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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 5. Pér. 11.1925

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Nr. 6
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Doin, Jeanne: Charles Séchan et son atelier de décoration théatrale pendant le romantisme
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https://doi.org/10.11588/diglit.24945#0385

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CHARLES SÉCHAIS

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Séchan. la presse suivait volontiers l'opinion chagrine de Castil-Blaze,
l’ennemi déclaré de la dupo riche lie rie, et blâmait les trop beaux décors qui
procurent aux yeux des joies inutiles. Un des rares écrivains romantiques,
qui défendit les décorateurs, fut Théophile Gautier. Avec véhémence, il
signala l'intérêt de leurs recherches et la richesse de leurs trouvailles. Ainsi
dans son prospectus des Beautés de l’Opéra, il décrivit en poète l’art mis au
service des œuvres lyriques, art qui passe sans laisser de trace, telle « la (usée
étincelante éteinte dans l’azur de la nuit1 ».

Ce qui frappe le décor d’une sorte d’infériorité, c’est qu’il n’est qu’un
complément provisoire de la fiction scénique. Mais ce complément est parfois
une œuvre supérieurement imaginée et construite, qui exige des connais-
sances multiples. L’art du décor est un art d’érudit, c’est aussi un art de
coloriste, c’est surtout un art de magicien. Si de nos jours les artistes
d’avant-garde ont pour objet de créer l’atmosphère au détriment des détails,
et de remplacer le jeu de la brosse par des draperies ou par des paravents sur
lesquels joue le rayon coloré des projecteurs électriques, il est bon de rappeler
qu’au lendemain de la préface de Cromwell, la rénovation du décor s’effectua
en réaction contre la défroque classique et les anachronismes absurdes d’un
usage alors courant.

Charles Séchan fut un des principaux animateurs du décor romantique.
Chef d’un des ateliers les plus renommés de son époque, il contribua, avec
ses associés, à la mise en scène des drames de Victor Hugo, d’Alfred de
Vigny, d’Alexandre Dumas, de Casimir Delavigne, des comédies de Scribe,
des opéras de Meyerbeer, de Donizetti et d’Halévy. Il représente toute une
période tumultueuse et féconde. C’est pourquoi il est juste de lui rendre
l’hommage qui lui est dû, avant que le temps ail achevé de disperser ses
œuvres et d’effacer une figure qui cul son heure d’éclat et de célébrité.

Charles Séchan est un oublié; il n a jamais été un méconnu. On ne l'a
ni pillé, ni vilipendé, ni emprisonné ; ce n’est pas un second Hector Horeau.
Comme lui, cependant, il a été un inventeur fougueux et convaincu ; mais
son activité s’est manifestée opportunément dans un domaine où les com-
mandes étaient incessantes et les réalisations immédiates.

Sa vie pourrait servir de légende à une image d’Epinal. Tout s’y trouve
réuni suivant l’inclination populaire : naissance obscure, mort prématurée
des parents, pauvreté, travail, frasques de jeunesse, assagissement, succès, i.

i. Théophile Gautier, Souvenirs de théâtre, d’art et de critique, p. 6y.
 
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