serin, le grand chapeau de taffetas noir couronné de plumes
au-dessus de son échelle de rubans; vraie figurine de la «demoiselle du
bon ton» d’alors, la mouche au coin de l’œil, le décolletage voilé,
le bouquet de roses au sein, le corsage coupé voluptueusement en
pointe, la taille guêpée, les deux chaînes de montres battant à la jupe,
le petit soulier de gros de Naples bleu au pied. Toutes sont roses du
rouge léger de la courtisane, et leurs petites mines apparaissent per-
dues sous les chapeaux bonnettes, dans la folie de la mode, dans
l’extravagance des boucles de leurs perruques et des poufs à la Chinoise,
l’ampleur blanche des grands fichus menteurs, le voltigement des
plumes et des rubans, le nuage des gages, le bouillonné des fanfre-
luches, le falbalassé du linon.

La seconde planche de Debucourt représentant le Palais-Royal s’ap-
pelle la Promenade publique'. Elle est signée D. B. et datée 92. Cette
fois nous sommes dans le jardin2. Bien des choses s’y sont passées depuis
1787. Les maisons de jeu y ont apporté leur fièvre, leur folie, l’argent qui
roule à la débauche. Le Cirque s’est élevé sur le miroir du gazon : on le
voit dans le fond avec ses pilastres et ses jardins suspendus, ses vasques
et ses jets d’eau. Et sous les arbres, plantés à la place des vieux arbres,
confidents des rendez-vous de l’Opéra, dont on a fait des bières, sous les
arbres où Camille Desmoulins a cueilli la verte cocarde de la liberté, c’est
une foule, un coudoiement, le Longchamps à pied du plaisir. L’allée de

1. On sait le prix auquel la mode, revenant à ces planches historiques, les a fait
monter en ces dernières années dans les ventes d’estampes. La Promenade publique,
en élat ordinaire, a dépassé des enchères de 200 francs. Une épreuve avant la lettre a
été vendue 253 francs à la vente de M. Fossé d’Arcosse. Il nous avait dit l’avoir pavée
quinze sous sur le pont Neuf!

2. Une vue du jardin gravée en couleur et intitulée Promenade du jardin du
Palais-Royal avait déjà paru en 1787. Elle représente deux des quatre pavillons ovales
en treillages qui existaient alors au bord du bassin rond, au milieu du quinconce des
tilleuls. De l’un de ces pavillons qui était une succursale du café de Foy à l’autre qui
lui servait de laboratoire, une tente de coutil à rayures bleues est tendue et donne
de l’ombre aux consommateurs attablés, aux personnes d’àge habituées à venir goûter
la fraîcheur, regarder les poissons rouges du bassin et les promeneurs. Moins fine,
moins nuancée de teintes que la Promenade de la Gallerie, cette gravure un peu gros-
sière, poussée à la caricature, et où les groupes mal liés ne font pas foule, ne saurait être
avec justice attribuée à Debucourt, dont elle ne porte du reste ni la signature ni l’adresse
 
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