182 VOYAGE EN ESPAGNE.
après la restauration de Ferdinand VII, dont l'absolutisme sauva la
monarchie de sa ruine; le troisième, sous le règne de la reine Isabelle.
L'irrésistible puissance du progrès emporte l'Espagne vers des con-
quêtes d'industrie qui, sans doute, ne feront pas son bonheur matériel,
car le bonheur qu'elle peut avoir, elle le possède dans la paix, mais qui
lui permettront, du moins, de se poser en rivale des autres nations
européennes.
Déjà plusieurs villes caractérisent ce mouvement. A l'intérieur, Vi-
toria, industrielle et militaire, présentant quelque ressemblance avec
Mulhouse; Valladolid, scientifique et commerçante, où la robe de pro-
fesseur émérite frôle la robe du magistrat, où les cris des Maragotas se
mêle au hennissement des chevaux et le grincement des limes au son
des trompettes; Madrid qui bientôt oubliera peut-être toutes ses tra-
ditions nationales, à force d'imiter les habitudes étrangères; qui se
meuble, s'habille, se pose comme on le fait dans Paris ou dans Lon-
dres, et qui perdrait sa physionomie indigène, si journellement il ne
lui arrivait pas de la province des éléments nouveaux qui la lui con-
servent.
Le long du littoral, beaucoup de villes ont pris une attitude et des
allures modernes. Au mont Urgull, cône flottant sur lequel s'est der-
nièrement assise une cité toute nouvelle, appelée Saint-Sébastien; c'est
à peine si la pente urbaine, si l'hôpital et la maison de Miséricorde
laissent deviner les beautés architecturales d'une vénérable décrépi-
tude. On ne voit ici que des rectangles jaunes et bleuâtres: bleuâtres
quand les moellons arrivent d'Hernani; jaunes quand ils sont tirés des
carrières voisines; et l'on s'étonne qu'un port aussi mesquin ait fourni
des marins d'un mérite aussi distingué; mais le génie n'éclot-il pas
dans les berceaux les plus modestes?
Jalouse de son or, de ses richesses, de ses jolies femmes, Bilbao a
l'air de les cacher entre deux montagnes et de les soustraire au rayon-
nement du soleil. Pour compensation, elle irrige avec soin leur de-
meure; elle y plante des bosquets touffus; elle pare de briques fines
l'intérieur des appartements; elle entasse dans son port des cargai-
sons de morue écossaise et de tabac qui deviennent une source d'opu-
lence.
après la restauration de Ferdinand VII, dont l'absolutisme sauva la
monarchie de sa ruine; le troisième, sous le règne de la reine Isabelle.
L'irrésistible puissance du progrès emporte l'Espagne vers des con-
quêtes d'industrie qui, sans doute, ne feront pas son bonheur matériel,
car le bonheur qu'elle peut avoir, elle le possède dans la paix, mais qui
lui permettront, du moins, de se poser en rivale des autres nations
européennes.
Déjà plusieurs villes caractérisent ce mouvement. A l'intérieur, Vi-
toria, industrielle et militaire, présentant quelque ressemblance avec
Mulhouse; Valladolid, scientifique et commerçante, où la robe de pro-
fesseur émérite frôle la robe du magistrat, où les cris des Maragotas se
mêle au hennissement des chevaux et le grincement des limes au son
des trompettes; Madrid qui bientôt oubliera peut-être toutes ses tra-
ditions nationales, à force d'imiter les habitudes étrangères; qui se
meuble, s'habille, se pose comme on le fait dans Paris ou dans Lon-
dres, et qui perdrait sa physionomie indigène, si journellement il ne
lui arrivait pas de la province des éléments nouveaux qui la lui con-
servent.
Le long du littoral, beaucoup de villes ont pris une attitude et des
allures modernes. Au mont Urgull, cône flottant sur lequel s'est der-
nièrement assise une cité toute nouvelle, appelée Saint-Sébastien; c'est
à peine si la pente urbaine, si l'hôpital et la maison de Miséricorde
laissent deviner les beautés architecturales d'une vénérable décrépi-
tude. On ne voit ici que des rectangles jaunes et bleuâtres: bleuâtres
quand les moellons arrivent d'Hernani; jaunes quand ils sont tirés des
carrières voisines; et l'on s'étonne qu'un port aussi mesquin ait fourni
des marins d'un mérite aussi distingué; mais le génie n'éclot-il pas
dans les berceaux les plus modestes?
Jalouse de son or, de ses richesses, de ses jolies femmes, Bilbao a
l'air de les cacher entre deux montagnes et de les soustraire au rayon-
nement du soleil. Pour compensation, elle irrige avec soin leur de-
meure; elle y plante des bosquets touffus; elle pare de briques fines
l'intérieur des appartements; elle entasse dans son port des cargai-
sons de morue écossaise et de tabac qui deviennent une source d'opu-
lence.