NOTRE BIBLIOTHEQUE. 267
car la poste, faute d’argent pour payer les employés, ne
transmet plus les correspondances. Un incendie se
déclare; on ne peut se rendre maître du feu, les pompes
étant en mauvais état, et le manque d’espèces ayant empê-
ché de les réparer en temps utile. Les puissances étran-
gères se montrent hostiles, et édictent des dispositions
désastreuses pour notre commerce. Mais on est réduit à
supporter leur mauvaise humeur, car il n’y a plus, tou-
jours par une suite de la réforme due à M. Badaud, ni
armée, ni marine.
L’auteur, en énumérant les diverses conséquences, les
unes grandes et tragiques, les autres petites et burlesques,
de l’hérésie économique de M. Badaud, a déployé une
remarquable fertilité d’esprit, des ressources rares de nar-
rateur. Toutes ces scènes, très variées, fort ingénieuse-
ment imaginées, sont traitées avec beaucoup de verve, de
vivacité, de bonne grâce.
Naturellement, M. Badaud, naguère fêté avec tant de
faveur, par ses concitoyens, devient pour eux un objet de
haine. Aux compliments succèdent les injures; les séré-
M. Badaud développe au café ses théories.
nades sont remplacées par des charivaris. Toutefois, l’au-
teur n’a pas voulu que la fin des aventures de son héros
fût malheureuse. C’est M. Badaud lui-même qui rétablit
le calme, l’équilibre et la prospérité détruits par sa faute.
Il ne propose pas de revenir au système des impôts. —
Non certes!... mais il demande qu’on les remplace par
une cotisation patriotique et obligatoire! Cette motion
rallie tous les suffrages. Le pays redevient florissant. Pour
M..Badaud renaissent les ovations, les vivats, les aubades,
et, comme dans la pièce de Shakespeare : Tout est bien
qui finit bien.
Cette dernière idée est vraiment très piquante. Il faut
ajouter que la donnée principale est enrichie, avec une
réelle habileté, d’une foule d’épisodes inattendus et amu-
sants. M. Badaud, sa femme, ses deux filles et leurs amou-
reux [car une petite intrigue romanesque traverse et relève
la narration principale), sont des figures bien venues, net-
tement dessinées, révélant chez l’auteur un observateur
très exercé de la nature humaine.
Ce livre est destiné à faire réfléchir les adolescents qui
le liront et à leur apprendre, sans aucun étalage de grands
mots, sans le moindre appareil de pédantisme, quelques-
UN PORTRAIT
L’Art, en maintes occasions, a rendu éclatante justice
à l’admirable talent de l’éminent portraitiste Franz von
Lenbach L Nous avons reproduit, dans notre livraison du 1
1. Voir l’Art, 5' année, tome III, page 36, et 140 année, tome II,
pages 31, 32 et 33.
uns des principes sur lesquels repose l’existence normale
de toute société organisée.
Il est à remarquer que l’auteur, narrateur de race et
écrivain de la bonne école, a su rendre fort attrayant cet
ouvrage et a su revêtir l’enseignement utile de formes
particulièrement séduisantes.
C’est, en somme, une œuvre qui fait la meilleure figure
dans une série que quelques-uns de nos littérateurs ont
su rendre si riche. La qualité de la langue, la valeur du
style, font de ces pages un modèle, un objet excellent
d’étude et d’assimilation.
Les aventures de l’honnête M. Badaud ont fort heureu-
sement inspiré M. Laurent-Gsell. Son crayon rivalise,
d’une façon très intéressante, avec la plume de M. Vau-
Monsieur Badaud a la Chambre.
tier. Les types sont tracés avec un sentiment très spirituel.
Rien de mieux trouvé et de plus caractéristique que la tête
prêtée par M. Laurent-Gsell au naïf réformateur de nos
finances. Il en faut dire autant des scènes qu’il a choisies
et traitées. Tous ces épisodes, sans jamais tomber dans la
caricature lourde et triviale, sont de l’effet le plus réjouis-
sant.
Le volume est d’une belle exécution typographique.
Il se présente le mieux du monde et a l’aspect fort élégant.
E. Dumont.
DE LENBACH
Ier septembre, un fort beau dessin d’après nature du
maître allemand. Ce portrait de M. de Bismarck appar-
tient à M. Jacques Saint-Cère, qui nous a promis une
étude sur le peintre munichois. M. Saint-Cère la termine
dans ce moment et nous la publierons dans une des pre-
mières livraisons de 1890.
car la poste, faute d’argent pour payer les employés, ne
transmet plus les correspondances. Un incendie se
déclare; on ne peut se rendre maître du feu, les pompes
étant en mauvais état, et le manque d’espèces ayant empê-
ché de les réparer en temps utile. Les puissances étran-
gères se montrent hostiles, et édictent des dispositions
désastreuses pour notre commerce. Mais on est réduit à
supporter leur mauvaise humeur, car il n’y a plus, tou-
jours par une suite de la réforme due à M. Badaud, ni
armée, ni marine.
L’auteur, en énumérant les diverses conséquences, les
unes grandes et tragiques, les autres petites et burlesques,
de l’hérésie économique de M. Badaud, a déployé une
remarquable fertilité d’esprit, des ressources rares de nar-
rateur. Toutes ces scènes, très variées, fort ingénieuse-
ment imaginées, sont traitées avec beaucoup de verve, de
vivacité, de bonne grâce.
Naturellement, M. Badaud, naguère fêté avec tant de
faveur, par ses concitoyens, devient pour eux un objet de
haine. Aux compliments succèdent les injures; les séré-
M. Badaud développe au café ses théories.
nades sont remplacées par des charivaris. Toutefois, l’au-
teur n’a pas voulu que la fin des aventures de son héros
fût malheureuse. C’est M. Badaud lui-même qui rétablit
le calme, l’équilibre et la prospérité détruits par sa faute.
Il ne propose pas de revenir au système des impôts. —
Non certes!... mais il demande qu’on les remplace par
une cotisation patriotique et obligatoire! Cette motion
rallie tous les suffrages. Le pays redevient florissant. Pour
M..Badaud renaissent les ovations, les vivats, les aubades,
et, comme dans la pièce de Shakespeare : Tout est bien
qui finit bien.
Cette dernière idée est vraiment très piquante. Il faut
ajouter que la donnée principale est enrichie, avec une
réelle habileté, d’une foule d’épisodes inattendus et amu-
sants. M. Badaud, sa femme, ses deux filles et leurs amou-
reux [car une petite intrigue romanesque traverse et relève
la narration principale), sont des figures bien venues, net-
tement dessinées, révélant chez l’auteur un observateur
très exercé de la nature humaine.
Ce livre est destiné à faire réfléchir les adolescents qui
le liront et à leur apprendre, sans aucun étalage de grands
mots, sans le moindre appareil de pédantisme, quelques-
UN PORTRAIT
L’Art, en maintes occasions, a rendu éclatante justice
à l’admirable talent de l’éminent portraitiste Franz von
Lenbach L Nous avons reproduit, dans notre livraison du 1
1. Voir l’Art, 5' année, tome III, page 36, et 140 année, tome II,
pages 31, 32 et 33.
uns des principes sur lesquels repose l’existence normale
de toute société organisée.
Il est à remarquer que l’auteur, narrateur de race et
écrivain de la bonne école, a su rendre fort attrayant cet
ouvrage et a su revêtir l’enseignement utile de formes
particulièrement séduisantes.
C’est, en somme, une œuvre qui fait la meilleure figure
dans une série que quelques-uns de nos littérateurs ont
su rendre si riche. La qualité de la langue, la valeur du
style, font de ces pages un modèle, un objet excellent
d’étude et d’assimilation.
Les aventures de l’honnête M. Badaud ont fort heureu-
sement inspiré M. Laurent-Gsell. Son crayon rivalise,
d’une façon très intéressante, avec la plume de M. Vau-
Monsieur Badaud a la Chambre.
tier. Les types sont tracés avec un sentiment très spirituel.
Rien de mieux trouvé et de plus caractéristique que la tête
prêtée par M. Laurent-Gsell au naïf réformateur de nos
finances. Il en faut dire autant des scènes qu’il a choisies
et traitées. Tous ces épisodes, sans jamais tomber dans la
caricature lourde et triviale, sont de l’effet le plus réjouis-
sant.
Le volume est d’une belle exécution typographique.
Il se présente le mieux du monde et a l’aspect fort élégant.
E. Dumont.
DE LENBACH
Ier septembre, un fort beau dessin d’après nature du
maître allemand. Ce portrait de M. de Bismarck appar-
tient à M. Jacques Saint-Cère, qui nous a promis une
étude sur le peintre munichois. M. Saint-Cère la termine
dans ce moment et nous la publierons dans une des pre-
mières livraisons de 1890.