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Nr. 1-2
DOI Artikel:Mugg, Jean-Pierre; Bord, Lucien-Jean: L' iconographie du chasseur médiéval: essai de présentation =
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U ICONOGRAPHIE DU CHASSEUR MÉDIÉVAL
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Au folio 51 de l'Évangéliaire de Saint-Bertin'^ (ill. 7), réalisé vers l'an mil, le centre de
la page est occupé par l'initiale décorée d'une Apparition de l'ange à Zacharie
et d'une Nativité. Le texte est encadré par des bordures ; celles des côtés sont ornées de
rinceaux « habités » et de médaillons où l'on reconnaît diverses personnifications (Joie,
Charité, Victoire, Bonheur, Lumière, Vie), tandis que les bordures horizontales montrent
chacune une scène de chasse. En haut une chasse à courre au cerf où l'animal est lancé par
une meute et poursuivi par un veneur à cheval armé d'une lance ou d'un dard. En bas une
chasse au sanglier, l'animal qui tient le ferme, entouré de chiens, est servi à l'épieu par un
veneur à pied.
Lorsque l'on sait que cet Évangéliaire a été réalisé en milieu monastique, pour et dans
la riche abbaye de Saint-Bertin et que la page en question sert de frontispice à l'Evangile
de Luc, on reste quelque peu étonné devant le choix du décor des bordures qui entourent le
texte et son initiale et qui témoignent, pour le moins, d'une bonne connaissance et d'un
intérêt certain pour les réalités cynégétiques.
Toujours au XL siècle, mais dans son troisième tiers, nous disposons d'un document
exceptionnel qui, s'il n'est pas principalement consacré - loin s'en faut - à la chasse, nous
fournit cependant quelques images du plus haut intérêt ; il s'agit de la tapisserie de
BayeuxA
Cette longue et étroite bande de lin, brodée de laine, réalisée au lendemain de la con-
quête de l'Angleterre par Guillaume de Normandie et narrant cette campagne^, inaugure
son récit imagé par l'ambassade du comte Harold Godwinson (1022-1066) auprès du duc
Guillaume en 1064. Les vingt quatre premières scènes'^ de la tapisserie sont consacrées
à cette ambassade. Or, dès la seconde scène, lors de son départ vers le port de Bosham,
Harold est représenté comme un cavalier tenant un faucon sur son poing gauche et précédé
de sa meute (ill. 8). Lorsqu'il embarque (scène 4), il tient toujours son oiseau tandis qu'un
serviteur, haut troussé pour gagner le bateau, porte un chien sous chaque bras. Bien que
son navire ait dû toucher la terre sur les côtes du Ponthieu, ce qui a amené la capture des
voyageurs par le comte Guy (scène 8), Harold ne se départit pas de son faucon et, remis en
liberté sur les instances de Guillaume de Normandie, il se présentera devant celui-ci en
ayant toujours le faucon au poing, tout comme le duc d'ailleurs (scène 13).
Il y a certes là une désignation du statut social de l'intéressé, mais il ne faut cependant
pas voir dans ces images du comte une simple figuration convenue. Nous savons par
ailleurs, et par des documents très fiables, qu'il manifestait un goût prononcé pour la
chasse en général et la fauconnerie en particulier'^ et l'on peut avancer que, pour les con-
cepteurs de la broderie, contemporains des faits, la passion de Harold pour la chasse au vol
avait fait mémoire.
'3 Page d'incipit de l'Évangile de saint Luc, New York, The Pierpont Morgan Library, MS M.333, Évangéliaire
de Saint-Bertin, f° 51 r°.
'4 Fondée au VIF siècle par Audomar, évêque de Thérouanne, à Saint-Omer, elle devint rapidement l'une des plus
puissantes du Nord. Cf. Arthur GIRY, Ff Atome & /a w7A & Saoit-O/ncr et & .sei ia.stàaO'on.s' ,/n.s^n 'on Y/L M'ède,
(Bibliothèque de l'École des Hautes Études, 56), Paris, 1877.
'3 Bayeux, Centre Guillaume le Conquérant, Musée de la tapisserie.
'6 Sur la tapisserie de Bayeux on consultera, parmi une vaste bibliographie : Simone BERTRAND et al., La 7bpAyen'e
& Bayoax, Paris, 1957 ; Simone BERTRAND, La & Bayoax, (Introductions à la nuit des temps, 2),
La Pierre-qui-Vire, 1966 ; Lucien MUSSET, La & Bayotor, Paris, 2002.
'7 Nous suivons la numérotation proposée par Lucien Musset O'è/4.) qui reprend d'ailleurs les indications portées par
les restaurateurs anciens sur la toile de doublage.
's Cf. MUSSET, op. cit., p. 4L
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Au folio 51 de l'Évangéliaire de Saint-Bertin'^ (ill. 7), réalisé vers l'an mil, le centre de
la page est occupé par l'initiale décorée d'une Apparition de l'ange à Zacharie
et d'une Nativité. Le texte est encadré par des bordures ; celles des côtés sont ornées de
rinceaux « habités » et de médaillons où l'on reconnaît diverses personnifications (Joie,
Charité, Victoire, Bonheur, Lumière, Vie), tandis que les bordures horizontales montrent
chacune une scène de chasse. En haut une chasse à courre au cerf où l'animal est lancé par
une meute et poursuivi par un veneur à cheval armé d'une lance ou d'un dard. En bas une
chasse au sanglier, l'animal qui tient le ferme, entouré de chiens, est servi à l'épieu par un
veneur à pied.
Lorsque l'on sait que cet Évangéliaire a été réalisé en milieu monastique, pour et dans
la riche abbaye de Saint-Bertin et que la page en question sert de frontispice à l'Evangile
de Luc, on reste quelque peu étonné devant le choix du décor des bordures qui entourent le
texte et son initiale et qui témoignent, pour le moins, d'une bonne connaissance et d'un
intérêt certain pour les réalités cynégétiques.
Toujours au XL siècle, mais dans son troisième tiers, nous disposons d'un document
exceptionnel qui, s'il n'est pas principalement consacré - loin s'en faut - à la chasse, nous
fournit cependant quelques images du plus haut intérêt ; il s'agit de la tapisserie de
BayeuxA
Cette longue et étroite bande de lin, brodée de laine, réalisée au lendemain de la con-
quête de l'Angleterre par Guillaume de Normandie et narrant cette campagne^, inaugure
son récit imagé par l'ambassade du comte Harold Godwinson (1022-1066) auprès du duc
Guillaume en 1064. Les vingt quatre premières scènes'^ de la tapisserie sont consacrées
à cette ambassade. Or, dès la seconde scène, lors de son départ vers le port de Bosham,
Harold est représenté comme un cavalier tenant un faucon sur son poing gauche et précédé
de sa meute (ill. 8). Lorsqu'il embarque (scène 4), il tient toujours son oiseau tandis qu'un
serviteur, haut troussé pour gagner le bateau, porte un chien sous chaque bras. Bien que
son navire ait dû toucher la terre sur les côtes du Ponthieu, ce qui a amené la capture des
voyageurs par le comte Guy (scène 8), Harold ne se départit pas de son faucon et, remis en
liberté sur les instances de Guillaume de Normandie, il se présentera devant celui-ci en
ayant toujours le faucon au poing, tout comme le duc d'ailleurs (scène 13).
Il y a certes là une désignation du statut social de l'intéressé, mais il ne faut cependant
pas voir dans ces images du comte une simple figuration convenue. Nous savons par
ailleurs, et par des documents très fiables, qu'il manifestait un goût prononcé pour la
chasse en général et la fauconnerie en particulier'^ et l'on peut avancer que, pour les con-
cepteurs de la broderie, contemporains des faits, la passion de Harold pour la chasse au vol
avait fait mémoire.
'3 Page d'incipit de l'Évangile de saint Luc, New York, The Pierpont Morgan Library, MS M.333, Évangéliaire
de Saint-Bertin, f° 51 r°.
'4 Fondée au VIF siècle par Audomar, évêque de Thérouanne, à Saint-Omer, elle devint rapidement l'une des plus
puissantes du Nord. Cf. Arthur GIRY, Ff Atome & /a w7A & Saoit-O/ncr et & .sei ia.stàaO'on.s' ,/n.s^n 'on Y/L M'ède,
(Bibliothèque de l'École des Hautes Études, 56), Paris, 1877.
'3 Bayeux, Centre Guillaume le Conquérant, Musée de la tapisserie.
'6 Sur la tapisserie de Bayeux on consultera, parmi une vaste bibliographie : Simone BERTRAND et al., La 7bpAyen'e
& Bayoax, Paris, 1957 ; Simone BERTRAND, La & Bayoax, (Introductions à la nuit des temps, 2),
La Pierre-qui-Vire, 1966 ; Lucien MUSSET, La & Bayotor, Paris, 2002.
'7 Nous suivons la numérotation proposée par Lucien Musset O'è/4.) qui reprend d'ailleurs les indications portées par
les restaurateurs anciens sur la toile de doublage.
's Cf. MUSSET, op. cit., p. 4L