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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 23.1900

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Nr. 3
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Gauthiez, Pierre: Notes sur Bernardino Luini, [4]
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https://doi.org/10.11588/diglit.24720#0250

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NOTES SUR BERNARDINO LUINI

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hôtel et l’on peut loger dans la chambre du peintre. Ce monastère
est mitoyen avec Sainte-Marie-des-Anges, petite église qui est toute
emplie par la fresque. C’est La Passion: au premier plan, le drame
surhumain s’étale sur douze mètres de largeur. En arrière, sur la
hauteur de sept mètres, après les personnages du premier plan, et
surélevées par une banquette de terrain où s’appuient deux colon-
nades, ce sont, à gauche1, les scènes de la vie militante, le Cou-
ronnement d’épines et Jésus tombant sous la croix ; à droite, les
scènes de la vie triomphante,, la Mise au tombeau et le Christ appa-
raissant à saint Thomas. Tout au fond, à la gauche, le Christ au
Jardin des oliviers et, sur la droite, l’Ascension. Saint Sébastien et
saint Roch, au-dessous de la grande fresque, se dressent entre les
prophètes et des inscriptions. Tout de suite, dans cet ouvrage colos-
sal, des figures semblent vivantes, prises au pays : un bourreau,
pesant, rustre, glabre et frisé, quelque boucher suisse-allemand ; au
pied de la croix, à gauche, des fonctionnaires sérieux et attentifs.
A l’extrémité, une femme drapée, du plus grand style, tient un
enfant sur ses bras et en attire un autre contre elle avec un geste de
majesté, et son chien est à ses pieds. Dans ce crépuscule indicible,
qui semble pris au coloris des colombes, au ton du ciel après que le
soleil se couche, l’été, sur le Cercsio, le groupe des Saintes femmes
soutenant la Vierge commence l'ensorcellement de cette fresque, ce
charme qui captive et fait repasser sans relâche le seuil de cette
église; la Vierge, émaciée et comme effacée par une douleur dont
aucune douleur n’approche, a derrière elle une petite femme pâle,
aux lourds cheveux blonds, du type celtique le plus pur, à demi
cachée par le voile vert bleu de la Vierge défaillante. Jamais un être
évanoui ne fut peint avec la puissance que Luini mit en ce visage.
Ce maître du sourire est aussi le maître de la tristesse et de l’ingé-
nuité dans les sentiments suprêmes ; les tresses blondes de la femme
que je décrivais tout à l’heure sont celles d’une paysanne. Deux

1883) ; — Duncan, The Lugano frescoes (Magazine of Art, mai 1883) ; — J. Beaving-
ton-Atkinson, Lugano, Luino, and the painter Luini (Portfolio de Londres, juin 1886) ;
— Melani, Lettera da Lugano sulla Crocifissionc del Luini. (Arte c storia di Firenze,
n° 29, 1886); — J.-II. Rahn, Die Malereien aus dem Renaissance 7citaltcr in der
italienischen Schweiz (Repcrtorium für Kunstwissenschaft, t. XII-I, ch. i, 1887,
et Bollettino storico délia Svizzcra italiana, 1892.) — Je répète ici, pour la dernière
fois, combien ces renseignements bibliographiques doivent au dossier commu-
niqué par M. L. Beltrami.

1. A gauche pour le spectateur. Je laisse aux notes prises sous la directe
impression de l’œuvre leur allure même, qui seule rend la vérité.
 
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