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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 29.1884

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Nr. 4
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Michel, André: Exposition des dessins du siècle, 2
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https://doi.org/10.11588/diglit.24585#0331

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EXPOSITION DES DESSINS DU SIÈCLE.

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aux insurgés. Ce fut une lutte héroï-comique, souvent drolatique et
fantasque dans la forme, au fond très sérieuse et grosse de conséquences,
— un moment décisif de l’évolution de l’art. — Admirable époque dont
tous les combattants ont gardé au front le rayon et les reflets !

Aujourd’hui, vainqueurs et vaincus dorment en paix, réconciliés dans
la large et intelligente sympathie de la critique moderne, moins soucieuse
désormais de juger que de comprendre et de dogmatiser que d’expli-
quer. Comme cet évêque du xvme siècle, elle admet volontiers qu’il existe
autant d’orthodoxies que de cloxies particulières, et sans renoncer à toute
hiérarchie, elle abandonne du moins la stérile prétention de rendre, au
nom d’un idéal immuable et révélé, des arrêts dont le temps se moque et
d’enfermer la production artistique dans des formules mortes. Elle trouve
à s’intéresser devant toute œuvre sincère et son admiration ne demande
à aucune esthétique la permission de s’émouvoir. Bénissons les devan-
ciers qui nous ont acquis — au prix de quelles batailles ! — le droit
d’admirer Raphaël sans excommunier Rembrandt...

Géricault meurt deux ans après Prudhon, — en pleine jeunesse, — à
peine âgé de trente-quatre ans, emportant dans sa tombe le rêve des
œuvres grandioses qui remplissait son cœur vaillant. 11 en a assez fait
cependant pour rendre sa mémoire immortelle. Ce n’est pas dans l’atelier
de Guérin qu’il a appris ce dessin large et ressenti, ce respect passionné
de la nature vivante, cet amour des corps agissants. Il s’est formé lui-
même ; il s’attaque franchement à la réalité contemporaine, dont il goû-
tait avec une ardente sympathie les beautés et les drames; il prépare
une Traite des nègres • le récit d’un désastre maritime hante son imagi
nation et lui inspire une œuvre incomplète, mais qui, née d’un fait divers,
s’élève presque à l’épopée par la puissance de l'émotion et de la sympa-
thie. Il a largement ouvert les voies à l’art moderne, ramené la vie dans
l’école, complété ce que Gros avait indiqué, et mérité de prendre place
dans la série des peintres du siècle comme un précurseur et un maître.
Par rapport à David, cependant, ce n’est pas encore un révolté; mais
c’est un affranchi.

mm

Son libre et vigoureux dessin procède par grandes masses, — par
boules; — procédé curieusement étudié par Léonard de Vinci et dont
ses manuscrits offrent de nombreux exemples. Dans ses magnifiques
études de chevaux surtout, il l’emploie avec une ampleur magistrale. Sa
Course de chevaux libres, de la collection Charles Clément, est une
œuvre admirable, d’une grandeur d’allure et d’une intensité de vie in-
comparables. Le Nègre et la Négresse, de la même collection, le magni-
fique dessin au lavis d’un Cheval attaqué par un lion (collection Caïn),
 
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