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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 25.1882

DOI issue:
Nr. 5
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Yriarte, Charles: L' art en Portugal, [1]: exposition rétrospective de Lisbonne
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https://doi.org/10.11588/diglit.24257#0431

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L’ART EN PORTUGAL.

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et son pourvoyeur dans les Flandres, en Allemagne et en Hollande; les
hommes et les chefs-d’œuvre de ces pays abondent en Portugal : c’est
une nouvelle source d’influence, un courant nouveau qui va absorber
celui du génie national qui s’éveillait. Si vous ajoutez à cela, à sa date
chronologique, le fait cruel pour le Portugal de la domination de Phi-
lippe II d’Espagne, qui devient Philippe Ier de Portugal, et l’influence na
turelle que donne la domination d’un peuple pendant les « soixante ans
de captivité », comment s’étonner si l’Espagne, puissante déjà par ses
artistes, mais dont le génie s’est aussi modifié sous la domination de
l’empereur d’Allemagne, laisse à son tour ici sa trace? Si vous visitez Be-
lem, voyez le contraste entre la nef, les bas côtés et le chœur, où se lit en
lignes froides, glaciales, austères, tout le génie d’Herrera et de son
école. En vain, dans le détail, l’ouvrier ou l’artiste portugais voudra-t il
donner sa note personnelle, et dans l’emploi des matériaux du pays, dans
la décoration des azulejos, les dispositions architecturales dictées par les
conditions naturelles du sol, les nécessités résultant du climat et des
habitudes locales; retrouvera-t-on encore des formes et une couleur spé-
ciales au pays : le goût italien dominera dans l’architecture. Bientôt on
copiera Saint-Pierre de Rome, puis l’influence des jésuites se fera sentir
dans les églises et les constructions religieuses, et quelque temps encore
on connaîtra le délire du Rococo. Alcobaça, dans sa façade encore monu-
mentale, verra se heurter et se confondre trois styles différents, depuis le
gothique et la renaissance jusqu’au style des jésuites, si en honneur déjà
dans toutes les possessions portugaises d’outre-mer. On sent bien que je
résume des siècles en quelques lignes et que je néglige les lignes secon-
daires ; Mafra, cette revanche orgueilleuse de l’Escurial, avec ses huit
cent quatre-vingts salles et ses cinq mille baies, un des plus prodigieux
amoncellements de pierres qu’on ait vus dans le monde (1715), va
devenir un type d’architecture nationale : et c’est un Allemand de Ratis-
bonne d’origine italienne, Lodovisi, qui l’élève en combinant ensemble
la Renaissance italienne, Saint-Jean de Latran et la Santa-Casa de Loretto
avec notre architecture française et celle d’Herrera. Un sculpteur italien,
Giusti, pour dresser son peuple de statues, appelle à lui des artistes de
son pays ou assouplit à son goût la main des sculpteurs nationaux.

A partir de là, les maîtres de l’architecture française et italienne,
Mansard, Lenôtre, Louis, Gabriel, Juvara semblent avoir préoccupé les
architectes portugais ; ce qui reste intact, c’est l’architecture populaire,
la maison vulgaire des faubourgs et la villa. Après l’incommensurable
désastre de 1755, où la terre s’entr’ouvre pour la dixième fois depuis trois
siècles, quand ils vont relever la ville à l’appel du marquis de Pombal,
 
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