DOI Heft:
Nr. 3
DOI Artikel:Vauxcelles, Louis: L' "Enseigne de Gersaint"
DOI Seite / Zitierlink:https://doi.org/10.11588/diglit.24871#0242
GAZETTE DES BEAUX-ARTS
CJ18
teau. Il est hors de doute qu’un artiste chargé d’une œuvre toute
d’exécution spontanée comme le fut l'Enseigne de Gersaint, œuvre
peinte en très peu de temps, dans toute la joyeuse folie d’une impro-
visation, avec un entrain singulier, ne peut donner à sa reproduction
exécutée dans une atmosphère de sentiments apaisés, j’allais dire
d’ardeur fatiguée, la force de vie, le mouvement d’expression déjà
projeté avec tant de générosité prime-sautière. Toutefois il nous
semble que, malgré cela, la flamme du pinceau de Watteau volti-
gerait quelquefois, animée par d’ardentes réminiscences dans cette
répétition, si véritablement elle était due au grand artiste lui-même,
dont la force de création parait s’être d’ailleurs épuisée dans l’effort
nécessité par l’exécution de cette peinture, la plus considérable de
sa belle et courte carrière. »
*
❖ *
Mais, direz-vous, et le second panneau, le côté droit de l’En-
seigne, n’en a-t-on jamais ouï parler? Où peut-il être à l'heure
actuelle? Enigme jusqu’à ce jour indéchiffrée.
Une lueur, toutefois, en ce chaos. Un catalogue, récemment
retrouvé, le catalogue « du cabinet de feu M. Francillon », Paris,
15 mai 1829, porte ces indications suggestives : « N° 157, Watteau
(Antoine). Le cabinet d’un marchand de tableaux. Dans une salle
ornée de peintures, une jeune femme, assise à son comptoir, pré-
sente à une dame un petit tableau que celle-ci regarde avec beau-
coup d’attention. Un autre tableau posé à terre occupe particulière-
ment les regards de plusieurs amateurs dont l’un s’est agenouillé
pour le mieux voir. Nous avons entendu dire que cet ouvrage fut fait
pour Gersaint et servait d'enseigne à son magasin. »
C’est l’exacte analyse. De 1829 à 1907, renouera-t-on la filière?
Les amis de Watteau le souhaitent ardemment.
LOUIS VAUXCELLES
CJ18
teau. Il est hors de doute qu’un artiste chargé d’une œuvre toute
d’exécution spontanée comme le fut l'Enseigne de Gersaint, œuvre
peinte en très peu de temps, dans toute la joyeuse folie d’une impro-
visation, avec un entrain singulier, ne peut donner à sa reproduction
exécutée dans une atmosphère de sentiments apaisés, j’allais dire
d’ardeur fatiguée, la force de vie, le mouvement d’expression déjà
projeté avec tant de générosité prime-sautière. Toutefois il nous
semble que, malgré cela, la flamme du pinceau de Watteau volti-
gerait quelquefois, animée par d’ardentes réminiscences dans cette
répétition, si véritablement elle était due au grand artiste lui-même,
dont la force de création parait s’être d’ailleurs épuisée dans l’effort
nécessité par l’exécution de cette peinture, la plus considérable de
sa belle et courte carrière. »
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Mais, direz-vous, et le second panneau, le côté droit de l’En-
seigne, n’en a-t-on jamais ouï parler? Où peut-il être à l'heure
actuelle? Enigme jusqu’à ce jour indéchiffrée.
Une lueur, toutefois, en ce chaos. Un catalogue, récemment
retrouvé, le catalogue « du cabinet de feu M. Francillon », Paris,
15 mai 1829, porte ces indications suggestives : « N° 157, Watteau
(Antoine). Le cabinet d’un marchand de tableaux. Dans une salle
ornée de peintures, une jeune femme, assise à son comptoir, pré-
sente à une dame un petit tableau que celle-ci regarde avec beau-
coup d’attention. Un autre tableau posé à terre occupe particulière-
ment les regards de plusieurs amateurs dont l’un s’est agenouillé
pour le mieux voir. Nous avons entendu dire que cet ouvrage fut fait
pour Gersaint et servait d'enseigne à son magasin. »
C’est l’exacte analyse. De 1829 à 1907, renouera-t-on la filière?
Les amis de Watteau le souhaitent ardemment.
LOUIS VAUXCELLES