A TRAVERS LA SOUABE
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aux nimbes, il y a une quinzaine d’années, une nouvelle couche
d’or. Le coloris est vif plutôt que rompu, les draperies rouges
tranchent sur les parties bleues.
Avouez, ami lecteur, que Blaubeuren vaut bien une visite.
VI
Sigmaringen, située sur le Danube,, en amont d’Ulm, à deux
heures et demie de chemin de fer, et plus au sud, se recommande
et par son site et par les belles collections d’art qu’y a réunies la
branche aînée (catholique) des Hohenzollern, souveraine de cette
principauté depuis 1534 jusqu’en 1849, époque où elle l’a cédée à
la Prusse b Pour moi, j’y ai été attiré avant tout par le désir de voir
de près une de ces capitales minuscules, telles que l'Allemagne en
renfermait tant jadis. De fait, tout y proclame, sinon le luxe, du
moins l’étiquette d’une cour princière : des édifices plus ou moins
imposants, avec le fronton grec obligatoire (les tribunaux, l’ancien
ministère des Finances), un jardin public (« Hofgarten ») et surtout
les enseignes des magasins. On m’affirme que le chef de la dynastie
a le droit de continuer à conférer le titre de « Hofrath » (conseiller
aulique). Dans les écuries princières s’alignent une cinquantaine
de chevaux, aux housses ornées de la couronne fermée, et quarante-
huit véhicules, depuis les breaks modernes, les coupés, les victorias,
jusqu’aux voitures de chasse et aux carosses de gala, ces derniers
moins magnifiques toutefois que ceux que l’on admire dans le
palais du duc d’Albc, à Madrid. Le personnel est à l’avenant : si les
employés du palais se reconnaissent à leur livrée grise, très simple,
les jockeys à casquettes galonnées, les cochers, les valets de pied,
ont tout à fait grande tournure et révèlent un train de maison
véritablement princier.
Sigmaringen — je commence par le déclarer — est une petite
ville moderne, à rues larges et régulières, mais sans industrie,
dénuée de tout caractère. Les œuvres d’art y brillent par leur absence.
1. La principauté contient un certain nombre d’œuvres d’art dignes d’être
signalées : d’abord, l’imposant château de Hohenzollern, appartenant à l’empereur
d’Allemagne et restauré par ses soins ; puis, à Bingen, un retable de Zeitblom ;
à iïechingen, la dalle funéraire du comte Eitel Friedrich de Zollern, par Peter
Viseher; à Ennebacb, un tabernacle sculpté, un « Levitensi'z », et des stalles de
l'atelier de Syrlin ( 1506-d 509), ainsi qu’un retable peint attribué à Martin Schaffner.
Voir : Lehner, Verzcichniss cler Gemælde, p. 22. — Zingeler et Laur, Die Bau- tend
Kun$t-Dçnkm%lçr in dcn Hohenzollern'$chen Danden. Stuttgart, 1896.
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aux nimbes, il y a une quinzaine d’années, une nouvelle couche
d’or. Le coloris est vif plutôt que rompu, les draperies rouges
tranchent sur les parties bleues.
Avouez, ami lecteur, que Blaubeuren vaut bien une visite.
VI
Sigmaringen, située sur le Danube,, en amont d’Ulm, à deux
heures et demie de chemin de fer, et plus au sud, se recommande
et par son site et par les belles collections d’art qu’y a réunies la
branche aînée (catholique) des Hohenzollern, souveraine de cette
principauté depuis 1534 jusqu’en 1849, époque où elle l’a cédée à
la Prusse b Pour moi, j’y ai été attiré avant tout par le désir de voir
de près une de ces capitales minuscules, telles que l'Allemagne en
renfermait tant jadis. De fait, tout y proclame, sinon le luxe, du
moins l’étiquette d’une cour princière : des édifices plus ou moins
imposants, avec le fronton grec obligatoire (les tribunaux, l’ancien
ministère des Finances), un jardin public (« Hofgarten ») et surtout
les enseignes des magasins. On m’affirme que le chef de la dynastie
a le droit de continuer à conférer le titre de « Hofrath » (conseiller
aulique). Dans les écuries princières s’alignent une cinquantaine
de chevaux, aux housses ornées de la couronne fermée, et quarante-
huit véhicules, depuis les breaks modernes, les coupés, les victorias,
jusqu’aux voitures de chasse et aux carosses de gala, ces derniers
moins magnifiques toutefois que ceux que l’on admire dans le
palais du duc d’Albc, à Madrid. Le personnel est à l’avenant : si les
employés du palais se reconnaissent à leur livrée grise, très simple,
les jockeys à casquettes galonnées, les cochers, les valets de pied,
ont tout à fait grande tournure et révèlent un train de maison
véritablement princier.
Sigmaringen — je commence par le déclarer — est une petite
ville moderne, à rues larges et régulières, mais sans industrie,
dénuée de tout caractère. Les œuvres d’art y brillent par leur absence.
1. La principauté contient un certain nombre d’œuvres d’art dignes d’être
signalées : d’abord, l’imposant château de Hohenzollern, appartenant à l’empereur
d’Allemagne et restauré par ses soins ; puis, à Bingen, un retable de Zeitblom ;
à iïechingen, la dalle funéraire du comte Eitel Friedrich de Zollern, par Peter
Viseher; à Ennebacb, un tabernacle sculpté, un « Levitensi'z », et des stalles de
l'atelier de Syrlin ( 1506-d 509), ainsi qu’un retable peint attribué à Martin Schaffner.
Voir : Lehner, Verzcichniss cler Gemælde, p. 22. — Zingeler et Laur, Die Bau- tend
Kun$t-Dçnkm%lçr in dcn Hohenzollern'$chen Danden. Stuttgart, 1896.