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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 13.1876

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Mantz, Paul: Michel-Ange: peintre
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https://doi.org/10.11588/diglit.21843#0190

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MICHEL-ANGE, PEINTRE.

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retrouve dans les peintures de la Sixtine, dans les marbres que le maître
a menés jusqu’au bout. N’est-ce pas une raison de plus pour croire que
Michel-Ange, qui a tant profité des conquêtes de l’art antérieur, a étudié
de très-près les ouvrages de Léonard de Vinci? Ses partisans ne le
reconnaissaient pas sans doute. Ils voulaient, les enthousiastes, que
Michel-Ange eût tout inventé, même le modelé. Mais l’histoire est là
qui proteste, et les dessins du peintre, lorsqu’on les rapproche de ses
fresques, nous disent très-clairement de quel côté on doit chercher ses
origines. N’est-ce pas d’ailleurs une joie pour le biographe que de
pouvoir célébrer Michel-Ange sans enlever un seul rayon à l’auréole du
maître adorable, Léonard?

Avec la première pensée du David, avec la Vierge tenant Venfant
Jésus, nous sommes au Louvre : n’en sortons pas. Un dessin de la
collection nationale nous montre un renseignement sur le caractère du
grand artiste. Ce mélancolique n’ignorait pas la gaieté, ce furieux savait
sourire. Un élève assez inhabile lui apporte un jour une tête de femme
mollement dessinée à la sanguine. Sollicité de donner un peu d’accent à
ce fade profil, Michel-Ange prend une plume; il corrige, il se laisse
entraîner par un caprice doucement caricatural, et sur les linéaments
flottants de cette tête insignifiante, il superpose, d’un trait mâle,
l’étrange tête de satyre dont la Gazette a reproduit l’image. Mariette, à
qui cette robuste fantaisie a appartenu, en parle fort curieusement. « Je
trouve, écrit-il, que la manœuvre du dessin tient beaucoup de la manière
de Michel-Ange dans sa jeunesse. Il arrangeait alors ses tailles avec plus
de soin ; son dessin imitait davantage la gravure que lorsqu’il fut par-
venu à un âge plus mûr. »

Des trésors qui ne méritent pas un moindre respect sont conservés à
Florence dans le corridor qui réunit le palais Pitti aux Offices. Ces dessins
sont de premier ordre. Ils ont jadis été décrits par Léon Lagrange1 et
nous n’avons que quelques mots à ajouter à ses notes qu’il faudrait relire
si on les avait oubliées. Un des plus beaux parmi ces dessins restés
florentins, c’est la tête si magnifiquement effarée qu’on peut regarder
comme une représentation de la Frayeur. Les yeux s’agrandissent, les
cheveux se dressent sur le front, la bouche est ouverte et criante. Les
honnêtes académiciens du xvne siècle, qui enseignaient à leurs élèves
comment on doit s’y prendre pour figurer décemment l’effroi, auraient
pu se contenter de leur montrer le crayon de Michel-Ange : il a trouvé
avant eux la « tête d’expression ». Ajoutons que ce masque est comme

1. Gazelle des Beaux-Arts, ire péi iode, t. XII.
 
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