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Bégin, Émile Auguste Nicolas Jules; Rouargue, Émile [Ill.]; Rouargue, Adolphe [Ill.]
Voyage pittoresque en Espagne et en Portugal — Paris: Belin-Leprieur et Morizot, éditeurs, 1852

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https://doi.org/10.11588/diglit.70977#0326

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VOYAGE EN ESPAGNE.

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vierges et ses saints, et de me faire assister à toutes les péripéties de leurs
souffrances, puisqu'il a la volonté d'y assister lui-même. Je ne suis point
en Espagne pour vivre à la française ; et il me semble beaucoup moins
inéséant de mettre des larmes véritables dans les yeux de la Madeleine,
ou du sang dans les plaies de Jésus-Christ, que d'entremêler, ainsi qu'on
le pratique en France, aux gloires de Marie les anges pompadours, et
le paradis des Grecs avec le paradis des chrétiens.
A Girone, au moment de nous coucher, le tintamarre inaccoutumé
des dûtes, des serpents et des timbales nous attira sur le balcon; la rue
scintillait de lumières, et des milliers de têtes semblaient y onduler
comme les flots. Des guerriers cuirassés ouvraient la marche. Venaient
ensuite les sacristains, rubanés comme des chevaliers cadoches; les
membres de confréries et de congrégations, porteurs d'énormes cierges;
les bannières, les croix, les flambeaux, puis, sur un piédestal porté par
huit hommes, Notre-Dame des Sept-Douleurs, le sein percé de sept
épées, et après Notre-Dame, les saints de la Catalogne; après les saints,
une troupe, de pénitents pieds nus, couverts d'une espèce de burnous
qui leur cachaient la figure, et traînant des chaînes; enfin le clergé, les
autorités, le peuple, deux lignes de soldats sous les armes... Quand la
procession fut passée, les pétards retentirent, le bruit des cloches re-
commença. Pendant toute la nuit, j'entendis des chants demi-sauvages,
qui ne me donnèrent pas une haute idée de l'oreille et du goût des
dilettante de cette partie de la Catalogne.
Barcelone m'offrit une procession semblable en l'honneur de sainte
Eulalie, qui, vêtue comme une reine, chemina escortée de toutes les
bêtes de l'Apocalypse, et précédée du Christ avec ses bourreaux. Dix
mille âmes marchaient à leur suite; cent mille âmes étaient aux fenêtres,
et pour que les dévotions ne fussent interrompues par rien, on avait eu
soin de représenter dans l'après-midi l'Elisa y Claudio, del senor Mer-
cadante, et le Baile de Santa Eulalia ; de sorte que la même sainte que
nous venions de voir danser au théâtre, nous la retrouvions par les
rues et dans la Seu, entourée des pompes de l'Église. Le salut dura
très-longtemps. Quelques musiciens, placés au jubé des orgues, chan-
tèrent plusieurs hymnes en mauvais latin, arrangées sur des airsd'opéra
de Bellini, de Rossini, de Verdi, tandis qu'un prédicateur racontait,
 
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