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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 4. Pér. 10.1913

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Nr. 2
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Hinzelin, Émile: L' art rustique en Alsace
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https://doi.org/10.11588/diglit.24887#0166

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L’ART RUSTIQUE EN ALSACE

1 5 I

muraille, le banc invite l'homme à s’asseoir. Le joli rouet (avez-
vous remarqué qu'un rouet est toujours joli?) invite la femme à
travailler. Coffres et buffets sont les monuments solides élevés à la
fortune du lieu. Dans sa gaine, la vieille horloge à poids rythme
de son balancier la fuite consciencieuse de ses minutes. En l’alcôve,
deux lits. D’ordinaire, le maître cl la maîtresse de la maison ne
reposent pas dans la meme couche. Dignité et chasteté du foyer. Le
lit destiné au maître porte une petite tablette où l’on place la Bible.
Le Livre Saint préside au sommeil vénérable. Voici la chambre du
grand-père. Belle et douce chambre, parfaitement tranquille, où
l’aïeul reste tant qu’il veut. Il y prend ses repas, quand tel est son
bon plaisir. Veut-on lui faire visite ? On frappe à sa porte et on lui
demande s’il désire recevoir. Près de son lit à baldaquin sont sus-
pendues les photographies delà maison. Ici, la famille entière ligure
près de son chef, respectueusement. Rien de plus édifiant que cet
usage d’Alsace. La piété filiale y sourit avec une gravité sublime. Il
y a du patricial dans ce patriarcal. I n peuple est grand par la gran-
deur meme du respect qu’il porte aux vieux. Quand la maison alsa-
cienne fut prête à recevoir les visiteurs, M. le juge Stoffel, qui en
avait dirigé la reconstitution, vint y dîner avec des amis. C’était
l’Ame même de l’Alsace que les convives respiraient, au milieu de
ces choses si personnelles et si persistantes. La nuit tomba. On allu-
ma des chandelles, comme au vieux temps. L’ombre des rideaux se
dessina sur les murs. Les ancêtres demeurés là-bas semblaient re-
venir parmi nous, avec toute leur bonne grâce, pour assister au
repas. Des larmes mouillèrent tous les yeux.

Le génie décoratif du xviit0 siècle a inspiré et renouvelé les arts
industriels, dans toute l’Alsace. Voici la sculpture sur bois cl la me-
nuiserie, enrichissant de leurs travaux les demeures même les plus
humbles. Voici la sculpture. Voici la gravure, où l’Alsace se révèle,
une fois de plus, si originale. Voici la ferronnerie qui, sur les bal-
cons, les fenêtres, les impostes des grilles, met une grâce si aristo-
cratique. Voici les tissus aux ingénieux dessins, portant dans leurs
plis l’opulence d’une cité.

Voilà enfin le jouet. De tout temps, en Alsace, le jouet a tenu
large place dans la vie sociale. Tous les enfants en font leur délice,
et maintes grandes personnes, leur divertissement. Dans telle
famille alsacienne, on conserve pieusement des ménages de poupées
du xvme siècle : appartements lilliputiens avec salon, chambre à
coucher, salle à manger, cuisine, où les meubles et les ustensiles
 
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