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Bégin, Émile Auguste Nicolas Jules; Rouargue, Émile [Ill.]; Rouargue, Adolphe [Ill.]
Voyage pittoresque en Espagne et en Portugal — Paris: Belin-Leprieur et Morizot, éditeurs, 1852

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https://doi.org/10.11588/diglit.70977#0575

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RIVE MEDITERRANEENNE. 493
arbre m'a causé un vif plaisir. Que serait-ce si je pouvais en voir des
milliers dans tout le luxe d'une végétation presque tropicale !
Cette route m'eût conduit à Murcie, capitale de la province de ce
nom, dont Carthagène fait partie; mais j'ai dû me laisser emporter, par
notre cher Phénicien, qui travaille pendant que nous dormons, et qui
a doublé le cap Palos au milieu de la nuit. La navigation a été douce;
à mon réveil , nous commencions à entrer dans l'espèce de bassin cir-
culaire qui forme le port de Carthagène.
Le soleil se levait au moment même où j'apparaissais sur le pont:
mais quelque envie que j'eusse de contempler les beautés de la nature,
mes regards ont été attirés impérieusement par un spectacle tout nou-
veau pour moi. Il se trouve parmi nos passagers un Marocain, négo-
ciant, qui va de Marseille à Tanger. C'est un homme de trente-cinq
ans, petit, robuste, à physionomie de renard; il est coiffé d'un turban
blanc, veste bleue, pantalon rouge, puis des babouches, puis une pipe,
enfin l'accoutrement complet. En bon musulman, notre compagnon
de voyage fait ses ablutions et sa prière trois fois par jour, à midi, au
coucher et au lever du soleil. Il se préparait à cette cérémonie lorsque
je suis arrivé sur le pont, aussi ai-je profité de l'occasion pour étudier
la liturgie mahométane.
Notre homme remplit d'eau un vase de fer-blanc, assez semblable à
une cafetière se terminant par un long bec; il se lave successive-
ment les pieds, les mains, le visage, la tète, la bouche, le nez et les
oreilles; la main seule est employée à cet usage et le tout me semble
fait en conscience. Tout en se récurant ainsi, notre Turc marmotte
quelques prières, et quand ces ablutions sont terminées, il étend sur
le pont un petit tapis carré et s'assied au milieu, les jambes croisées
sous lui. Ainsi placé, il récite ses patenôtres, lève les mains au ciel,
baise le sol, reste prosterné, se relève et continue cet exercice pendant
un quart d'heure environ. La prière est entremêlée d'exclamations, de
mots bizarrement jetés, et notre dévot parait absorbé dans l'accomplis-
sement de ce devoir. Cependant, quelques curieux l'ayant examiné de
trop près, il a pris le parti d'abréger ses litanies.
Le port de Carthagène est rond, tellement régulier qu'on le croirait
un ouvrage d'art. Ce bassin intérieur, qui présente un diamètre considé-
 
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