LA GRAVURE JAPONAISE
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Yesen, Gakouteï, plus ou moins influencés par lui ou ses élèves immé-
diats, comme Hokkeï, lsaï, Bokousen. Hokkeï et Gakouteï ont parti-
culièrement cultivé le genre des sourimonos.
Il est un trait de l’art japonais qui s’est révélé à toutes les épo-
ques, sous des formes diverses, dont nous ne pouvons pas ne pas
parler : c’est l’observation du comique, du côté humoristique, aboutis-
sant à la charge et à la caricature. En effet, l’art japonais a de tout
temps cultivé, pour une part, la caricature, et, poussant l'accentuation
dans ce genre à son extrême limite, il a produit des œuvres où le gro-
tesque, les grimaces et la désarticulation des formes se déchaînent
sans frein. L’histoire nous apprend qu’au xne siècle vivait un
peintre, Toba Sojo, qui a tellement excellé dans la caricature, qu’il
lui a donné son nom, qui ne s’est plus perdu et a servi à désigner les
productions du genre depuis lors. Le caractère humoristique allant
jusqu’à la caricature pointe sans cesse ou se donne cours dans les
livres du xvme siècle. Dans le premier tiers de ce siècle, il se mani-
feste surtout dans des albums d’artistes divers, Boumpo, Kiho, Soui-
Séki, Nankel, qui produisent à Kioto, et il domine chez certains
contemporains de Hokousaï, tels que Bokousen, et aussi chez l’artiste
qui, le dernier, aura maintenu la tradition de la vieille école japo-
naise, Kyosaï.
Il faut faire une mention spéciale des meishos, livres consacrés
à la description des provinces et des grandes villes. Les Japonais
les ont multipliés, et leur réunion complète formerait, à elle seule,
une petite bibliothèque. Ces livres descriptifs avaient été entrevus
dès le xviie siècle ; cependant, ils ne prennent leur caractère définitif
qu’à la fin du xvme siècle. Des artistes dessinateurs y ont introduit
des vues de la campagne, des temples et des lieux habités, sous une
forme topographique et avec une minutie rigide, qui donne à l’en-
semble un aspect de grande monotonie. xMais, sur ce fond assez
fastidieux, apparaissent, dans les principaux meishos, des scènes de
mœurs plus libres, plus variées et, dès lors, pour nous plus inté-
ressantes.
La vue d’ensemble que nous venons de jeter sur la gravure
japonaise nous a montré qu’elle s’est développée et a vécu du com-
mencement du xvne siècle au milieu du xixe siècle, époque où les
arts japonais s’éteignent sous l’action de la civilisation européenne,
qui pénètre le Japon pour le métamorphoser. Pendant les deux
cent cinquante ans qu’elle a duré, la gravure japonaise a connu une
succession de grands artistes qui ont su lui ouvrir des voies mul-
XXIII . — 3e PÉ R IO DE.
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Yesen, Gakouteï, plus ou moins influencés par lui ou ses élèves immé-
diats, comme Hokkeï, lsaï, Bokousen. Hokkeï et Gakouteï ont parti-
culièrement cultivé le genre des sourimonos.
Il est un trait de l’art japonais qui s’est révélé à toutes les épo-
ques, sous des formes diverses, dont nous ne pouvons pas ne pas
parler : c’est l’observation du comique, du côté humoristique, aboutis-
sant à la charge et à la caricature. En effet, l’art japonais a de tout
temps cultivé, pour une part, la caricature, et, poussant l'accentuation
dans ce genre à son extrême limite, il a produit des œuvres où le gro-
tesque, les grimaces et la désarticulation des formes se déchaînent
sans frein. L’histoire nous apprend qu’au xne siècle vivait un
peintre, Toba Sojo, qui a tellement excellé dans la caricature, qu’il
lui a donné son nom, qui ne s’est plus perdu et a servi à désigner les
productions du genre depuis lors. Le caractère humoristique allant
jusqu’à la caricature pointe sans cesse ou se donne cours dans les
livres du xvme siècle. Dans le premier tiers de ce siècle, il se mani-
feste surtout dans des albums d’artistes divers, Boumpo, Kiho, Soui-
Séki, Nankel, qui produisent à Kioto, et il domine chez certains
contemporains de Hokousaï, tels que Bokousen, et aussi chez l’artiste
qui, le dernier, aura maintenu la tradition de la vieille école japo-
naise, Kyosaï.
Il faut faire une mention spéciale des meishos, livres consacrés
à la description des provinces et des grandes villes. Les Japonais
les ont multipliés, et leur réunion complète formerait, à elle seule,
une petite bibliothèque. Ces livres descriptifs avaient été entrevus
dès le xviie siècle ; cependant, ils ne prennent leur caractère définitif
qu’à la fin du xvme siècle. Des artistes dessinateurs y ont introduit
des vues de la campagne, des temples et des lieux habités, sous une
forme topographique et avec une minutie rigide, qui donne à l’en-
semble un aspect de grande monotonie. xMais, sur ce fond assez
fastidieux, apparaissent, dans les principaux meishos, des scènes de
mœurs plus libres, plus variées et, dès lors, pour nous plus inté-
ressantes.
La vue d’ensemble que nous venons de jeter sur la gravure
japonaise nous a montré qu’elle s’est développée et a vécu du com-
mencement du xvne siècle au milieu du xixe siècle, époque où les
arts japonais s’éteignent sous l’action de la civilisation européenne,
qui pénètre le Japon pour le métamorphoser. Pendant les deux
cent cinquante ans qu’elle a duré, la gravure japonaise a connu une
succession de grands artistes qui ont su lui ouvrir des voies mul-
XXIII . — 3e PÉ R IO DE.
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