LA CARICATURE.
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*4*
A M. PERSIL, PROCUREUR-GÉNÉRAL.
Mon doux Monsieur,
Depuis le procès des Bulles de Savon, je n’entends plus parler de
Ceux que vous deviez avoir l’obligeance de m’intenter au sujet de
l’emplâtre de ministère, de l’Oie municipale, du parquet royal et du
célèbre escamoteur..., Seraient-ils tombés dans l’eau? Seriez-vous
dégoûté des procès de caricatures et des caricatures de procès? Ce
serait dommage, mon doux Monsieur, car c’est bien amusant, et
vous nous avez bien fait rire l’autre fois. Si vous aviez vu ces pau-
vres habitués des Assises comme ils pleuraient, comme ils se tor-
daient, comme ils se roulaient par terre chaque fois que maître Blanc
parlait de vous, de vos conspirations et de nos caricatures.
Ayez donc la bonté de ne pas laisser tomber en eau de boudin vos
foudres réquisitoriales. Je ne pense pas que vous ayez peur des bêtises
que je pourrais vous lâcher dans ma défense, pour l’histoire de ne
pas laisser les vôtres sans répouses. Vous savez bien que tout ceci ne
fait rien aux affaires. J’aurai beau crier que vous êtes un ci, un ça;
que le gouvernement est un l’autre, vous n’en serez pas moins pro-
cureur-général à zjo,ooo fr. de gages, tant que ça pourra durer, le
Gouvernement ne sera pas forcé d’être meilleur, et je serai toujours
mis au carcan si le jury m’y condamne. Car vous savez bien qu’on ne
nous gracie pas, nous autres coquins !
Adieu, mon doux Monsieur, si vous avez la grippe, tenez vous bien,
car on dit qu’elle tue les tempéra mens bilieux.
Je suis, en vous attendant, votre, etc.
CïT-PlTILIPOÏI.
Avant-hier, un troupeau de moutons est entré dans le café Gaulois,
pour mettre le n° 3s de la Caricature en morceaux. Heureusement
les morceaux en sont bons. — Un blesse de juillet disait dans le mois
d’août ; «J’ai peut-être eu tort » : dans le mois de décembre : « j’ai fait
une folie » ,• aujourd’hui il répète souvent ; « on ne m’attrapera plus...»
H est bien temps, ma foi!!! —Le symbole de notre gouvernement
est une balance, dont le juste milieu est un lléau. — Vu les troubles
suscités par les Carlistes, dans la ville de Tarascon, le 2e de chasseurs
et le i5e de ligne , sont relégués â Alger. — M. Prudhomme vient d'ê-
tre nommé juge suppléant, au tribunal de première instance de
la Seine. — La grippe est en France. M. Casimir Périer a pris la
France en grippe. — Eh bien Monsieur, dit une dame au nouveau
député, vous avez donc triomphé? — Oui madame.—Oh! ce n’est
pas étonnant, tous les polissons ont voté pour vous.—Je vous demande
bien pardon, madame, vos deux fils ne m’ont pas donné leur voix.
M. Benazet, fermier des jeux , vient d’être nommé chevalier de la
Légion-d’Honneur. L’honneur roule. — Le ministère s’occupe de faire
ouvrir plusieurs routes dans la Vendée. Il n’a pas encore trouvé la
bonne pour rencontrer les Vendéens. — On dit du coiffeur deM. Sé-
basliani , qu’il frise le ridicule. —Un apothicaire, (M. Briant, rue
Saint-Denis, n. i 04 ), a pris au sérieux nos armoiries du juste milieu.
Son enseigne porte ; à la Chatte de 183o. — Sous la meilleure des ré-
publiques, les patriotes sont exposés. à de tristes mécomptes.
— En lisant dans les journaux, qu’un blessé dejuillet a été au carcan
le maire de la ville de Metz a rengainé son compliment. __ Pour
rendre hommage à la révolution , les habitons d'un village de l’Auver-
gne ont équipé la statue de Saint-Verny, patron des vignerons, en
Sergent-major de la garde nationale. —M. Casimir Périer a autorisé
M. Azaïs à ouvrir son cours sur la Vérité universelle, à la condition
spéciale qu’il ne serait pas question de la Charte de i83i. — La nuit
dernière, M. Persil a rêvé carcan. — Si les Parisiens sont bien sages ,
le Moniteur leur promet, pour le 29 juillet, de superbes réjouissances
funéraires. Peut-être l’enterrement de la Liberté. Qui sait?,.._Le-
vant la défense générale qu’il avait précédemment laite à ses sujets de
voyager en France, ïsicolas vient de rendre cette faculté à tous les
Russes attaqués du choléra. — Qui aurait cru qu’en s’exposant au feu
des Suisses , on s’exposait au carcan. —Le crime fait la honte, et non
pas l’échafaud. —• Le tribunal de Bordeaux a acquitté une baronne,
..ceusée d’avoir craché sur le drapeau tricolore. L’avocat a soutenu
cette thèse ingénieuse, que sa cliente n’avait point craché pendant
que le drapeau passait, mais que le drapeau avait passé pendant que la
baronne crachait. — Aujourd’hui, l’on entend par victime de juillet,
non ceux qui ont succombé dans les trois journées , mais ceux qui y
ont survécu. — M. Dupin a été fort affairé cette semaine , entre les
cordons de ses souliers , celui de son portier et ceux du dais de sa pa-
roisse, il ne savait où donner de la tete. —Le jour de la Fête-Dieu ,
un coup de fusil tiré par une fenêtre a blessé le duc de Modène , à
l’épaule. On ne sait pas encore si la balle était destinée au grand duc
ou à la procession , mais pour premier remède, 011 a opéré de nom-
breuses arrestations.— On n’appelle plus la place du palais de Justice,
que la place des Patriotes. — Le jour de l’exposition de Vénard Valen-
tin, des centaines d’exemplaires d’une seule caricature, remplaçaient
la variété des dessins qui encombrent d’ordinaire les vastes carreaux
du magasin d’Aubert. Cette caricature intitulée : récompense nationale,
représente un jeune patriote attaché au pilori des voleurs. —Le 29
mai, pour célébrer la fête de Saint-Eloi , leur patron, les ouvriers du
port de Toulon ont promené un drapeau blanc d’une
deur, dans le milieu duquel 011 lisait ce quatrin :
Le grand Saint-Éloi
Lui dit ô mon roi,
Votre Majesté'
Est mal conseillée.
Le Gérant, Ch. FHILIPON.
CONDITIONS D’ABONNEMENT :
La Caricature donne, par an, cent quatre lithographies exécute'es par les Ar-
tistes les plus renommes. Chaque numéro, compose d’une feuille de texte et de
deux Lithographies, paraît très-exactement le jeudi.
L’Administration ne met pas dans le commerce les Lithographies du Journal.
Les Marchands ne pourront les obtenir qu’en s’abonnant.
Rota.
Les personnes qui recevraient des exemplaires froissés peuvent, au moyen de
l’action d’une presse à papier, faire disparaître les plis. 11 faut avoir soin d’exposer
préalablement la feuille à l’humidité.
rOUR TROIS MOIS, franc de port. .....
POUR SIX MOIS, idem.
POUR UN AN, idem.
1 franc de plus par trimestre pour l'etranger.
(Du tfouscrit :
A Paris, en envoyant, franco, un bon sur la poste ou sur une maison île Paris, au grand
magasin de caricatures d'Aubert, passage Véro-Dodat — A Lyon, chez Baron, libraire,
rue Clermont. - A Londres, chez Delaporte, Bnriingtcn arcade Picead.lly, corner of
Burlington garden. — A Strasbourg, chez Alexandre, dépositaire des journaux. A
Bruxelles,’clieZ Dero Becker, Montagne de la Cour, n* «7. — A Genève, chez Barbezat
et Compagnie, libraires.
13 fr.
2 G
IMPRIMERIE DE Cil. DEZAUC1IE, RUE DU FAUBOURG-MONTMARTRE, N" H
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Mon doux Monsieur,
Depuis le procès des Bulles de Savon, je n’entends plus parler de
Ceux que vous deviez avoir l’obligeance de m’intenter au sujet de
l’emplâtre de ministère, de l’Oie municipale, du parquet royal et du
célèbre escamoteur..., Seraient-ils tombés dans l’eau? Seriez-vous
dégoûté des procès de caricatures et des caricatures de procès? Ce
serait dommage, mon doux Monsieur, car c’est bien amusant, et
vous nous avez bien fait rire l’autre fois. Si vous aviez vu ces pau-
vres habitués des Assises comme ils pleuraient, comme ils se tor-
daient, comme ils se roulaient par terre chaque fois que maître Blanc
parlait de vous, de vos conspirations et de nos caricatures.
Ayez donc la bonté de ne pas laisser tomber en eau de boudin vos
foudres réquisitoriales. Je ne pense pas que vous ayez peur des bêtises
que je pourrais vous lâcher dans ma défense, pour l’histoire de ne
pas laisser les vôtres sans répouses. Vous savez bien que tout ceci ne
fait rien aux affaires. J’aurai beau crier que vous êtes un ci, un ça;
que le gouvernement est un l’autre, vous n’en serez pas moins pro-
cureur-général à zjo,ooo fr. de gages, tant que ça pourra durer, le
Gouvernement ne sera pas forcé d’être meilleur, et je serai toujours
mis au carcan si le jury m’y condamne. Car vous savez bien qu’on ne
nous gracie pas, nous autres coquins !
Adieu, mon doux Monsieur, si vous avez la grippe, tenez vous bien,
car on dit qu’elle tue les tempéra mens bilieux.
Je suis, en vous attendant, votre, etc.
CïT-PlTILIPOÏI.
Avant-hier, un troupeau de moutons est entré dans le café Gaulois,
pour mettre le n° 3s de la Caricature en morceaux. Heureusement
les morceaux en sont bons. — Un blesse de juillet disait dans le mois
d’août ; «J’ai peut-être eu tort » : dans le mois de décembre : « j’ai fait
une folie » ,• aujourd’hui il répète souvent ; « on ne m’attrapera plus...»
H est bien temps, ma foi!!! —Le symbole de notre gouvernement
est une balance, dont le juste milieu est un lléau. — Vu les troubles
suscités par les Carlistes, dans la ville de Tarascon, le 2e de chasseurs
et le i5e de ligne , sont relégués â Alger. — M. Prudhomme vient d'ê-
tre nommé juge suppléant, au tribunal de première instance de
la Seine. — La grippe est en France. M. Casimir Périer a pris la
France en grippe. — Eh bien Monsieur, dit une dame au nouveau
député, vous avez donc triomphé? — Oui madame.—Oh! ce n’est
pas étonnant, tous les polissons ont voté pour vous.—Je vous demande
bien pardon, madame, vos deux fils ne m’ont pas donné leur voix.
M. Benazet, fermier des jeux , vient d’être nommé chevalier de la
Légion-d’Honneur. L’honneur roule. — Le ministère s’occupe de faire
ouvrir plusieurs routes dans la Vendée. Il n’a pas encore trouvé la
bonne pour rencontrer les Vendéens. — On dit du coiffeur deM. Sé-
basliani , qu’il frise le ridicule. —Un apothicaire, (M. Briant, rue
Saint-Denis, n. i 04 ), a pris au sérieux nos armoiries du juste milieu.
Son enseigne porte ; à la Chatte de 183o. — Sous la meilleure des ré-
publiques, les patriotes sont exposés. à de tristes mécomptes.
— En lisant dans les journaux, qu’un blessé dejuillet a été au carcan
le maire de la ville de Metz a rengainé son compliment. __ Pour
rendre hommage à la révolution , les habitons d'un village de l’Auver-
gne ont équipé la statue de Saint-Verny, patron des vignerons, en
Sergent-major de la garde nationale. —M. Casimir Périer a autorisé
M. Azaïs à ouvrir son cours sur la Vérité universelle, à la condition
spéciale qu’il ne serait pas question de la Charte de i83i. — La nuit
dernière, M. Persil a rêvé carcan. — Si les Parisiens sont bien sages ,
le Moniteur leur promet, pour le 29 juillet, de superbes réjouissances
funéraires. Peut-être l’enterrement de la Liberté. Qui sait?,.._Le-
vant la défense générale qu’il avait précédemment laite à ses sujets de
voyager en France, ïsicolas vient de rendre cette faculté à tous les
Russes attaqués du choléra. — Qui aurait cru qu’en s’exposant au feu
des Suisses , on s’exposait au carcan. —Le crime fait la honte, et non
pas l’échafaud. —• Le tribunal de Bordeaux a acquitté une baronne,
..ceusée d’avoir craché sur le drapeau tricolore. L’avocat a soutenu
cette thèse ingénieuse, que sa cliente n’avait point craché pendant
que le drapeau passait, mais que le drapeau avait passé pendant que la
baronne crachait. — Aujourd’hui, l’on entend par victime de juillet,
non ceux qui ont succombé dans les trois journées , mais ceux qui y
ont survécu. — M. Dupin a été fort affairé cette semaine , entre les
cordons de ses souliers , celui de son portier et ceux du dais de sa pa-
roisse, il ne savait où donner de la tete. —Le jour de la Fête-Dieu ,
un coup de fusil tiré par une fenêtre a blessé le duc de Modène , à
l’épaule. On ne sait pas encore si la balle était destinée au grand duc
ou à la procession , mais pour premier remède, 011 a opéré de nom-
breuses arrestations.— On n’appelle plus la place du palais de Justice,
que la place des Patriotes. — Le jour de l’exposition de Vénard Valen-
tin, des centaines d’exemplaires d’une seule caricature, remplaçaient
la variété des dessins qui encombrent d’ordinaire les vastes carreaux
du magasin d’Aubert. Cette caricature intitulée : récompense nationale,
représente un jeune patriote attaché au pilori des voleurs. —Le 29
mai, pour célébrer la fête de Saint-Eloi , leur patron, les ouvriers du
port de Toulon ont promené un drapeau blanc d’une
deur, dans le milieu duquel 011 lisait ce quatrin :
Le grand Saint-Éloi
Lui dit ô mon roi,
Votre Majesté'
Est mal conseillée.
Le Gérant, Ch. FHILIPON.
CONDITIONS D’ABONNEMENT :
La Caricature donne, par an, cent quatre lithographies exécute'es par les Ar-
tistes les plus renommes. Chaque numéro, compose d’une feuille de texte et de
deux Lithographies, paraît très-exactement le jeudi.
L’Administration ne met pas dans le commerce les Lithographies du Journal.
Les Marchands ne pourront les obtenir qu’en s’abonnant.
Rota.
Les personnes qui recevraient des exemplaires froissés peuvent, au moyen de
l’action d’une presse à papier, faire disparaître les plis. 11 faut avoir soin d’exposer
préalablement la feuille à l’humidité.
rOUR TROIS MOIS, franc de port. .....
POUR SIX MOIS, idem.
POUR UN AN, idem.
1 franc de plus par trimestre pour l'etranger.
(Du tfouscrit :
A Paris, en envoyant, franco, un bon sur la poste ou sur une maison île Paris, au grand
magasin de caricatures d'Aubert, passage Véro-Dodat — A Lyon, chez Baron, libraire,
rue Clermont. - A Londres, chez Delaporte, Bnriingtcn arcade Picead.lly, corner of
Burlington garden. — A Strasbourg, chez Alexandre, dépositaire des journaux. A
Bruxelles,’clieZ Dero Becker, Montagne de la Cour, n* «7. — A Genève, chez Barbezat
et Compagnie, libraires.
13 fr.
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IMPRIMERIE DE Cil. DEZAUC1IE, RUE DU FAUBOURG-MONTMARTRE, N" H