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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 20.1866

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Lagrange, Léon: Bulletin Mensuel: Décembre 1865
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https://doi.org/10.11588/diglit.19277#0100

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

9 h

lents couronnent l’édifice : du côté de la rivière, la France, par M. Carpeaux; du côté
du jardin, la Puissance, par M. Cavelier, compositions de plusieurs figures colossales,
déjà honorées d’une couche de badigeon. Cette sculpture tiaut placée provoque des ré-
flexions do tout genre. On se demande si la statuaire a vraiment pour mission de servir
de paravent à des toits d’ardoise. Et puis on pense à la Grèce, le pays du soleil, où les
statues décoratives s’abritaient sous les rampants d’un fronton.Nous, dans un climat de
pluie, de neige, de-gelées, de brouillards, c'est au-dessus des frontons que nous his-
sons les œuvres de nos artistes les plus dignes d’estime. Les Grecs, qui savaient le
prix de la sculpture, lui accordaient un parasol. Nous lui refusons un parapluie.

Les églises de Saint-Augustin et de la Trinité commencent aussi à se débarrasser de
leur voile d’échafaudages. Le beffroi, je veux dire le clocher de la Trinité, dessine, au
fond de la Chaussée-d’Antin, son élégante silhouette. De face, c’est un bijou; de profil,
la longueur de l’église l’absorbe complètement. On croirait voir un dé à coudre au bout
d’une table à ministre. Le reste de l’architecture offre plus d’un point de ressemblance
avec Saint-Augustin. Même effacement des profils, mêmes détails hétérogènes, associés
un peu au hasard. Comme à Saint-Augustin, un vaste sous-sol ajoute à la surface de
l’édifice supérieur une surface considérable, et l’on obtient ainsi, ad majorent Dei
gloriam, une église en partie double.

La crypte de Saint-Augustin, déjà livrée au culte, n’a rien du mystère des églises
souterraines. Elle rappelle plutôt les salons des paquebots transatlantiques. Des sabords
bien ménagés y versent, à travers les cabines latérales, une abondante lumière. Sous ce
plafond surbaissé comme l’entre-pont d’un navire, le chrétien se souviendra qu’il n’est
qu'un passager au milieu de l'océan du monde.

Dans l’église supérieure, le gros œuvre se termine. L’édifice de pierre et l’édifice
de fer, contenant et contenu, n’auront bientôt plus qu’à passer par les mains des déco-
rateurs avant d’être livrés aux sculpteurs et aux peintres. Les enlumineurs ont entre-
pris la grande nef. La coupole se dresse sur ses fermes gigantesques, dominant un
immense transept. D’autres que nous auront à juger le monument construit par
M. Baltard. Malgré les critiques auxquelles peut donner lieu l’emploi simultané de la
pierre et du fer, la conception de cette énorme coupole devra rester un titre d’honneur
pour l’architecte. Ce n’est pas seulement une innovation hardie, c’est peut-être l’œuvre
la plus savante de l’architecture contemporaine.

A l’extérieur, la sculpture a étagé le long de l'étroite façade une quantité de figures
en bas-relief et en ronde bosse, dont quelques-unes mériteraient un examen spécial.
Sous le porche on voit briller les couleurs assurément trop crues de trois médaillons
peints sur lave par M. Paul Balze. Est-ce pour en tempérer l'éclat que la rose qui s’épa-
nouit à l’étage supérieur a reçu sur ses meneaux une teinte fauve? Si les meneaux sont
en pierre, pourquoi les peindre? S’ils sont en fer, pourquoi leur donner la couleur du
chêne? Rose de fer ou rose de bois, triste bouquet au milieu des blancheurs laiteuses
de la pierre.

Sans prolonger davantage cette revue au pas de course, qui n’a d’autre prétention
que de noter les souvenirs d’un flâneur, terminons par une remarque générale. Il est
impossible de n’ôtre pas frappé des caractères communs que présentent des édifices si
différents. On a dit de notre époque qu’elle avait la maladie de la pierre. On peut ajou-
ter qu’elle a l’épidémie du décor. A peine l’architecte a-t-il dressé un mur, 1 ornema-
niste (un mot créé pour nous) s’en empare, s’v attache, s’y répand, et, gagnant de
proche en proche, se rend maître de tout, depuis le sol et le sous-sol jusqu’au faîte des
 
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