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CATALOGNE.
citadelle, dédiée à san Fernando, construite en 1788, est digne des plus
belles créations du peuple-roi. De forme pentagonale, taillée dans le roc,
elle résume les principes de Vauban. Tous ses bâtiments sont à l'épreuve
de la bombe et ses avenues minées. Elle peut contenir une garnison de
seize mille hommes, possède un arsenal, une salle d'armes, un hôpital,
une église, et se suffit conséquemment à elle-même. Tombée, en 1808,
au pouvoir des Français, les Espagnols la reprirent en 1811. Le 19 août
nos troupes s'en emparèrent de nouveau et l'occupèrent jusqu'en
1814. Le 29 septembre 1823, après un blocus de trois mois, l'ar-
mée, sous les ordres du maréchal Moncey, s'en fit ouvrir les portes.
Située au point central des communications de la France et de l'Espagne,
cette forteresse, comme le remarque judicieusement un voyageur, de-
vrait être la clef de la frontière; mais il n'en est rien, et les Espagnols
disent, avec beaucoup de sens, qu'ils n'ont qu'eu temps de paix leur
clef dans la poche.
En sortant de Figuières pour gagner la France, on traverse une
plaine fertile, puis des gorges sauvages; cinq ou six fois on franchit le
Llobrégat, et, après environ trois heures de marche, on arrive à la
Jonquèra, village frontière, renommé pour sa fabrique de bouchons.
« J'ai examiné les ouvriers qui ramollissent les grandes planches
formées par l'écorce de ces beaux chênes verts qui recouvrent les mon-
tagnes voisines, ceux qui les divisent en carrés de dimensions diverses,
ceux qui les taillent et leur donnent la forme définitive. La lame au
moyen de laquelle s'opère cette manœuvre dernière est très-large, d'un
tranchant très-mince, et elle est fixée d'une manière fort ingénieuse sur
un petit établi. Le morceau de liège fait sa révolution contre ce tran-
chant qui enlève le superflu, et le bouchon sort de ce contact avec le
calibre qui lui convient. Cela se fait très-rapidement, et un bon ouvrier
peut fabriquer un grand nombre de ces bouche-trous dans sa journée.
D'autres personnes les choisissent, les classent en différentes grandeurs,
et ce produit est exporté en France. C'est un accessoire obligé de la
vigne et des verreries perfectionnées. Les bouteilles blanches et minces
de l'Italie se passent très-bien de bouclions; les outres en peau de
bouc de l'Espagne n'en ont pas besoin; la bière des pays du Nord se boit
en pots, en cruches; c'est donc plus particulièrement en France que l'on
CATALOGNE.
citadelle, dédiée à san Fernando, construite en 1788, est digne des plus
belles créations du peuple-roi. De forme pentagonale, taillée dans le roc,
elle résume les principes de Vauban. Tous ses bâtiments sont à l'épreuve
de la bombe et ses avenues minées. Elle peut contenir une garnison de
seize mille hommes, possède un arsenal, une salle d'armes, un hôpital,
une église, et se suffit conséquemment à elle-même. Tombée, en 1808,
au pouvoir des Français, les Espagnols la reprirent en 1811. Le 19 août
nos troupes s'en emparèrent de nouveau et l'occupèrent jusqu'en
1814. Le 29 septembre 1823, après un blocus de trois mois, l'ar-
mée, sous les ordres du maréchal Moncey, s'en fit ouvrir les portes.
Située au point central des communications de la France et de l'Espagne,
cette forteresse, comme le remarque judicieusement un voyageur, de-
vrait être la clef de la frontière; mais il n'en est rien, et les Espagnols
disent, avec beaucoup de sens, qu'ils n'ont qu'eu temps de paix leur
clef dans la poche.
En sortant de Figuières pour gagner la France, on traverse une
plaine fertile, puis des gorges sauvages; cinq ou six fois on franchit le
Llobrégat, et, après environ trois heures de marche, on arrive à la
Jonquèra, village frontière, renommé pour sa fabrique de bouchons.
« J'ai examiné les ouvriers qui ramollissent les grandes planches
formées par l'écorce de ces beaux chênes verts qui recouvrent les mon-
tagnes voisines, ceux qui les divisent en carrés de dimensions diverses,
ceux qui les taillent et leur donnent la forme définitive. La lame au
moyen de laquelle s'opère cette manœuvre dernière est très-large, d'un
tranchant très-mince, et elle est fixée d'une manière fort ingénieuse sur
un petit établi. Le morceau de liège fait sa révolution contre ce tran-
chant qui enlève le superflu, et le bouchon sort de ce contact avec le
calibre qui lui convient. Cela se fait très-rapidement, et un bon ouvrier
peut fabriquer un grand nombre de ces bouche-trous dans sa journée.
D'autres personnes les choisissent, les classent en différentes grandeurs,
et ce produit est exporté en France. C'est un accessoire obligé de la
vigne et des verreries perfectionnées. Les bouteilles blanches et minces
de l'Italie se passent très-bien de bouclions; les outres en peau de
bouc de l'Espagne n'en ont pas besoin; la bière des pays du Nord se boit
en pots, en cruches; c'est donc plus particulièrement en France que l'on