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Bégin, Émile Auguste Nicolas Jules; Rouargue, Émile [Ill.]; Rouargue, Adolphe [Ill.]
Voyage pittoresque en Espagne et en Portugal — Paris: Belin-Leprieur et Morizot, éditeurs, 1852

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https://doi.org/10.11588/diglit.70977#0295

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L'EAU.

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les justes exigences du maître, l'anxiété de la soif; et toutes se sont
hâtées de rejoindre leur logis. D'ailleurs neuf heures sonnent; or passé
neuf heures les portes se ferment, les rideaux se tirent, le souper se sert,
l'existence de famille commence. Ainsi le veut le celador, mieux écouté
qu'un sergent de ville, plus estimé qu'un alguasil, quoiqu'il ne porte
ni épée,ni canne, ni baguette.
L'eau, considérée comme marchandise, soutient, alimente quantité
d'industriels. Tandis qu'en France, le métier de porteur d'eau ne s'exerce
guère qu'à Paris, en Espagne il se rencontre dans toutes les villes
principales : à Madrid, une place de porteur d'eau se vend comme une
charge de notaire. Dès qu'un aguador de nombre, c'est-à-dire un mar-
chand d'eau ayant une place à lui, prend la clientèle de son prédéces-
seur, il devient le factotum de sa clientèle, fait le marché, les commissions
et vit de la sorte aux dépens du bourgeois. L'aguador est nécessairement
un Galicien, gallego. A Séville, Cadix, Malaga, Valence, les aguadores
tiennent boutique et forment une corporation nombreuse. Ce sont les
véritables, les seuls dispensateurs de la santé publique. A Séville sur-
tout, ville élégante où, jusque dans les moindres choses, respire une
certaine recherche de bon goût et de propreté, les aguadores se distin-
guent par un système d'étalage ou par un mode spécial de distribu-
tion. Leurs petites échoppes sont garnies, encadrées de feuillages,
de branches de citronniers, d'orangers ou de figuiers; ils sillonnent
les rues avec des cruches d'argile jaune, d'une forme antique dégé-
nérée, qu'ils transportent avec des brouettes faites exprès. Les cru-
ches ont deux tuyaux : l'un auquel s'adapte le roseau conducteur,
l'autre qui sert à la pression de l'air. Ces gens-là ont assisté aux leçons
de Descartes et de Torricelli. L'eau de Séville ne coûte qu'un ocliaro le
verre, grâce au Guadalquivir plus généreux que le Mançanarès; et, par-
dessus le marché, l'aguador vous présente, dans une boîte de fer blanc,
une cuillerée de pastilles d'anis, petit subterfuge honnête qui, surexci-
tant la soif, aide à la consommation du liquide.
Il existe un fort bon tableau de Velasquez représentant, avec une
vérité frappante, le marchand d'eau sévillan. A côté de l'excellente
gravure française qu'en a donnée M. Blanc, dans son Histoire de la
Peinture, nous placerons l'image ci-contre de MM. Rouargue frères
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