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Bégin, Émile Auguste Nicolas Jules; Rouargue, Émile [Ill.]; Rouargue, Adolphe [Ill.]
Voyage pittoresque en Espagne et en Portugal — Paris: Belin-Leprieur et Morizot, éditeurs, 1852

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https://doi.org/10.11588/diglit.70977#0182

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148 VOYAGE EN ESPAGNE.
les chaînes, par le gibet et par le feu; il eut pour armée des légions de
moines appelés dominicains. Terrible dans ses menaces, il ne le fut pas
moins dans ses vengeances. D'une religion pleine de mansuétude et
d'amour, il fit une religion sévère, exigeante, implacable; il la mit en
harmonie avec les institutions humaines de l'époque. Nous ne justifie-
rons assurément ni l'inquisition, ni le caractère de saint Dominique qui
en fut le fondateur; mais nous dirons qu'au milieu de l'affreux désordre
social existant alors, il fallait une digue bien puissante contre les forts,
et qu'à ce point de vue on ne peut méconnaître que saint Dominique
n'ait rendu des services aux classes inférieures de la société. Et pour-
tant les classes inférieures l'ont oublié! La cause n'en serait-elle pas
dans les abus commis en son nom par ses disciples; dans une réaction
réfléchie de la conscience publique, et dans le mouvement d'idées libé-
rales qui rendraient aujourd'hui l'inquisition aussi difficile'qu'elle était
facile il y a six siècles? Quoi qu'il en soit du motif, constatons le carac-
tère sérieux, solennel du culte voué à saint Dominique.
Ce célèbre confesseur, né en 1170 dans la ville de Calahorra (Vieille-
Castille), mort en 1221, ayant accompagné l'évêque d'Osma à la cour
de France, institua en 1215 à Toulouse l'ordre des Frères prêcheurs,
(dominicains); puis il alla se fixer à Rome, où le pape Honorius III le
nomma maître du sacré palais. Dans une église de Ségovie existe une
chapelle souterraine, ancienne grotte illustrée par les méditations qu'y
faisait saint Dominique. Sa statue, dit un voyageur, paraît s'en souve-
nir, car elle pleure encore; une sueur naturelle, produite par l'humi-
dité du lieu, couvre son large front et lui donne une expression saisis-
sante.
Quiconque n'a vu ni l'enterrement des sardines, le mardi gras, ni
les pèlerinages de San Isidro, le 15 mai, ne peut se faire une idée juste
de la population madrilène. San Isidro, c'est le Longchamp parisien,
mais avec un reflet de croyances religieuses que malheureusement
nous n'avons plus; c'est une fête nationale à laquelle prend part la ville
entière, fête qui dure trois jours, qui s'annonce au bruit des cloches,
qui se signale par des offices dans toutes les églises, par la fermeture
des boutiques, le chômage des ateliers, la suppression des travaux
administratifs et l'allégresse universelle.
 
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