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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
constater que plusieurs des Musées de l’Europe, et en première ligne le
British Muséum, ont une incontestable supériorité sur nous. Mais c’est là
un sujet sur lequel je veux d’autant moins insister que M. Rayet l’a traité
récemment avec une autorité qui a dû faire pénétrer dans les esprits cette
conviction que les crédits inscrits pour l'enrichissement de nos grandes
collections publiques sont tout à fait insuffisants. Ce n’est pas, au surplus,
seulement par l’insuffisance de nos acquisitions que nous avons perdu le
rang que nous aurions pu garder. Nous n’avons pas porté une assez
grande attention à l’administration de nos Musées. Tandis qu’à l’étran-
ger on formait toute une pépinière de jeunes gens instruits, attentifs,
ardents aux recherches; tandis que l’on faisait appel à toutes les res-
sources que peut offrir la représentation diplomatique et consulaire tenue
en éveil, nous nous sommes bornés à conserver des conservateurs, du plus
haut mérite, j’en conviens, mais toujours prêts à s’en prendre au manque
de ressources de leur manque d’activité. Pendant le court séjour que j’ai
fait à la rue de Valois, j’avais présenté à la signature de M. le Président
de la République, qui avait bien voulu l’accepter, un décret autorisant
la création d’une école d’archéologie au Louvre. Aux termes de ce décret,
cette école devait avoir des débuts très modestes, et elle se proposait de
former des missionnaires qui, après avoir parcouru le monde dans l’in-
térêt de nos collections publiques, auraient trouvé plus tard dans les
postes de conservateurs de ces mêmes collections la récompense due au
savoir dont ils auraient fait preuve. Mon excellent ami, M. de Ronchaud,
poursuit l’exécution de ce projet avec un zèle et une persistance dont je
lui témoigne ici toute ma gratitude, parce que je sais combien l’on ren-
contre de difficultés pour réaliser la réforme la plus simple et dont l’uti-
lité est le moins contestée.
En ce qui touche les musées d’ordonnance nouvelle et dont le Musée
de Kensington passe, je le répète, pour être le type le plus complet, il
n’y a eu en France qu’une tentative isolée et restreinte de la part d’une
société particulière, qui a cherché à instituer, d’abord au pavillon de Flore
et plus tard au palais de l’Industrie, un musée des arts décoratifs. Précé-
demment une autre société particulière connue sous le nom cl’ Union
centrale des beaux-arts appliqués à VIndustrie, frappée de la nécessité de
remédier à la décadence menaçante des applications industrielles de l’art,
avait institué à la place des Vosges un centre d’action qui venait utile-
ment en aide à l’école que nous a léguée le peintre Bachelier. Ces deux
sociétés se sont récemment réunies. Elles ont sollicité et obtenu de l’État
la reconnaissance d’utilité publique et elles ont entrepris de doter Paris
d’un Musée des Arts décoratifs à l’aide du produit d’une souscription
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
constater que plusieurs des Musées de l’Europe, et en première ligne le
British Muséum, ont une incontestable supériorité sur nous. Mais c’est là
un sujet sur lequel je veux d’autant moins insister que M. Rayet l’a traité
récemment avec une autorité qui a dû faire pénétrer dans les esprits cette
conviction que les crédits inscrits pour l'enrichissement de nos grandes
collections publiques sont tout à fait insuffisants. Ce n’est pas, au surplus,
seulement par l’insuffisance de nos acquisitions que nous avons perdu le
rang que nous aurions pu garder. Nous n’avons pas porté une assez
grande attention à l’administration de nos Musées. Tandis qu’à l’étran-
ger on formait toute une pépinière de jeunes gens instruits, attentifs,
ardents aux recherches; tandis que l’on faisait appel à toutes les res-
sources que peut offrir la représentation diplomatique et consulaire tenue
en éveil, nous nous sommes bornés à conserver des conservateurs, du plus
haut mérite, j’en conviens, mais toujours prêts à s’en prendre au manque
de ressources de leur manque d’activité. Pendant le court séjour que j’ai
fait à la rue de Valois, j’avais présenté à la signature de M. le Président
de la République, qui avait bien voulu l’accepter, un décret autorisant
la création d’une école d’archéologie au Louvre. Aux termes de ce décret,
cette école devait avoir des débuts très modestes, et elle se proposait de
former des missionnaires qui, après avoir parcouru le monde dans l’in-
térêt de nos collections publiques, auraient trouvé plus tard dans les
postes de conservateurs de ces mêmes collections la récompense due au
savoir dont ils auraient fait preuve. Mon excellent ami, M. de Ronchaud,
poursuit l’exécution de ce projet avec un zèle et une persistance dont je
lui témoigne ici toute ma gratitude, parce que je sais combien l’on ren-
contre de difficultés pour réaliser la réforme la plus simple et dont l’uti-
lité est le moins contestée.
En ce qui touche les musées d’ordonnance nouvelle et dont le Musée
de Kensington passe, je le répète, pour être le type le plus complet, il
n’y a eu en France qu’une tentative isolée et restreinte de la part d’une
société particulière, qui a cherché à instituer, d’abord au pavillon de Flore
et plus tard au palais de l’Industrie, un musée des arts décoratifs. Précé-
demment une autre société particulière connue sous le nom cl’ Union
centrale des beaux-arts appliqués à VIndustrie, frappée de la nécessité de
remédier à la décadence menaçante des applications industrielles de l’art,
avait institué à la place des Vosges un centre d’action qui venait utile-
ment en aide à l’école que nous a léguée le peintre Bachelier. Ces deux
sociétés se sont récemment réunies. Elles ont sollicité et obtenu de l’État
la reconnaissance d’utilité publique et elles ont entrepris de doter Paris
d’un Musée des Arts décoratifs à l’aide du produit d’une souscription