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Bégin, Émile Auguste Nicolas Jules; Rouargue, Émile [Ill.]; Rouargue, Adolphe [Ill.]
Voyage pittoresque en Espagne et en Portugal — Paris: Belin-Leprieur et Morizot, éditeurs, 1852

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https://doi.org/10.11588/diglit.70977#0299

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L'EAU.

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chaque fois qu'il s'agit de détruire des illusions respectables, les sa-
vants nous affirment que de notre part c'est un rêve; que la scène
dont nous croyons avoir été témoins s'est passée jadis en Égypte, au
temps de Moïse, et non pas de nos jours en Espagne. Cependant, il y a
deux siècles, une semblable scène a frappé Murillo. Certain jour,
jour caniculaire sans doute, un rocher s'est ouvert devant ses yeux; il
avait eu le sentiment des souffrances occasionnées par la soif; il
éprouva le bonheur qui résulte de la satisfaction de cet impérieux
besoin. Près de la source, il dressa son atelier, il groupa ses modèles,
et la source continua de couler jusqu'à nos jours. Je la vois, cette
source; j'en respire la fraîcheur. Tout le monde peut la voir comme
moi dans l'église de la Caritad de Séville. Oui, Murillo, grand obser-
vateur autant que grand artiste, s'était pénétré des effets d'un soleil
d'airain; quand il saisit le pinceau pour rendre cette scène si frap-
pante de vérité, l'image de l'Espagne altérée le dominait sans doute; il
entendait dans les rues le mot agua répété sans cesse par tous les échos,
et jusque sur une toile biblique il esquissait l'empreinte desa nationalité.
Avant Murillo, Juan de las Roellas, artiste sévillan, s'était inspiré
du même sujet. Son œuvre, que nous avons vue au Musée de Madrid,
empreinte d'une grande énergie, bien disposée, bien à l'effet, décèle
un faire remarquable. Elle n'a point été sans influence sur la conception
de Murillo.L'ayant sérieusement étudiée, Murillo lui emprunta quelques
scènes, comme un artiste de génie sait emprunter. Le caractère, la cou-
leur des deux tableaux se trouvent bien opposés l'un à l'autre; mais en
examinant le second, il n'est personne qui ne se ressouvienne du premier.
On ne comprend guère qu'avec leur passion de l'eau poussée si loin,
la plupart des villes d'Espagne, depuis Philippe II, soient demeurées
sans bains publics. Un Français, M. Monier, est le premier auquel on
doive à Madrid l'introduction, il y a huit ans, des bains portatifs à
domicile; ressource précieuse sous le rapport de l'hygiène et sous le
rapport de la thérapeutique. Différentes villes en possèdent aujourd'hui
de semblables; mais en aucune d'elles, même à Cadix, même à Barce-
lone, cités européennes plutôt qu'espagnoles , nous ne voyons régner
cette confortable élégance offerte par nos bains français.
Dans un pays où beaucoup de sources tarissent pendant trois mois
 
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