o Numéro 27. •—
Tout ce qui concerne la rédaction doit être adresse, franco,
à M. A. Audibert, Re'dacteur en chef de la Caricature,
rue Bergère, n. ig.
VflUJ
dodat^
- r -.l
CASTIGAT RIDENDO MORES.
-— 5 MAI 1851. —■-
Les réclamations et envois d’argent doivent être adressés,
franco, au grand Magasin de Caricatures d’Aubert,
galerie Yéro-Dodat.
MORALE, RELIGIEUSE, LITTERAIRE ET SCENIQUE.
Caricaturer.
RÉJOUISSANCES PUBLIQUES.
Lettre d’un Patriote du Faubourg Saint-Marceau, à un autre
Patriote détenu à la Conciergerie.
Dieu! mon cher, j’m’ai-ti réjoui, et la fête d’un monarque, qui qui
soit, pourvu qui régale, ça vous r’met i un cœur à neuf!... Le seul
chagrin qui ait troublé ma joie, c’était de t’savoir en prison par le
beau temps qui faisait, pendant que moi j’étais aux Champs-Elysées;
mais c’est tout d’même. J’voulais t’aller raconter mon enthousiasme ,
et j’te l’écris, parce que j’ai un œil poché et que je suis au violon.
Mais c’est encore tout d’même.
Imagine-toi d’abord qne je m’étais entendu avec des malins, abon-
nés aux réjouissances politiques, la raison pourquoi j’m’ai tant réjoui.
Dès l’matin du samedi, nous étions à la tête de la queue à l’Opéra.
Là , nous avons attendu quelque temps, c’est-à-dire depuis sept heures
moins un quart jusqu’à midi et demi ; mais il faut bien un peu de
patience pour tempérer l'irruption du plaisir. D’ailleurs , quand on
est avec des personnes aimables, on n’y regarde pas, et ces six heures
trois quarts-là, ça m’aurait paru court, si c’étaient pas mes jambes
qu’étaient lasses. Postérieurement à nous , il y avait des particulières
pas mal comme il faut, et quand on est pas des bêtes, la conversa-
tion, c’est la fille de la société. Aussi, avons-nous jasé..., soigné. Il
disaient, entr’autres, que les pièces qu’on verrait, Cendrillon et le
Comte Ory, c’étaient deux vieilleries ; les mêmes que du temps de
Chariot. Qui y en avait deux neuves : Cascarillo et Guillaume Tell ,
qu’est deux fameux gaillards (je ne les connais pas ) ; mais qu’on ne
les exhibait pas à la nation, parce que ces deux-là, c’est des far-
ceurs qu’aiment pas le Roi. Dis-moi donc en réponse si tu les aurais
fréquentés.
Enfin on finit par ouvrir les obstacles, et moi, j’prends mon vol.
En courant, j’perds ma société, j’marche sur un homme qu’est tombé
d’vantmoi, et j’grimpc rapidement les escaliers. J’saute vivement sur
les banquettes pour gagner la première, mais dans ma course, je
n’peux pas me retenir et la balustrade ne me venant qu’aux ge-
noux.... crac.... j’fais l’ascension involontaire et tombe au parquet
sur deux particuliers qui s’rossaient. Dans l’premier mouvement de
réciprocité, l’un m’flanque un fameux coup d’poing qui compromet
l’équilibre de mon œil, et lui... c’était l’ami Bifflard.—•Comment,
c’est toi, Bifflard? que j’lui dis. — Oui, mais d’où donc qu’tu viens de
c’train-là? qui m’répond. —Dame! j’ai roulé.... — Fallait donc au
moins crier gare! T’as échigné mon castor... —• Et toi mon luminaire.
C’est qu’c’est joliment douloureux, va, un coup poing de l’amitié !
Comme nous venions d’nous asseoir, v’ià-t-il pas qu’jentends dire à
mon oreille : C’est hideux à voir, cette canaille ! Je r’garde... et j’vois
deux freluquets qui s’pavanaient tout seuls dans une baignoire, tandis
que moi, peuple, j’navais pas d’place ; car j’te dirai en proscriptum
que la moitié de la salle était remplie par traîtrise avant l’ouverture.
Les freluquets avaient dit canaille, j’iavais redit à des lurons; d’ail-
leurs nous n’avions pas d’place, et nous avons assiégé la loge à la courte
échelle. J’ai encore reçu là un coup de badine au travers du physique,
mais ils ont quitté leurs quatre chaises dorées, et nous les avons occu-
pées à dix-huit. Allez donc!....
Pour le spectacle, oh! il était chouette, celui-là :je n’peux pas
t’I’expliquer, mon ancien, attendu que j’n’y ai rien compris; l’or-
chestre parlait toujours. Tout ce que j’peux te dire, c’est qu’auprès
d’iui, l’Ambiguet Madame Saqui sont joliment rococos. On peut avouer
ça sans se compromettre.
Le soir, nous avons été avec Bifflard à la sérénade légale des Tuile-
leries, qui, cette année, sont au Palais-Royal. C’était encore soigné
là. — C’est dommage qui jouent toujours la même chose. A la Saint-
Louis, à la Saint-Charles, à la Saint-Philippe, à la présentation du
bœuf gras et à toute allégresse quelconque; toujours : Où peut-on être
mieux qu’au sein de sa famille? C’est égal, ça aurait été joliment
tourne tout d’même, si Pataud, que Bifflard avait absolument voulu
emmener, n’avait pas gueulé tout l’temps, sous prétexte qu’on lui
marchait sur les pattes. Nous l’avons fait tenir tout d’bout, pour qu’il
occupe moins de place, ça fait qu au moins, comme ça, ce pauvre
animal, on ne lui écrasait qu’deux pattes à la fois. Ylà mon samedi.
Tout ce qui concerne la rédaction doit être adresse, franco,
à M. A. Audibert, Re'dacteur en chef de la Caricature,
rue Bergère, n. ig.
VflUJ
dodat^
- r -.l
CASTIGAT RIDENDO MORES.
-— 5 MAI 1851. —■-
Les réclamations et envois d’argent doivent être adressés,
franco, au grand Magasin de Caricatures d’Aubert,
galerie Yéro-Dodat.
MORALE, RELIGIEUSE, LITTERAIRE ET SCENIQUE.
Caricaturer.
RÉJOUISSANCES PUBLIQUES.
Lettre d’un Patriote du Faubourg Saint-Marceau, à un autre
Patriote détenu à la Conciergerie.
Dieu! mon cher, j’m’ai-ti réjoui, et la fête d’un monarque, qui qui
soit, pourvu qui régale, ça vous r’met i un cœur à neuf!... Le seul
chagrin qui ait troublé ma joie, c’était de t’savoir en prison par le
beau temps qui faisait, pendant que moi j’étais aux Champs-Elysées;
mais c’est tout d’même. J’voulais t’aller raconter mon enthousiasme ,
et j’te l’écris, parce que j’ai un œil poché et que je suis au violon.
Mais c’est encore tout d’même.
Imagine-toi d’abord qne je m’étais entendu avec des malins, abon-
nés aux réjouissances politiques, la raison pourquoi j’m’ai tant réjoui.
Dès l’matin du samedi, nous étions à la tête de la queue à l’Opéra.
Là , nous avons attendu quelque temps, c’est-à-dire depuis sept heures
moins un quart jusqu’à midi et demi ; mais il faut bien un peu de
patience pour tempérer l'irruption du plaisir. D’ailleurs , quand on
est avec des personnes aimables, on n’y regarde pas, et ces six heures
trois quarts-là, ça m’aurait paru court, si c’étaient pas mes jambes
qu’étaient lasses. Postérieurement à nous , il y avait des particulières
pas mal comme il faut, et quand on est pas des bêtes, la conversa-
tion, c’est la fille de la société. Aussi, avons-nous jasé..., soigné. Il
disaient, entr’autres, que les pièces qu’on verrait, Cendrillon et le
Comte Ory, c’étaient deux vieilleries ; les mêmes que du temps de
Chariot. Qui y en avait deux neuves : Cascarillo et Guillaume Tell ,
qu’est deux fameux gaillards (je ne les connais pas ) ; mais qu’on ne
les exhibait pas à la nation, parce que ces deux-là, c’est des far-
ceurs qu’aiment pas le Roi. Dis-moi donc en réponse si tu les aurais
fréquentés.
Enfin on finit par ouvrir les obstacles, et moi, j’prends mon vol.
En courant, j’perds ma société, j’marche sur un homme qu’est tombé
d’vantmoi, et j’grimpc rapidement les escaliers. J’saute vivement sur
les banquettes pour gagner la première, mais dans ma course, je
n’peux pas me retenir et la balustrade ne me venant qu’aux ge-
noux.... crac.... j’fais l’ascension involontaire et tombe au parquet
sur deux particuliers qui s’rossaient. Dans l’premier mouvement de
réciprocité, l’un m’flanque un fameux coup d’poing qui compromet
l’équilibre de mon œil, et lui... c’était l’ami Bifflard.—•Comment,
c’est toi, Bifflard? que j’lui dis. — Oui, mais d’où donc qu’tu viens de
c’train-là? qui m’répond. —Dame! j’ai roulé.... — Fallait donc au
moins crier gare! T’as échigné mon castor... —• Et toi mon luminaire.
C’est qu’c’est joliment douloureux, va, un coup poing de l’amitié !
Comme nous venions d’nous asseoir, v’ià-t-il pas qu’jentends dire à
mon oreille : C’est hideux à voir, cette canaille ! Je r’garde... et j’vois
deux freluquets qui s’pavanaient tout seuls dans une baignoire, tandis
que moi, peuple, j’navais pas d’place ; car j’te dirai en proscriptum
que la moitié de la salle était remplie par traîtrise avant l’ouverture.
Les freluquets avaient dit canaille, j’iavais redit à des lurons; d’ail-
leurs nous n’avions pas d’place, et nous avons assiégé la loge à la courte
échelle. J’ai encore reçu là un coup de badine au travers du physique,
mais ils ont quitté leurs quatre chaises dorées, et nous les avons occu-
pées à dix-huit. Allez donc!....
Pour le spectacle, oh! il était chouette, celui-là :je n’peux pas
t’I’expliquer, mon ancien, attendu que j’n’y ai rien compris; l’or-
chestre parlait toujours. Tout ce que j’peux te dire, c’est qu’auprès
d’iui, l’Ambiguet Madame Saqui sont joliment rococos. On peut avouer
ça sans se compromettre.
Le soir, nous avons été avec Bifflard à la sérénade légale des Tuile-
leries, qui, cette année, sont au Palais-Royal. C’était encore soigné
là. — C’est dommage qui jouent toujours la même chose. A la Saint-
Louis, à la Saint-Charles, à la Saint-Philippe, à la présentation du
bœuf gras et à toute allégresse quelconque; toujours : Où peut-on être
mieux qu’au sein de sa famille? C’est égal, ça aurait été joliment
tourne tout d’même, si Pataud, que Bifflard avait absolument voulu
emmener, n’avait pas gueulé tout l’temps, sous prétexte qu’on lui
marchait sur les pattes. Nous l’avons fait tenir tout d’bout, pour qu’il
occupe moins de place, ça fait qu au moins, comme ça, ce pauvre
animal, on ne lui écrasait qu’deux pattes à la fois. Ylà mon samedi.
Werk/Gegenstand/Objekt
Titel
Titel/Objekt
Parquet Royal
Weitere Titel/Paralleltitel
Serientitel
La caricature: revue morale, judiciaire, littéraire, artistique, fashionable et scénique
Sachbegriff/Objekttyp
Inschrift/Wasserzeichen
Aufbewahrung/Standort
Aufbewahrungsort/Standort (GND)
Inv. Nr./Signatur
H 531-1 Folio RES
Objektbeschreibung
Maß-/Formatangaben
Auflage/Druckzustand
Werktitel/Werkverzeichnis
Herstellung/Entstehung
Künstler/Urheber/Hersteller (GND)
Entstehungsort (GND)
Auftrag
Publikation
Fund/Ausgrabung
Provenienz
Restaurierung
Sammlung Eingang
Ausstellung
Bearbeitung/Umgestaltung
Thema/Bildinhalt
Thema/Bildinhalt (GND)