Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art (4. Pér. 1.1909)

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

kingham de Rubens ou une Chute de Phaéton de Rottenhammer. Par
la suite ne fit que se développer sa passion de collectionneur; et on
vit de plus en plus figurer son nom, comme acheteur, dans les grandes
ventes du xvme siècle : notamment celles de MM. de Grammont (1775),
Le Gros (1778), le Cte Du Barry (1778), de Vieuville (1781), le Mis de
Ménars (1782), Le Rœuf et de Montulé (1783). En 1785 — avant
d’entreprendre un voyage en Italie qui devait durer cinq ans, et où il
visite Milan, Venise, Florence, Naples, résidant à Rome surtout, — il
se décide pourtant, en pleine ardeur d’achats, sans que nous en sachions
trop la raison, à se séparer d’une collection réunie avec tant d’amour.
La vente faite alors1 nous permet dès ce moment d’entrevoir ses
goûts. Les écoles étrangères y sont en minorité, comptant une demi-
douzaine d’Italiens secondaires seulement et un lot, d’ailleurs choisi,
d’une trentaine de Flamands etde Hollandais, pour lesquels il semble
avoir partagé l’engouement de l’époque. Le fameux Buckingham de
Rubens y figurait, à côté d’exemplaires excellents de van Goyen,
AVynants, Jacob Ruisdael, A. van de Velde, van Romeyn, Berghem,
Wouwerman, etc. Mais c’est l’école française, et en particulier les
artistes contemporains, qui ont eu visiblement pour lui le plus vif
attrait et qui forment de beaucoup la majorité de la collection. Il s’y
montre nettement et franchement partisan de l’art moderne, sans
redouter d'aller aux débutants. C'est ainsi que, près de maîtres clas-
siques tels que Simon Vouet, Le Sueur ou Poussin, il a accueilli non
seulement des réputations récemment établies comme celles de
Watteau (VIndiffèrent et La Finette, de la vente du Mis de Ménars),
Natoire, Boucher, Lagrenée aîné, Joseph Vernet, Hubert Robert,
Greuze (célèbre Portrait de la signora de Amicis) ou Fragonard, mais
encore encouragé et soutenu l’effort des plus jeunes, Debucourt,
Demarne, Régnault, Danloux, Schall et bien d’autres. Taunay, dans
ce dernier groupe, paraît avoir été entre tous préféré. II n’en possé-
dait pas moins de quinze peintures, sans compter les gouaches, dont
la plupart (notamment la Foire et la Noce de village, gravées par
Descourtis) sont parmi ses chefs-d’œuvre. Le même esprit, surtout
orienté vers les modernes, se manifeste aussi dans l’abondant
choix des dessins ou aquarelles par Boucher, Leprince, Greuze, Fra-

1. Catalogue de tableaux italiens, flamands, hollandais et français, dessins,
estampes, gouaches, aquarelles, miniatures, émaux, figures en marbre, en terre cuite
et en plâtre, etc., etc., provenant du Cabinet de M. Godefroy. Par J.-B.-P. Lebrun.
Paris, 15 novembre 1785, in-8°, 78 p.