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Bégin, Émile Auguste Nicolas Jules; Rouargue, Émile [Ill.]; Rouargue, Adolphe [Ill.]
Voyage pittoresque en Espagne et en Portugal — Paris: Belin-Leprieur et Morizot, éditeurs, 1852

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https://doi.org/10.11588/diglit.70977#0407

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L'ESCURIAL.
travers les montagnes qui s'élèvent, en forme de croissant, autour du
château. Ce n'est point l'œuvre humaine que l'artiste reproduit, c'est
la nature; son pinceau ne s'arrête qu'accidentellement sur le massif
des constructions royales.
Pouvons-nous mieux faire qu'imiter Rubens? D'ailleurs, quand
nous aurons parlé de ces vastes terrasses festonnées de buis, de ces
longues plates-bandes plantées de roses, de ces rectangles peuplés d'ar-
bres fruitiers; quand nous aurons traversé ce parc d'une circonférence
de dix lieues, visité la Casa de Campo, la Silla del Rey, retraites un
peu bourgeoises, mais agréables dans leur isolement et leur silence,
nous serions mal venu de conduire un lecteur français sous les in-
terminables corridors de l'Escurial. A plus forte raison n'en visiterait-il
pas volontiers les caveaux. Effectivement, qu'y voir? Des sculptures
médiocres, des épitaphes pompeuses; la flatterie couronnant quelque-
fois la médiocrité. Là repose un cortège de rois, de reines et d'infants
d'Espagne; nous voudrions y sentir également les cendres de ceux qui
jadis ont soutenu le trône, rehaussé l'éclat de la couronne; car, vivante
ou morte, la royauté ne devrait jamais s'isoler de ses défenseurs. Le
Panthéon de l'Escurial poserait d'une manière bien autrement solennelle
dans l'histoire, si l'on savait y rencontrer les ombres de Gonzalve, de
Pizarre et de Fernand Cortez avec l'ombre de Charles-Quint et celle de
Charles III.
Le portail de la cour extérieure écrase la pensée sous la masse de ses
pierres. 11 en est de même du portail de la cour intérieure, surmonté
de six statues représentant six juges de l'Ancien Testament, qui ont
l'air d'exécuter un pas du menuet d'Ezaudet.
L'église a quelque grandeur, mais une grandeur sans majesté, gran-
deur froide, inanimée par ses formes autant que par sa teinte. Ce sont
des colonnes colossales surmontées d'une coupole; quarante autels
symétriques encastrés sous des cintres; ce sont des retables, tous faits
sur quelques patrons réguliers et qu'on croirait sortis d'une fabrique;
c'est un ton de muraille gris et terne auquel il faudrait tout l'éclat,
toutes les nuances heurtées de l'ancienne école espagnole, qui juste-
ment semble avoir voulu se tenir à l'écart de cette œuvre si froide,
qu'elle seule eut animée. Le maître-autel, en marbre rouge, d'ordre
 
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