DOI issue:
Nr. 1-2
DOI article:Mugg, Jean-Pierre; Bord, Lucien-Jean: L' iconographie du chasseur médiéval: essai de présentation =
DOI Page / Citation link: https://doi.org/10.11588/diglit.35032#0062
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LUCIEN-JEAN BORD, JEAN-PtERRE MUGG
dans la plupart des ouvrages de ce type : les semailles d'octobre et l'hallali du sanglier en
décembre. H est intéressant de rechercher la manière dont ces deux scènes, qui se retrou-
vent dans le calendrier du Ærévmzrc Grmzcmzà l'extrême fin du Moyen Age^ siècle, ont
pu évoluer, pendant le quasi siècle qui sépare ces deux fastueux manuscrits.
La scène des semailles, en octobre, nous montre, sur l'enluminure des 7rà$
JVcMrc.y, un épouvantail fiché sur un pieu et contrefaisant un archer dans un champ fraîche-
ment ensemencé : il tient un arc dans le geste du tireur qui va décocher sa flèche. Les
auteurs de cette miniature ont choisi de situer ces semailles auprès d'une forteresse dont,
fossés, murailles et château forment l'arrière plan de la composition : on y a d'ailleurs
reconnu l'ancien Louvre de Paris (ill. 18).
La même scène, dans le Æréwmrc, reprend tous les éléments des 7AA en
les adaptant. Si la composition générale reste la même, nous relevons une notable diffé-
rence car, cette fois, il n'y a pas d'épouvantail-archer mais un archer bien réel qui se
dissimule derrière un attelage en train de tirer une herse et se prépare à décocher un maquet
sur des oiseaux picorant le grain fraîchement semé (ill. 19).
Le contexte des deux œuvres nous permet-il d'avancer une explication sur ce point qui
ne saurait être fortuit ? Les 7r<A /?zc/?c.s /VcMr&y ont été composées pour un prince de France
et, bien qu'issues d'un atelier franco-flamand, leur conception doit être pensée par rapport
au milieu curial auquel le manuscrit était destiné : les paysans qui hersent et sèment sont
aux abords immédiats d'un château royal, l'époque est d'ailleurs celle où apparaissent les
premiers décrets royaux de limitation des droits de chasse.
Le ßrcv/mrc Grmmm est aussi issu du milieu artistique franco-flamand, mais le con-
texte en est bien différent ; ce n'est plus un château royal qui limite l'arrière-plan mais une
« bonne ville » avec son banc de changeur devant la grand'porte, ses bourgeois, ses nauto-
niers et même son gros-horloge ! D'évidence, nous sommes dans ces Flandres de l'ex-
trême fin du XV^ siècle où les libertés communales commencent à prévaloir.
Il n'en va pas de même pour l'hallali du sanglier du mois de décembre, mais là où
l'enluminure des frères de Limbourg nous montre une chasse royale dans la forêt qui
entoure le château de Vincennes avec deux valets qui tentent de retenir leurs chiens et le
troisième qui corne (ill. 20), le Ærévmzrc, tout en reprenant la composition à l'identique,
y compris la place, la gestuelle et le rôle des trois valets, éclaircit le bois, fait figurer une
ville à l'arrière plan et introduit un cavalier ainsi que trois piétons qui arrivent, l'épieu haut
et accompagnés de chiens (ill. 21). Chasse seigneuriale où l'un des valets porte un surcot
mi-parti aux couleurs de son maître.
Si nous poursuivons notre recherche dans le calendrier du Æréwmrc G/f/rmm', nous
rencontrons d'autres images qui mettent en scène des chasseurs. D'abord, au folio 15
recto, un départ pour la chasse de toute une troupe d'élégants seigneurs, accompagnés
d'une dame ; l'un porte un gerfaut sur le poing, l'autre indique la direction, un valet veille
à ce que les chiens ne s'écartent pas. Tous portent dagues, épieux et cors.
Ensuite, au folio 12 recto, dans un encadrement décoratif du calendrier de juin, un
manant haut troussé, accompagné d'un chien de type griffon, se prépare à décocher un trait
d'arbalète sur un héron cendré qui pêche dans une rivière (ill. 22).
^ Venise, Biblioteca Nazionale Marciana, cod. !t. 1.99.
*"'Sa réalisation a commencé en 1480 pour s'achever avant 1520 ; le calendrier, de par son style, appartient à la fin du
XV^ siècle ; cf. Gian Lorenzo MELL1NI éd., ßrgw'an'o Gn'/TMw ; Rome, 1973,1, p. 81.
LUCIEN-JEAN BORD, JEAN-PtERRE MUGG
dans la plupart des ouvrages de ce type : les semailles d'octobre et l'hallali du sanglier en
décembre. H est intéressant de rechercher la manière dont ces deux scènes, qui se retrou-
vent dans le calendrier du Ærévmzrc Grmzcmzà l'extrême fin du Moyen Age^ siècle, ont
pu évoluer, pendant le quasi siècle qui sépare ces deux fastueux manuscrits.
La scène des semailles, en octobre, nous montre, sur l'enluminure des 7rà$
JVcMrc.y, un épouvantail fiché sur un pieu et contrefaisant un archer dans un champ fraîche-
ment ensemencé : il tient un arc dans le geste du tireur qui va décocher sa flèche. Les
auteurs de cette miniature ont choisi de situer ces semailles auprès d'une forteresse dont,
fossés, murailles et château forment l'arrière plan de la composition : on y a d'ailleurs
reconnu l'ancien Louvre de Paris (ill. 18).
La même scène, dans le Æréwmrc, reprend tous les éléments des 7AA en
les adaptant. Si la composition générale reste la même, nous relevons une notable diffé-
rence car, cette fois, il n'y a pas d'épouvantail-archer mais un archer bien réel qui se
dissimule derrière un attelage en train de tirer une herse et se prépare à décocher un maquet
sur des oiseaux picorant le grain fraîchement semé (ill. 19).
Le contexte des deux œuvres nous permet-il d'avancer une explication sur ce point qui
ne saurait être fortuit ? Les 7r<A /?zc/?c.s /VcMr&y ont été composées pour un prince de France
et, bien qu'issues d'un atelier franco-flamand, leur conception doit être pensée par rapport
au milieu curial auquel le manuscrit était destiné : les paysans qui hersent et sèment sont
aux abords immédiats d'un château royal, l'époque est d'ailleurs celle où apparaissent les
premiers décrets royaux de limitation des droits de chasse.
Le ßrcv/mrc Grmmm est aussi issu du milieu artistique franco-flamand, mais le con-
texte en est bien différent ; ce n'est plus un château royal qui limite l'arrière-plan mais une
« bonne ville » avec son banc de changeur devant la grand'porte, ses bourgeois, ses nauto-
niers et même son gros-horloge ! D'évidence, nous sommes dans ces Flandres de l'ex-
trême fin du XV^ siècle où les libertés communales commencent à prévaloir.
Il n'en va pas de même pour l'hallali du sanglier du mois de décembre, mais là où
l'enluminure des frères de Limbourg nous montre une chasse royale dans la forêt qui
entoure le château de Vincennes avec deux valets qui tentent de retenir leurs chiens et le
troisième qui corne (ill. 20), le Ærévmzrc, tout en reprenant la composition à l'identique,
y compris la place, la gestuelle et le rôle des trois valets, éclaircit le bois, fait figurer une
ville à l'arrière plan et introduit un cavalier ainsi que trois piétons qui arrivent, l'épieu haut
et accompagnés de chiens (ill. 21). Chasse seigneuriale où l'un des valets porte un surcot
mi-parti aux couleurs de son maître.
Si nous poursuivons notre recherche dans le calendrier du Æréwmrc G/f/rmm', nous
rencontrons d'autres images qui mettent en scène des chasseurs. D'abord, au folio 15
recto, un départ pour la chasse de toute une troupe d'élégants seigneurs, accompagnés
d'une dame ; l'un porte un gerfaut sur le poing, l'autre indique la direction, un valet veille
à ce que les chiens ne s'écartent pas. Tous portent dagues, épieux et cors.
Ensuite, au folio 12 recto, dans un encadrement décoratif du calendrier de juin, un
manant haut troussé, accompagné d'un chien de type griffon, se prépare à décocher un trait
d'arbalète sur un héron cendré qui pêche dans une rivière (ill. 22).
^ Venise, Biblioteca Nazionale Marciana, cod. !t. 1.99.
*"'Sa réalisation a commencé en 1480 pour s'achever avant 1520 ; le calendrier, de par son style, appartient à la fin du
XV^ siècle ; cf. Gian Lorenzo MELL1NI éd., ßrgw'an'o Gn'/TMw ; Rome, 1973,1, p. 81.