VOYAGE EN ESPAGNE.
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femmes, chaussée à la romaine par ses murailles, coiffée à la mau-
resque par ses tours, parfumée à l'instar d'une odalisque, dans ses
patios et dans ses alamedas. A Valence, respire quelque chose de la ville
douairière, de la ville aux aristocratiques nonchalances; tandis que Bar-
celone , sa rivale maritime, chemine incessamment poussée par l'im-
pulsion des besoins matériels. Demain ou après, vous verrez Barcelone
franchir d'un bond ses remparts, puis, d'un autre bond, aller rejoindre
Mataro, sa fille adoptive. Barcelone va laisser rouiller son armure de
guerre, convertir ses canons en machines, ses casernes en fabriques.
Déjà vous l'entendez appeler dans son sein les peuples qu'elle combat-
tait jadis avec le plus d'ardeur; mêler son pavillon avec les pavillons
français et britannique, et préférer aux trophées militaires les trophées
de l'industrie.
La suppression des couvents ne pouvait manquer d'apporter an mi-
lieu des vieilles cités espagnoles une modification profonde. Plusieurs
d'entre elles, qui manquaient d'air, qui, pour respirer, étaient obligées
de grimper sur leurs toits ou sur leurs remparts, ont vu s'ouvrir de
larges rues et de spacieuses alamedas. Une cité moderne, presque
entière, est venue quelquefois s'implanter sur la cité déchue, qu'on eût
fait complètement disparaître si l'on avait rasé les édifices religieux au
lieu de les transformer et de les utiliser. Nous ne nous inscrirons pas
contre la loi. Elle entre dans le domaine imprescriptible des faits ac-
complis ; mais nous regretterons toujours que des exceptions plus larges
n'aient point eu lieu en faveur de certaines congrégations savantes,
que des monuments abandonnés n'aient point été déclarés historiques
et mis sous la sauve-garde du patriotisme espagnol; enfin qu'une pré-
cipitation fâcheuse ait laissé le scandale et les abus s'introduire parmi
les œuvres que l'administration devait accomplir.
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femmes, chaussée à la romaine par ses murailles, coiffée à la mau-
resque par ses tours, parfumée à l'instar d'une odalisque, dans ses
patios et dans ses alamedas. A Valence, respire quelque chose de la ville
douairière, de la ville aux aristocratiques nonchalances; tandis que Bar-
celone , sa rivale maritime, chemine incessamment poussée par l'im-
pulsion des besoins matériels. Demain ou après, vous verrez Barcelone
franchir d'un bond ses remparts, puis, d'un autre bond, aller rejoindre
Mataro, sa fille adoptive. Barcelone va laisser rouiller son armure de
guerre, convertir ses canons en machines, ses casernes en fabriques.
Déjà vous l'entendez appeler dans son sein les peuples qu'elle combat-
tait jadis avec le plus d'ardeur; mêler son pavillon avec les pavillons
français et britannique, et préférer aux trophées militaires les trophées
de l'industrie.
La suppression des couvents ne pouvait manquer d'apporter an mi-
lieu des vieilles cités espagnoles une modification profonde. Plusieurs
d'entre elles, qui manquaient d'air, qui, pour respirer, étaient obligées
de grimper sur leurs toits ou sur leurs remparts, ont vu s'ouvrir de
larges rues et de spacieuses alamedas. Une cité moderne, presque
entière, est venue quelquefois s'implanter sur la cité déchue, qu'on eût
fait complètement disparaître si l'on avait rasé les édifices religieux au
lieu de les transformer et de les utiliser. Nous ne nous inscrirons pas
contre la loi. Elle entre dans le domaine imprescriptible des faits ac-
complis ; mais nous regretterons toujours que des exceptions plus larges
n'aient point eu lieu en faveur de certaines congrégations savantes,
que des monuments abandonnés n'aient point été déclarés historiques
et mis sous la sauve-garde du patriotisme espagnol; enfin qu'une pré-
cipitation fâcheuse ait laissé le scandale et les abus s'introduire parmi
les œuvres que l'administration devait accomplir.