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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
qu’au musée de Dijon sa propre image, placée à côté d’un portrait
d’abbé par La Tour, n’est pas écrasée dans ce voisinage redou-
table.
On sait combien la Rosalba, pendant la Régence, redonna de
popularité au pastel, en rajeunissant, par son coloris idéal, l’art
suranné des maîtres crayonneurs des siècles précédents. A ce même
musée, au-dessous du portrait de Hoin, sont placés deux pastels de
cette artiste exquise : La Jeune fille à la colombe, aux chairs de ce
ton nacré qui lui est propre, et Le Printemps, brune à l’œil noir, à la
chaude carnation. Le catalogue nous apprend que ces deux ravis-
santes images ont été léguées à sa ville natale par Claude Hoin. Les
voilà donc, ces modèles que l’artiste avait sans cesse sous les yeux !
Ne nous étonnons plus de l’harmonieux aspect de ses ouvrages, en
pensant à la leçon permanente de grâce et de souplesse qu’il devait
y puiser.
Hoin, au début, serre la forme et son exécution n’a pas encore
la liberté qu’elle offrira plus tard ; mais comme il est vivant, par
exemple, dans son portrait à vingt-cinq ans, la narine dilatée, le
teint coloré, l’œil vainqueur, la perruque provocante ! Il respire la
belle humeur dans toute sa personne, s’est campé bien de face, et
de sa main a écrit : par lui-même 1775.
Dans la même maison où cette intéressante image figure comme
portrait de famille se trouvent deux pastels d’une exécution plus
veloutée, sinon plus ferme : le portrait d’un homme jeune, poudré,
de physionomie agréable et douce, costumé de soie noire, au jabot
de dentelle lestement traité ; en pendant, une jeune femme poudrée,
une fleur dans ses cheveux relevés, double collier de perles sur sa
poitrine décolletée, robe de soie bleue à rubans bleu et blanc d’un
arrangement charmant, de ceux qu’en ce temps-là on aurait appelés
« désespoir d’opale » ; peu joli, de physionomie triste et résignée,
le modèle reste néanmoins agréable.
La présence de ces deux portraits, le mari et la femme, chez
l’arrière-petite-nièce de l’artiste, certaines ressemblances que nous
avons constatées, nous font supposer que l’artiste a représenté là son
frère cadet, Louis-Rénigne Hoin, procureur au bailliage, et sa jeune
femme, dessinés par lui peut-être au moment de leur mariage. Le
portrait d'homme est signé : CB. Hoin, ptre du Roi, S 8brc 1782,
signature inexacte, due sans doute au grand désir qu’il avait de
se parer de ce titre flatteur qui amenait des commandes, et aussi
parce que les artistes de son entourage signaient souvent ainsi ;
GAZETTE DES BEAUX-ARTS
qu’au musée de Dijon sa propre image, placée à côté d’un portrait
d’abbé par La Tour, n’est pas écrasée dans ce voisinage redou-
table.
On sait combien la Rosalba, pendant la Régence, redonna de
popularité au pastel, en rajeunissant, par son coloris idéal, l’art
suranné des maîtres crayonneurs des siècles précédents. A ce même
musée, au-dessous du portrait de Hoin, sont placés deux pastels de
cette artiste exquise : La Jeune fille à la colombe, aux chairs de ce
ton nacré qui lui est propre, et Le Printemps, brune à l’œil noir, à la
chaude carnation. Le catalogue nous apprend que ces deux ravis-
santes images ont été léguées à sa ville natale par Claude Hoin. Les
voilà donc, ces modèles que l’artiste avait sans cesse sous les yeux !
Ne nous étonnons plus de l’harmonieux aspect de ses ouvrages, en
pensant à la leçon permanente de grâce et de souplesse qu’il devait
y puiser.
Hoin, au début, serre la forme et son exécution n’a pas encore
la liberté qu’elle offrira plus tard ; mais comme il est vivant, par
exemple, dans son portrait à vingt-cinq ans, la narine dilatée, le
teint coloré, l’œil vainqueur, la perruque provocante ! Il respire la
belle humeur dans toute sa personne, s’est campé bien de face, et
de sa main a écrit : par lui-même 1775.
Dans la même maison où cette intéressante image figure comme
portrait de famille se trouvent deux pastels d’une exécution plus
veloutée, sinon plus ferme : le portrait d’un homme jeune, poudré,
de physionomie agréable et douce, costumé de soie noire, au jabot
de dentelle lestement traité ; en pendant, une jeune femme poudrée,
une fleur dans ses cheveux relevés, double collier de perles sur sa
poitrine décolletée, robe de soie bleue à rubans bleu et blanc d’un
arrangement charmant, de ceux qu’en ce temps-là on aurait appelés
« désespoir d’opale » ; peu joli, de physionomie triste et résignée,
le modèle reste néanmoins agréable.
La présence de ces deux portraits, le mari et la femme, chez
l’arrière-petite-nièce de l’artiste, certaines ressemblances que nous
avons constatées, nous font supposer que l’artiste a représenté là son
frère cadet, Louis-Rénigne Hoin, procureur au bailliage, et sa jeune
femme, dessinés par lui peut-être au moment de leur mariage. Le
portrait d'homme est signé : CB. Hoin, ptre du Roi, S 8brc 1782,
signature inexacte, due sans doute au grand désir qu’il avait de
se parer de ce titre flatteur qui amenait des commandes, et aussi
parce que les artistes de son entourage signaient souvent ainsi ;