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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
qui, à de rares exceptions près, a su éviter les redites et qui a mon-
tré le parti que l’on pouvait tirer des longues salles du Jeu de Paume
des Tuileries. La décoration, fournie par un grand magasin de nou-
veautés, est d’une sobriété des plus louables, et sur les tentures d’un
vert sourd encadrant des lambris d’acajou clair ou de bois laqué de
blanc se détachent, convenablement espacées, les bordures éclatantes
ou fanées d’où émergent les visages et les toilettes des beautés du
temps jadis. Un petit salon qui sépare les deux galeries contient un
buste de Mmc Du Barry, par Pajou (c’est, dit-on, le plâtre original
conservé dans l’atelier de l’artiste), avec une vingtaine de dessins aux
trois crayons, à la sanguine et au pastel.
*
% ❖
Le temps n’est pas loin où l’école anglaise du xvine siècle était
aussi ignorée au Louvre que dans les galeries particulières françaises
et tous les avertissements de la critique soucieuse de remplir son
véritable rôle, c’est-à-dire de signaler ou d’éclairer les coins dédai-
gnés ou obscurs de son vaste domaine, étaient restés sans écho.
Thoré-Btirger, dans l'Histoire des peintres, Ernest Chesneau, à pro-
pos de l’Exposition Universelle de Londres (1862), Léonce de Pesqui-
doux dans un petit volume spécial, Feuillet de Conciles dans un
iu-8°plus majestueux, avaient inutilement stimulé le zèle des conser-
vateurs de notre grand musée et incité les amateurs à se départir de
leur réserve ou de leur défiance. Désormais il n’en est plus ainsi : des
expositions fréquentes motivées par les raisons les plus diverses, de
somptueuses publications, ont familiarisé les curieux et même les
simples promeneurs avec des noms et des œuvres qui n’excitaient
jadis qu’une faible sensation. De nombreux spécimens de cet art à
la fois très personnel et plein de réminiscences ornent aujourd’hui
les plus renommées d’entre les galeries parisiennes et nous avons le
droit de nous montrer, en connaissance de cause, plus difficiles que
jadis. Bien qu’un vieux proverbe affirme qu’ « à cheval donné il ne
faut point regarder la bride », nous eussions souhaité que pour sa
propre réputation l’école anglaise fût mieux représentée qu’elle ne
l'est en ce moment aux Tuileries; mais cela ne nous empêche nulle-
ment d’exprimer notre gratitude aux particuliers et aux musées
d’outre-Manche qui ont consenti à un prêt toujours aléatoire en
dépit des garanties qui l’entourent.
A défaut de la qualité suprême, la rareté a bien son mérite, et
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qui, à de rares exceptions près, a su éviter les redites et qui a mon-
tré le parti que l’on pouvait tirer des longues salles du Jeu de Paume
des Tuileries. La décoration, fournie par un grand magasin de nou-
veautés, est d’une sobriété des plus louables, et sur les tentures d’un
vert sourd encadrant des lambris d’acajou clair ou de bois laqué de
blanc se détachent, convenablement espacées, les bordures éclatantes
ou fanées d’où émergent les visages et les toilettes des beautés du
temps jadis. Un petit salon qui sépare les deux galeries contient un
buste de Mmc Du Barry, par Pajou (c’est, dit-on, le plâtre original
conservé dans l’atelier de l’artiste), avec une vingtaine de dessins aux
trois crayons, à la sanguine et au pastel.
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Le temps n’est pas loin où l’école anglaise du xvine siècle était
aussi ignorée au Louvre que dans les galeries particulières françaises
et tous les avertissements de la critique soucieuse de remplir son
véritable rôle, c’est-à-dire de signaler ou d’éclairer les coins dédai-
gnés ou obscurs de son vaste domaine, étaient restés sans écho.
Thoré-Btirger, dans l'Histoire des peintres, Ernest Chesneau, à pro-
pos de l’Exposition Universelle de Londres (1862), Léonce de Pesqui-
doux dans un petit volume spécial, Feuillet de Conciles dans un
iu-8°plus majestueux, avaient inutilement stimulé le zèle des conser-
vateurs de notre grand musée et incité les amateurs à se départir de
leur réserve ou de leur défiance. Désormais il n’en est plus ainsi : des
expositions fréquentes motivées par les raisons les plus diverses, de
somptueuses publications, ont familiarisé les curieux et même les
simples promeneurs avec des noms et des œuvres qui n’excitaient
jadis qu’une faible sensation. De nombreux spécimens de cet art à
la fois très personnel et plein de réminiscences ornent aujourd’hui
les plus renommées d’entre les galeries parisiennes et nous avons le
droit de nous montrer, en connaissance de cause, plus difficiles que
jadis. Bien qu’un vieux proverbe affirme qu’ « à cheval donné il ne
faut point regarder la bride », nous eussions souhaité que pour sa
propre réputation l’école anglaise fût mieux représentée qu’elle ne
l'est en ce moment aux Tuileries; mais cela ne nous empêche nulle-
ment d’exprimer notre gratitude aux particuliers et aux musées
d’outre-Manche qui ont consenti à un prêt toujours aléatoire en
dépit des garanties qui l’entourent.
A défaut de la qualité suprême, la rareté a bien son mérite, et