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relever ses châteaux, les bâtir, les décorer, quelques-uns de ces artistes
dont la fécondité, la facilité, la verve abondante et nerveuse l'enchantent.
L'architecte Fra Giocondo suit Louis XII en France. François Ier
y appelle Vinci, Benvenuto, Andrea del Sarto, plus tard Rosso et Pri-
matice. Michel-Ange est pressenti.
La Loire, que les Valois, habitués depuis cinquante ans à y vivre,
n'avaient pas encore abandonnée, devait être la première étape de
ces artistes en marche vers le Nord. Pendant toute la guerre, elle avait
été considérée par les Anglais et les Français comme la clé du terri-
toire. Les terres qu'elle arrose sont le visage de la France. Elle unit
par son cours la vallée du Rhône et le Plateau central à la Bretagne,
tandis que ses affluents de droite la rattachent au bassin de la Seine
et ses affluents de gauche au bassin de la Garonne. On dirait que toutes
ces longues rivières lui portent dans leurs eaux les terrains gras du
Nord, les terrains maigres du Midi et les nuages pleins de pluie qui se
sont mirés dans leurs sources. Le chêne, le marronnier, le peuplier,
le saule, les prairies, les roseaux, tout s'y rencontre. Le «jardin de la
France » naît et renaît sans cesse parmi ces grandes eaux tranquilles,
leurs méandres mous entre les bancs de sable et les rives pleines de
feuilles, les champs inondés d'où émergent des bouquets d'arbres.
Les princes français choisissaient ces grands paysages abondants et
doux pour y oublier les souffrances du siècle précédent qu'ils avaient
subies, pour fuir la responsabilité de celles du siècle présent. Le châ-
teau de plaisance y succédait au château fort. On l'entourait encore
de grands fossés endormis, on le bâtissait quelquefois sur les rivières,
mais c'était plus pour avoir le murmure et la fraîcheur des eaux que
pour le protéger contre l'ennemi de l'intérieur ou du dehors. Au début,
le monde nouveau s'annonce à peine par les croisées de pierre ouvertes
sur les façades nues entre les grosses tours à poivrières, pour se pencher
sur les jardins. L'austérité des édifices militaires dont les créneaux et
les mâchicoulis, par où coulait l'huile bouillante, animaient le profil
du mur, ne disparaît pas encore avec elles. Il faudra que la richesse
accumulée derrière leurs épaisses maçonneries par cinq générations
de féodaux, les coffres profonds, les bahuts, les hautes cathèdres, les
dressoirs de bois enlacés de flammes rampantes, l'énorme profusion
de fleurs qui sèment les tapisseries inondées de noirs et de rouges, mais
d'ordonnance sobre et forte que Beauvais fournit aux seigneurs, il faudra
que cet amas confus de broderies, d'orfèvreries, de ciselures, étouffe
au dedans, trouve les cloisons trop étroites, veuille étaler au dehors la
vanité de la fortune acquise, pour que les façades fleurissent, que les
fenêtres s'encadrent d'ornements, se somment de frontons à pinacles et
que l'architecture seigneuriale nouvelle apparaisse en quelques années.

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