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Bégin, Émile Auguste Nicolas Jules; Rouargue, Émile [Ill.]; Rouargue, Adolphe [Ill.]
Voyage pittoresque en Espagne et en Portugal — Paris: Belin-Leprieur et Morizot, éditeurs, 1852

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https://doi.org/10.11588/diglit.70977#0366

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VOYAGE EN ESPAGNE.

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Ces jours derniers, Xandencia de Madrid a prononcé une condamna-
tion à mort; c'était un grand coupable, dont la peine ne pouvait se com-
muer. La place de la Cevacla prend son appareil lugubre; les cloches
tintent le glas funèbre; voici le patient qui s'avance, porté par un âne
sans oreilles, vêtu d'une tunique blanche, coiffé d'une calotte verte sur
laquelle se dessine une croix de même couleur que la tunique. Il mar-
che, escorté d'une double haie de frères de la Paz y Cariclad, et de
soldats; il est précédé par l'aumônier de la prison et par quelques prê-
tres. Autrefois, c'étaient des moines de l'ordre des Agonisants. Le signe
de la Rédemption ouvre le cortège. Les prêtres disent les litanies
funèbres, tandis que l'un d'eux, choisi par la victime, l'accompagne
et lui montre au ciel un Dieu de miséricorde qui va l'accueillir et lui
pardonner, s'il sait mourir chrétiennement. Deux frères de la Paz y Ca-
ridad, munis chacun d'une cloche, répondent aux versets funèbres par
un tintement lugubre, et prononcent d'intervalle en interval le les paroles
suivantes, en présentant une bourse aux spectateurs : « Para hacer
bien y decir misas por el aima del pobre que sacan ci ajusticiar ! Quien
pueda por el amor de Dios. — « Pour faire du bien et dire des messes en
faveur de l'âme du malheureux qu'on va exécuter. Donnez ce que vous
pouvez, pour l'amour de Dieu. »
Ainsi cet homme, criminel hier, repoussé du sein de la société, n'est
plus aujourd'hui qu'une victime de la loi; le jour que la justice l'a
frappé, une société nouvelle s'est ouverte à lui; il a trouvé des frères,
les frères de la Charité, qui sont venus le fortifier, le soulager, l'aider;
qui l'ont considéré comme un martyr déjà puni suffisamment par le
remords, qui s'est purifié, en traversant trois phases de l'existence hu-
maine, la souillure, la pénitence et le pardon, et qui s'en retourne
vers Dieu comme un enfant perdu, longtemps égaré, mais retrouvé.
Les frères de Paix et de Charité se font les précurseurs du pardon cé-
leste. Yoyez-les simples, graves, austères, religieux, exempts de
toute liypoerisie; méprisant ces momeries ridicules qui forment la
base et l'enseigne de presque toutes les associations philanthropi-
ques, dominés qu'ils sont par un profond amour du prochain, par
une piété compatissante. Au nombre des confrères de la Paix se trou-
vent les hommes les plus éminents de la ville, les esprits les plus droits,
 
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