Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art (2.Pér. 29.1884)

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

leries, en 1882, et celle des Portraits du siècle, l’an dernier, ont fait
valoir une autre face de son talent qui n’était peut-être pas appréciée, au
moins de la foule, comme elle doit l’être. L’éblouissante supériorité du
peintre décorateur empêchait de bien voir les autres parties de son
œuvre : le mérite transcendant de ses portraits, notamment, avait besoin
d’être mis en évidence. On sait quel a été leur succès aux deux exposi-
tions. L’analyse de ces ouvrages fut faite alors dans la Gazette1 avec
un soin et une compétence rares. Quand vint l’exposition des Portraits
du siècle, appelé à en rendre compte, je dus me borner à admirer :
M. Charles Ephrussi ne m’avait rien laissé à dire. Mais à défaut d’écri-
tures nouvelles, la revue voulut conserver un souvenir gravé d’une exhi-
bition qui avait frappé les plus indifférents et dont Paul Baudry était sorti
avec un titre nouveau, celui de premier portraitiste de son époque. Notre
collaborateur M. T. de Mare fut prié de graver le portrait de M. Edmond
About.

Ce portrait passe, avec raison, pour donner l’idée la plus complète de
la façon exquise, moderne et si personnelle, dont Baudry comprend l’image
de ses contemporains. La gravure de M. de Mare, exécutée avec une
finesse et une conscience que nos lecteurs apprécieront, a demandé du
temps; nous aurions pu la rattacher sans commentaires à notre étude qui
a paru dans la livraison du mois de juillet de l’an dernier, mais il nous
en a coûté de publier une planche remarquable sans adresser quelques
compliments à l’artiste qui l’a gravée pour nous.

Et puis eût-il été convenable de donner, sans la saluer au passage,
l’effigie d’un écrivain célèbre qui partage avec son peintre l’honneur de
porter haut à l’étranger le nom de la France, si éprouvée d’ailleurs?
M. Edmond About est notre maître à nous tous, journalistes, et la critique
d’art est fière de compter un écrivain de sa valeur. Personnellement nous
l’aimons et l’admirons comme une pure gloire française, éclatante et sans
alliage. La langue que parle M. About et la tournure de son esprit sont
d’admirables produits de notre terroir, tout imprégnés du suc gaulois
de Rabelais et de Voltaire; on n’v découvre aucune trace d’adultération,
aucun arrière-goût d’importation étrangère. L’homme, enfin, est français
comme ses idées, comme son style ; il est de ceux qui croient à leur pays
et qui l’aiment. Nous publions le portrait deM. Edmond About au moment
oû l’Académie vient de lui offrir un de ses quarante fauteuils, en le priant
de s’asseoir, comme chez lui, car la maison est bien sienne. Cet événement
donne à l’œuvre de Baudry et à la gravure de M. de Mare un mérite d’ac-

1. Voir Gazette des Beaux-Arts. 2e période, t. XXVf, p. 132.