Revue de l'Afrique française et des antiquités africaines (4.1886)

CHRONIQUE

CORRESPONDANCE DE CONSTANTINE

Constantine, le 15 décembre 1886.

Le fait capital du moment dans la région de Constantine,.et
même dans .toute l'Algérie, est l'abondance de la récolte en vin.
Après un été médiocrement chaud, les pluies d'orage du mois de
septembre, exceptionnellement abondantes, ont permis au raisin
de se développer en quelques jours et de donner un rendement
inespéré. La surprise a été générale, et le manque de récipients
a empêché bien des colons de tirer parti de toute leur récolte.
On cite des vignes à, la troisième feuille ayant donné quarante
hectolitres à l'hectare.

Cette réussite encourage les planteurs et va donner un nouvel
essor à la création des vignobles. Ainsi, l'effet produit par la
découverte de quelques taches phylloxériques, aux environs de
Philippeville, est déjà atténué; la panique, du reste, n'a pas été
grande dans nos régions, et il serait à souhaiter que l'effet de
cette nouvelle, si maladroitement répandue, n'ait pas été plus
désastreux pour nous en France. Il n'est pas douteux qu'avec les
précautions qu'on a prises, et en continuant une surveillance
vigilante, ou ne se rende absolument maître du fléau.

Cette simple déclaration qui commence ma lettre : « Le fait
capital du moment est la récolte de la vigne. » n'est-elle pas
l'indice de la transformation économique de l'Algérie ? Repor-
tons-nous à quinze années en arrière : la vigne en pleine terre
n'existait pour ainsi dire pas, et ce n'est guère que depuis dix-
ans qu'on a commencé à la planter sérieusement. En présence
d'un tel résultat, quelles espérances n'est-on pas en droit de
fonder sur l'avenir ?

Mais pour cela il faut des capitaux el encore des capitaux ; il fau t