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Journal de la marbrerie et de l'art décoratif: bimensuel — 4.1907 (Nr. 77-100)

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Supplement au Nr. 96
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Le travail dans les Carrières des Indes Anglaises
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https://doi.org/10.11588/diglit.17229#0164

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156

l<é travail dans les Carrières des ïndes Anglaises

Un voyageur anglais, M. G. Cecil, rapporte
d'un récent voyage dans les Indes, une étude
très curieuse sur la façon dont les car-
rières sont exploitées dans le vaste empire
d'Edouard VII.

Cette étude contredit sensiblement les rap-
ports faits jusqu'à présent et qui présentaient
l'exploitation des carrières comme une indus-
trie de grand avenir et réalisant d'énormes
progrès.

Nos lecteurs verront qu'il faudrait en bou-
leverser complètement l'organisation pour
arriver à un résultat marquant.

L'exploitation des carrières, dit M. Cecil,
ressemble peu à celle d'Europe. La produc-
tion est minime; les travaux fatigants et
suivis sont, mal vus par les ouvriers indi-
gènes; la vie étant très bon marché, la main-
d'œuvre l'est également; l'étranger qui dirige
les travaux n'a pas plus d'amusements que
les gens du pays et le climat énervant produit
un effet désastreux sur les employés euro-
péens. Aussi, l'importé regrette-t-il bien vite
le pays natal, à moins qu'il se contente d'une
vie encore plus monotone et simple que celle
du vicaire de "Wakelield.

Voici pour quelles raisons la production est
minime malgré l'abondance et la richesse des
gisements : d'abord parce que les ouvriers
sont extrêmement paresseux; ensuite parce
que l'emploi des machines modernes est
inconnu.

Les ouvriers indigènes estiment que le
«temps n'a pas d'importance». Ils traînent
sur leur besogne, comme si chaque jour était
jour de fête et, s'ils sont quelque peu gour-
mandés par le patron, ils lui intentent une
action pour intimidation. Si l'un des hommes
abandonne le chantier, les autres ne tardent
pas à déclarer une grève et, lorsque ces
intraitables reprennent le travail, ils exigent
que les salaires de tous les jours d'absence
leur soient payés, malmenant l'exploitant
quand une partie de ces salaires leur est
retenue. S'ils ne gagnent pas suffisamment

d'argent, par suite de leurs absences, à un
travail déterminé, ils prétendent que l'en-
droit est « hanté » et s'empressent d'aller se
débarrasser du mauvais sort dans le plus
proche bazar, où ils se purifient par un
whisky spécial de fabrication allemande ! Et,
alors, ils ne consentent à reparaître devant
les chefs qu'après avoir dépensé leur dernier
anna (10 centimes).

La fièvre leur sert également de prétexte
aussi courant que peu compromettant pour
leur santé, et les médecins locaux délivrent
des certificats complaisants à un prix qui
ferait rêver — pas d'envie, certes — le
Dr Doyen ; ils s'en procurent donc facilement.
Puis, comme il faut vivre malgré tout, l'ou-
vrier va trouver le sahib, magistrat local
qui correspond au juge de paix chez nous,
et lui rappelle qu'il a une nombreuse (et
croissante) famille qui attend le salaire jour-
nalier pour se nourrir. Si l'exploitant ne se
rend pas à toutes ces bonnes raisons, il est
traité d'inhumain et boycotté jusqu'à ce qu'il
s'incline.

L'utilisation des machines à scier est
inconnue dans ces carrières. Les ouvriers
préfèrent les moyens qu'employèrent leurs
ancêtres et dont, à leur avis, on obtenait les
meilleurs résultats. A quoi bon changer alors?
Ils scient donc à la main et voici comment ils
procèdent :

Après la disposition de l'équipe, le premier
ouvrier s'attache au poignet un bout du
câble retenant la scie, puis... il s'endort.

Son collègue, qui a procédé de même façon
à l'autre extrémité, s'endort également. S'ils
se réveillent simultanément, ils consentent à
tirer la scie pendant quelques minutes. Mais
si l'un des deux se réveille avant l'autre, il
s'empresse de se rendormir... « Je ne pou-
vais pas travailler », dira-t-il à son patron,
« car mon collègue dormait ! »

Fertile en excuses, un mensonge ne
 
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