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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
se différencient nettement dans les carnations ; et les plis des draperies
étant profondément creusés, de façon à opposer des ombres intenses aux
saillies qui accrochent la lumière. Outre que l’ensemble en reçoit un sen-
timent de grandeur, la main de l’exécutant, qui s’accuse partout, lui
donne une vie et une franchise bien particulières et appropriées aux qua-
lités de la matière, qui devient molle et comme savonneuse à être trop
caressée.
Comme les imagiers en pierre, ceux en ivoire ne redoutaient pas les
œuvres compliquées, aux personnages nombreux, qui devaient réaliser
en cette matière précieuse ce que le xv" siècle a réalisé en bois pour dé-
corer les retables des autels. Les trois polyptyques de la collection, qui
enveloppent chacun une figure de la Vierge, en relief sous un motif .
d’architecture, de volets chargés de bas-reliefs relatifs à sa légende, sont
des exemples amoindris de ce que l’on a dû faire. Ainsi un groupe formé
de deux apôtres, d’un grand style, l’un debout et l’autre assis, qui sem-
blent converser entre eux, doit provenir de l’ensemble d’un Credo : cha-
cun, comme on sait, apportant son verset au symbole commun. Trois
autres groupes, deux du xme siècle, dans T un desquels on reconnaît le
renoncement de saint Pierre ; l’autre de la fin du xivfi, ce qui se recon-
naît au costume du soldat qui tient la corde dont les mains du Christ sont
liées, doivent également provenir de grandes figurations de la Passion ,
dans le genre de celle dont les douze triptyques que possède M. Spitzer
nous montrent les différentes scènes.
Parmi eux, nous en signalerons trois plus spécialement. Un grand,
dont les trois registres sont séparés par une arcature, qui retrace, avec
de nombreux personnages, le drame de la Passion, depuis le triomphe de
l’entrée à Jérusalem jusqu’à l’ignominie de la crucifixion; et deux autres,
des commencements du xve siècle, dont les deux feuillets représentent
l’un la légende de la Vierge et l’autre celle du Christ, dont les person-
nages, placés sous de très-fines architectures à jour, se détachent eux-
mêmes d’un fond ajouré : œuvres remarquables par la franchise de l’exé-
cution jointe à la finesse et à l’exiguïté des détails.
Uue fine marqueterie italienne, presque une mosaïque de bois, enve-
loppe l’un d’eux.
Les sujets de quatre des six triptyques que nous comptons 11e sortent
pas du cycle des sujets de l’Évangile ; mais il en est deux où l’imagier,
sortant de la routine, a fait figurer des scènes que l’on est moins habitué
à rencontrer, et qui appartiennent plus spécialement à la légende. Celui
que nous reproduisons représente évidemment sur sa partie centrale
« la légende de l’Assomption de la sainte Vierge », telle que Jacques de
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
se différencient nettement dans les carnations ; et les plis des draperies
étant profondément creusés, de façon à opposer des ombres intenses aux
saillies qui accrochent la lumière. Outre que l’ensemble en reçoit un sen-
timent de grandeur, la main de l’exécutant, qui s’accuse partout, lui
donne une vie et une franchise bien particulières et appropriées aux qua-
lités de la matière, qui devient molle et comme savonneuse à être trop
caressée.
Comme les imagiers en pierre, ceux en ivoire ne redoutaient pas les
œuvres compliquées, aux personnages nombreux, qui devaient réaliser
en cette matière précieuse ce que le xv" siècle a réalisé en bois pour dé-
corer les retables des autels. Les trois polyptyques de la collection, qui
enveloppent chacun une figure de la Vierge, en relief sous un motif .
d’architecture, de volets chargés de bas-reliefs relatifs à sa légende, sont
des exemples amoindris de ce que l’on a dû faire. Ainsi un groupe formé
de deux apôtres, d’un grand style, l’un debout et l’autre assis, qui sem-
blent converser entre eux, doit provenir de l’ensemble d’un Credo : cha-
cun, comme on sait, apportant son verset au symbole commun. Trois
autres groupes, deux du xme siècle, dans T un desquels on reconnaît le
renoncement de saint Pierre ; l’autre de la fin du xivfi, ce qui se recon-
naît au costume du soldat qui tient la corde dont les mains du Christ sont
liées, doivent également provenir de grandes figurations de la Passion ,
dans le genre de celle dont les douze triptyques que possède M. Spitzer
nous montrent les différentes scènes.
Parmi eux, nous en signalerons trois plus spécialement. Un grand,
dont les trois registres sont séparés par une arcature, qui retrace, avec
de nombreux personnages, le drame de la Passion, depuis le triomphe de
l’entrée à Jérusalem jusqu’à l’ignominie de la crucifixion; et deux autres,
des commencements du xve siècle, dont les deux feuillets représentent
l’un la légende de la Vierge et l’autre celle du Christ, dont les person-
nages, placés sous de très-fines architectures à jour, se détachent eux-
mêmes d’un fond ajouré : œuvres remarquables par la franchise de l’exé-
cution jointe à la finesse et à l’exiguïté des détails.
Uue fine marqueterie italienne, presque une mosaïque de bois, enve-
loppe l’un d’eux.
Les sujets de quatre des six triptyques que nous comptons 11e sortent
pas du cycle des sujets de l’Évangile ; mais il en est deux où l’imagier,
sortant de la routine, a fait figurer des scènes que l’on est moins habitué
à rencontrer, et qui appartiennent plus spécialement à la légende. Celui
que nous reproduisons représente évidemment sur sa partie centrale
« la légende de l’Assomption de la sainte Vierge », telle que Jacques de