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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 29.1884

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Nr. 4
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Nogent, Paul: Une collection d'orfèvrerie française
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https://doi.org/10.11588/diglit.24585#0361

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GAZETTE DES BEAUX-A BTS.

a ainsi son bulletin de bataille; et qui n’a pas entendu un amateur faire
le récit d’une de ses conquêtes vivra dans l’ignorance d’un des bonheurs
de l’homme. Mais il ne suffit pas d’avoir le goût qui pousse aux recher-
ches, il faut posséder du goût pour les diriger et aussi de la science et
de l’expérience pour les contrôler. Dans le cas présent, nous avons affaire
à un chasseur qui, non content d’étiqueter dans un cabinet et sous des
vitrines les produits plus ou moins rares de ses expéditions, a voulu
encore — et c’est là ce qui nous intéresse — reconstituer autant qu’il
était possible la zoologie de ce qu’il a rapporté dans son carnier.

Le goût de M. Eudel l’a plus spécialement attaché à la recherche de
cet art du xvne et du xvme siècle, si grand et si français. La Renaissance
avec ses adorables merveilles nous offre le spectacle d’une invasion venue
d’au delà des Alpes ; mais sous Louis XIV, sous la Régence et sous
Louis XV, quelle superbe revanche du génie national! C’est alors l’art
français qui, enjambant les Pyrénées et les Alpes, passant le Rhin et la
Manche, va imposer par delà nos frontières la domination et la suprématie
incontestée de ses œuvres sans rivales. La difficulté des communications
n’arrête pas les hommages de l’étranger : c’est à Paris, c’est aux Gobelins,
c’est aux galeries du Louvre que les cours de l’Europe viennent chercher
ces splendeurs décoratives qu’elles demanderaient en vain aux ateliers
indigènes. Dinglinger, qui triomphe là-bas pour ses prodigieuses minuties
ciselées, ne veut pas mourir sans être venu en France. L’initiative féconde
de Colbert ouvre le sillon qui fructifiera d’une sève non lassée jusqu’à la
veille même de la Révolution. L’art du xvii6 siècle, l’art du xvnr siècle
ne sont qu'un seul et même art, l’art français. Sans doute, dans le déve-
loppement de ses phases, de douces transitions le transforment assez
pour lui prêter la grâce de la variété. Mais c’est toujours, dans le trait
du dessin et dans le galbe des contours, la même distinction exquise
d’esprit, la même pureté de goût natif. L’orfèvrerie échappe, par une
retenue heureuse, à ce qu’il pourrait y avoir d’outré dans les caprices
fantaisistes de la coupe où se joue l’ameublement. Elle sait garder sa
dignité, quand, dans le meuble, le style Louis XV ne craint pas assez de
se compromettre dans les dévergondages de la ligne.

Le style Louis XIV ne fournit pas la partie la plus importante de la
collection dont nous parlons. Les pièces d’orfèvrerie de cette période —
les pièces authentiques s’entend — sont rares et peu nombreuses, sauf
les spécimens qu’en peuvent présenter les vitrines de nos Musées Na-
tionaux. On sait qu’en 1689 le Roi envoya à la fonte tous les chefs-
d’œuvre sortis du ciseau des Delaunay, des Bal]in, — « jusque même son
trône d’argent », nous dit Saint-Simon. Le creuset rendit trois millions sur
 
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