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LA CARICATURE.
Charges.
héroïsme en robe de chambre.
L’Autocrate sonnant : — Esclave, apporte-moi Diebitsch.
— Sire, j’ignore où est le maréchal.
L’Autocrate ressonnant, un second valet arrive: —• Esclave, la
schlag à ce butor et apporte moi Diebitsch.
Le Maréchal : — Sire, Sabalkanski attend les ordres de Votre
Majesté.
L’Autocrate : —Eh bien, Diebitsch Sabalkanski, (puisque tu as
deux si beaux noms pour toi tout seul) j’ai besoin de toi.
Le Maréchal : — Parlez, Sire.
L’Autocrate : — Je vais parler aussi, mais toi tu vas te taire. —
J’ai conçu un vaste projet pour la réussite duquel j’ai déjà toute la
fermeté de vouloir qui distingue les Czars, et de plus l’assurance de
la protection du Très-Haut : il ne me manque plus maintenant que
l’appui de ton bras.
.... Eh bien , qu’en dit ton bras ?
Le Maréchal : — Mon bras dit oui, Sire.
L’Autocrate : — Bien. — Pour éviter de faire long-temps encore
une pension royale à notre Cousin Charles X, j’ai décidé dans ma
sagesse que je le replacerais sur son trône, après quoi, bien entendu,
nous nous inscrirons comme créanciers sur sa liste civile. En consé-
quence , puisque tu touches annuellement trois cent mille roubles
pour l’entretien de la gloire de notre règne, c’est toi que je charge de
mener à bien cette héroïque entreprise.
Le Maréchal : ■— Sire, vous me voyez tout prêt à vous obéir en
tous points. Mais je me permettrai de faire observer à Votre Majesté
que la Pologne est en pleine révolte.
L’Autocrate : — Ah ! c’est juste ! J’oubliais de te tracer l’itinéraire
à suivre. En passant, tu anéantiras les Polonais, jusqu’au dernier;
158 -
de là te rendras à Holy-Rood pour prendre la famille cosmopolite
dans un fourgon; ensuite, tu iras aux Tuileries, au coin du Pont-
Royal, asseoir sur le trône des Français leur monarque chéri, et puis
là, tu attendras mes ordres.
Le Maréchal : —Comment! Sire, est-ce que vous n’entrerez pas
dans Paris à la tête de votre armée ?
L’Autocrate : — Non, Diebitsch. Je crains trop les rhumes de cer-
veaux et les conspirations pour m’exposer de la sorte. Tu sais que
c’est ce qui a compromis la santé de notre auguste frère Alexandre :
il en est mort.
Le Maréchal : — Vive l’Empereur Nicolas !
L’Autocrate : — Encore bien dit. — Ainsi donc, Diebitsch, à toi
la peine, à nous la gloire. Tiens, voilà cent mille roubles pour te
donner du cœur : tu trouveras autant de Russes dans ma cour. Fais-
en tuer le moins possible ; cependant, ne va pas t’en faire faute, il y
en a encore. Bonne campagne, que le Très-Haut te bénisse et nous
aussi.
C’est à la suite de ces héroïques instructions que le maréchal Die-
bitsch fit, comme un bon et modeste Russe, la réponse suivante que
nous garantissons pour historique.
« Vous voulez, Sire, que je remette mes bottes de conquérant, eh
» bien, je vous promets de ne les quitter que sur la place du Car-
» rousel, pour les faire décrotter par les Parisiens ! »
Eugène Morisseau.
*9 #<>*«*•«>•♦• ••♦«««©H
PRIX D’ABONNEMENT
La Caricature donne, par an, CENT QUATRE Lithographies exécutées par les Artistes les plus renommes. Chaque numéro, composé d’une feuille de texte et de
deux Lithographies, paraît très-exactement le jeudi.
L’Administration ne met pas dans le commerce les Lithographies du Journal. Les Marchands ne pourront les obtenir qu’en s’abonnant.
roUR TROIS MOIS} franc de port.13 fr.
POUR SIX MOIS, idem. .26
POUR UN an, idem..52
1 FRANC DE PLUS PAR TRIMESTRE POUR L'ÉTRANGER.
On souscrit, en envoyant franco un bon sur la poste ou sur une maison de Paris, à M. Auuert.
©n Souscrit :
A PARIS, AU GRAND MAGASIN DE CARICATURES D’AUBERT, GALERIE VÉRO-DODAT.
A LYON, Chez Baron, Libraire, rue Clermont.
A LONDRES, Chez Delaporte, Burlington arcade Piccadilly, corner of Burlington garden.
A STRASBOURG, Chez Alexandre , dépositaire des journaux.
A BRUXELLES, Chez Dero Becker, Montagne de la Cour, n° iq.
A GENEVE, Chez Barbezat et Compagnie, Libraires.
Nota. Les personnes qui recevraient des exemplaires froissés peuvent s’entendre avec un Libraire dont les communications avec Paris soient fréquentes, lequel les leur
ferait parvenir intacts. Au reste, l’action d’une presse à papier fait disparaître les plis. Il faut avoir soin d’exposer préalablement la feuille à l’humidité.
Le Gérant, Ch. PIIILIPON.
IMPRIMERIE DE CH. DEZAUCHE, RUE DU FAUBOURG-MONTMARTRE, N° 11.
LA CARICATURE.
Charges.
héroïsme en robe de chambre.
L’Autocrate sonnant : — Esclave, apporte-moi Diebitsch.
— Sire, j’ignore où est le maréchal.
L’Autocrate ressonnant, un second valet arrive: —• Esclave, la
schlag à ce butor et apporte moi Diebitsch.
Le Maréchal : — Sire, Sabalkanski attend les ordres de Votre
Majesté.
L’Autocrate : —Eh bien, Diebitsch Sabalkanski, (puisque tu as
deux si beaux noms pour toi tout seul) j’ai besoin de toi.
Le Maréchal : — Parlez, Sire.
L’Autocrate : — Je vais parler aussi, mais toi tu vas te taire. —
J’ai conçu un vaste projet pour la réussite duquel j’ai déjà toute la
fermeté de vouloir qui distingue les Czars, et de plus l’assurance de
la protection du Très-Haut : il ne me manque plus maintenant que
l’appui de ton bras.
.... Eh bien , qu’en dit ton bras ?
Le Maréchal : — Mon bras dit oui, Sire.
L’Autocrate : — Bien. — Pour éviter de faire long-temps encore
une pension royale à notre Cousin Charles X, j’ai décidé dans ma
sagesse que je le replacerais sur son trône, après quoi, bien entendu,
nous nous inscrirons comme créanciers sur sa liste civile. En consé-
quence , puisque tu touches annuellement trois cent mille roubles
pour l’entretien de la gloire de notre règne, c’est toi que je charge de
mener à bien cette héroïque entreprise.
Le Maréchal : ■— Sire, vous me voyez tout prêt à vous obéir en
tous points. Mais je me permettrai de faire observer à Votre Majesté
que la Pologne est en pleine révolte.
L’Autocrate : — Ah ! c’est juste ! J’oubliais de te tracer l’itinéraire
à suivre. En passant, tu anéantiras les Polonais, jusqu’au dernier;
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de là te rendras à Holy-Rood pour prendre la famille cosmopolite
dans un fourgon; ensuite, tu iras aux Tuileries, au coin du Pont-
Royal, asseoir sur le trône des Français leur monarque chéri, et puis
là, tu attendras mes ordres.
Le Maréchal : —Comment! Sire, est-ce que vous n’entrerez pas
dans Paris à la tête de votre armée ?
L’Autocrate : — Non, Diebitsch. Je crains trop les rhumes de cer-
veaux et les conspirations pour m’exposer de la sorte. Tu sais que
c’est ce qui a compromis la santé de notre auguste frère Alexandre :
il en est mort.
Le Maréchal : — Vive l’Empereur Nicolas !
L’Autocrate : — Encore bien dit. — Ainsi donc, Diebitsch, à toi
la peine, à nous la gloire. Tiens, voilà cent mille roubles pour te
donner du cœur : tu trouveras autant de Russes dans ma cour. Fais-
en tuer le moins possible ; cependant, ne va pas t’en faire faute, il y
en a encore. Bonne campagne, que le Très-Haut te bénisse et nous
aussi.
C’est à la suite de ces héroïques instructions que le maréchal Die-
bitsch fit, comme un bon et modeste Russe, la réponse suivante que
nous garantissons pour historique.
« Vous voulez, Sire, que je remette mes bottes de conquérant, eh
» bien, je vous promets de ne les quitter que sur la place du Car-
» rousel, pour les faire décrotter par les Parisiens ! »
Eugène Morisseau.
*9 #<>*«*•«>•♦• ••♦«««©H
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La Caricature donne, par an, CENT QUATRE Lithographies exécutées par les Artistes les plus renommes. Chaque numéro, composé d’une feuille de texte et de
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A GENEVE, Chez Barbezat et Compagnie, Libraires.
Nota. Les personnes qui recevraient des exemplaires froissés peuvent s’entendre avec un Libraire dont les communications avec Paris soient fréquentes, lequel les leur
ferait parvenir intacts. Au reste, l’action d’une presse à papier fait disparaître les plis. Il faut avoir soin d’exposer préalablement la feuille à l’humidité.
Le Gérant, Ch. PIIILIPON.
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