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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
façade à deux étages, qui est très richement ornée de colonnes corinthiennes, de
sculptures variées, de bas-reliefs et de statues. » Au dire de M. le duc de Luynes,
immédiatement au-dessus du fronton qui couronne l’étage inférieur, et au-dessous du
bandeau en relief qui supporte l’étage supérieur, on voit, sur une sorte de console
renversée, un groupe de style égyptien dégénéré, nommé symbole d’Isis, formé
d’un disque reposant sur deux cornes de vache unies par leur base et flanquées de
deux épis. Trois petits disques servent de support à l’ensemble de ce symbole,
accosté d’un rinceau divergent.
M. Palmer, au contraire, déclare qu’après un examen attentif il a reconnu une
lyre dans ce môme ornement, et que les neuf figures en bas-relief représentées à
l’étage supérieur, en tunique courte et avec des écharpes flottantes, ne sont pas des
Amazones, comme on l’a répété plus d’une fois, mais bien les neuf Muses. Aussi
incline-t-il à penser que ce monument, consacré au dieu de la musique et des diffé-
rents arts libéraux, était le Muséum de Pétra et l’établissement philharmonique de la
ville. Intérieurement, le Ivhazneh Faraoun renferme une grande salle et plusieurs
chambres moins considérables.
La librairie Plon vient aussi de publier un intéressant volume de M. F. Ribeyre
sur Cham, le caricaturiste. M. Alexandre Dumas y a ajouté une lettre-prérace qui, par
le fond comme par la forme, est un morceau des plus curieux.
IX. — Les Artistes français contemporains (peintres-sculpteurs), par Victor
Fournel. Librairie Alfred Marne; 1 vol. petit in-4°illustré de 10 eaux-fortes
et de 176 gravures dans le texte.
Dans ce volume, tout l’art contemporain est raconté, décrit, apprécié par un cri-
tique compétent, qui est en même temps un écrivain de valeur, un chroniqueur plein
d’esprit et de verve; son livre est éclairé par la biographie des hommes, animé par
les anecdotes, les comparaisons, les souvenirs qui peuvent donner à un pareil thème
un intérêt général et vivant; il reprodu t enfin les chefs-d’œuvre, de manière à parler
aux yeux en même temps qu’à l’esprit.
On retrouve là tous les artistes morts depuis 1850 : Ingres, Horace Vernet, Paul
Delaroche, Ary Scheffer, David d’Angers, Eugène Delacroix, H. Flandrin, Carpeaux,
Gustave Doré, Henri Régnault et trente autres. M. Victor Fournel ne s’est pas con-
tenté de consacrer des notices spéciales à Corot, à Théodore Rousseau, à Di; z, à
Millet, à Daubignv; il a encore groupe dans une étude générale sur les peintres de la
nature un grand nombre de paysagistes et d'animaliers, depuis Aligny et Paul Huet
jusqu’à Brascassat et Troyon. De même la peinture orientale, qui est une création
contemporaine et qui est devenue, on peut le dire, une branche spéciale de l’art, sur-
tout depuis Marilhat, a son chapitre à part, où Decamps et Fromentin occupent les
premières places. Enfin il n’a eu garde d’oublier la caricature ; un chapitre final passe
en revue, avec une grande abondance de vues ingénieuses et de détails piquants, les
Charlet, les Grandville, les Henri Monnier, les Gavarni, les Daumier et les Cham.
Dans l’introduction, M. Victor Fournel étudie les caractères essentiels et fonda-
mentaux de l’école fiançaiseà diverses époques, et les coups portés successivement
au vieil idéal classique'par le romantisme, le réalisme et l’impressionnisme. M. Victor
Fournel ne dissimule pas ses préférences pour les formes les plus pures et les plus
élevées de l’art; mais il a l’intelligence ouverte et généreuse, et il est tout prêt à
admettre les formules les plus diverses, sauf celles qui professent le mépris du goût
et du beau.
La manière de l’écrivain est pleine de mouvement, de couleur et de vie. S’il a des
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
façade à deux étages, qui est très richement ornée de colonnes corinthiennes, de
sculptures variées, de bas-reliefs et de statues. » Au dire de M. le duc de Luynes,
immédiatement au-dessus du fronton qui couronne l’étage inférieur, et au-dessous du
bandeau en relief qui supporte l’étage supérieur, on voit, sur une sorte de console
renversée, un groupe de style égyptien dégénéré, nommé symbole d’Isis, formé
d’un disque reposant sur deux cornes de vache unies par leur base et flanquées de
deux épis. Trois petits disques servent de support à l’ensemble de ce symbole,
accosté d’un rinceau divergent.
M. Palmer, au contraire, déclare qu’après un examen attentif il a reconnu une
lyre dans ce môme ornement, et que les neuf figures en bas-relief représentées à
l’étage supérieur, en tunique courte et avec des écharpes flottantes, ne sont pas des
Amazones, comme on l’a répété plus d’une fois, mais bien les neuf Muses. Aussi
incline-t-il à penser que ce monument, consacré au dieu de la musique et des diffé-
rents arts libéraux, était le Muséum de Pétra et l’établissement philharmonique de la
ville. Intérieurement, le Ivhazneh Faraoun renferme une grande salle et plusieurs
chambres moins considérables.
La librairie Plon vient aussi de publier un intéressant volume de M. F. Ribeyre
sur Cham, le caricaturiste. M. Alexandre Dumas y a ajouté une lettre-prérace qui, par
le fond comme par la forme, est un morceau des plus curieux.
IX. — Les Artistes français contemporains (peintres-sculpteurs), par Victor
Fournel. Librairie Alfred Marne; 1 vol. petit in-4°illustré de 10 eaux-fortes
et de 176 gravures dans le texte.
Dans ce volume, tout l’art contemporain est raconté, décrit, apprécié par un cri-
tique compétent, qui est en même temps un écrivain de valeur, un chroniqueur plein
d’esprit et de verve; son livre est éclairé par la biographie des hommes, animé par
les anecdotes, les comparaisons, les souvenirs qui peuvent donner à un pareil thème
un intérêt général et vivant; il reprodu t enfin les chefs-d’œuvre, de manière à parler
aux yeux en même temps qu’à l’esprit.
On retrouve là tous les artistes morts depuis 1850 : Ingres, Horace Vernet, Paul
Delaroche, Ary Scheffer, David d’Angers, Eugène Delacroix, H. Flandrin, Carpeaux,
Gustave Doré, Henri Régnault et trente autres. M. Victor Fournel ne s’est pas con-
tenté de consacrer des notices spéciales à Corot, à Théodore Rousseau, à Di; z, à
Millet, à Daubignv; il a encore groupe dans une étude générale sur les peintres de la
nature un grand nombre de paysagistes et d'animaliers, depuis Aligny et Paul Huet
jusqu’à Brascassat et Troyon. De même la peinture orientale, qui est une création
contemporaine et qui est devenue, on peut le dire, une branche spéciale de l’art, sur-
tout depuis Marilhat, a son chapitre à part, où Decamps et Fromentin occupent les
premières places. Enfin il n’a eu garde d’oublier la caricature ; un chapitre final passe
en revue, avec une grande abondance de vues ingénieuses et de détails piquants, les
Charlet, les Grandville, les Henri Monnier, les Gavarni, les Daumier et les Cham.
Dans l’introduction, M. Victor Fournel étudie les caractères essentiels et fonda-
mentaux de l’école fiançaiseà diverses époques, et les coups portés successivement
au vieil idéal classique'par le romantisme, le réalisme et l’impressionnisme. M. Victor
Fournel ne dissimule pas ses préférences pour les formes les plus pures et les plus
élevées de l’art; mais il a l’intelligence ouverte et généreuse, et il est tout prêt à
admettre les formules les plus diverses, sauf celles qui professent le mépris du goût
et du beau.
La manière de l’écrivain est pleine de mouvement, de couleur et de vie. S’il a des