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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
Gautier, le savant professeur à l’École des Chartes, et les élégantes compositions de
M. Luc-Olivier Merson font de la Chevalerie un des bons et beaux livres de Tan-
née '1883. On connaît l’enthousiasme de M. Gautier pour le moyen âge et sa pro-
fonde connaissance de tout ce qui touche à cette grande époque. «Ce n'est pas comme
abstraction que l’auteur a voulu présenter la chevalerie; il s’est proposé de nous la
montrer en action, et il nous dépeint dans ses plus intéressants détails la vie si mou-
vementée du chevalier : la naissance du baron, son éducation, son instruction, la
vie du damoiseau et de l’écuyer, la préparation à l'ordre de la chevalerie, les
rites de la réception, les fiançailles et les noces, les expéditions, les chasses, les
pèlerinages, les tournois, etc. »
Qusnt aux illustrations dessinées par M. Merson, nous venons d’en faire l’éloge;
ajoutons qu’elles ont été gravées par l’habile M. Méaulle, qui a su rendre les plus
fines intentions du dessinateur.
Le Littoral de la France de Dunkerque au Mont-Saint-Michel, de M. Aubert, est
une revue pittoresque et animée de tous ces ports, de toutes ces plages, de toutes ces
stations qu’envahit, à l’été, le Ilot des baigneurs parisiens. Chacun y trouvera e
résumé de ses propres souvenirs. Le volume est entièrement illustré par M. Scott, un
dessinateur qui s’entend a merveille aux croquis vivement troussés.
XI. — The Raven, by Edgar Poe, illustrated by Gustave Doré. London, Samp-
son Low; 1 vol. grand in-folio, 1883.
Les grands éditeurs de Londres, Sampson Low, Marston Searle et C’e, ont fait
graver et viennent d’éditer avecun luxe et un soin inouïsl’une des dernières œuvresde
Gustave Doré, le Corbeau d’Edgar Poe. On se souvient que l’œuvre étrange du poète
américain avait été déjà commentée d’une façon plus étrange encore par le peintre
Manet. Nous n’avons pas besoin de dire que les compositions ronflantes et ampoulées
de l’illustrateur du Dante n’ont rien à voir avec les improvisations ultra simplifiées du
peintre d'Olympia. Nous avons le courage d’avouer que le génie de Doré, malgré sa
prodigalité inventive, sa verve endiablée et son intuition du fantastique, nous a tou-
jours laissé insensible. Nous craignons que l’avenir ne ratifie pas l’engouement exces-
sif des contemporains. Mais ceci posé, nous convenons que l’illustration du Raven tient
une place distinguée parmi les conceptions les plus importantes de Doré, Ce qui nous
a surtout frappé et ce qui constitue à nos yeux le plus grand mérite de ce splendide
volume, c’est la façon tout à fait supérieure dont les dessins du maître français ont
été interprétés sur bois par l’outil d’une pléiade de graveurs choisis parmi les meil-
leurs de l’Allemagne. Sur ce terrain, comme sur beaucoup d’autres, les Allemands
nous font une terrible concurrence. Voyez avec quelle autorité ont été gravées les
admirables illustrations de Menzel pour la Cruche cassée, dont notre ami, M. Alfred
de Lostalot, vient de publier chez Didot une si intéressante traduction. Nous avons
fort à faire pour maintenir notre antique supériorité dans l’ornementation du livre
par la gravure sur bois. Il ne servirait à rien de dissimuler une vérité amère : nos
voisins ont des praticiens qui égalent au moins les nôtres et qui travaillent, hélas !
à beaucoup meilleur marché. L. G,
Le Rédacteur en chef, gérant : LOUIS GONSE.
Paris. ■— Typ. A. Quantin, 7, rue Saint-Benoît. — [2036]
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
Gautier, le savant professeur à l’École des Chartes, et les élégantes compositions de
M. Luc-Olivier Merson font de la Chevalerie un des bons et beaux livres de Tan-
née '1883. On connaît l’enthousiasme de M. Gautier pour le moyen âge et sa pro-
fonde connaissance de tout ce qui touche à cette grande époque. «Ce n'est pas comme
abstraction que l’auteur a voulu présenter la chevalerie; il s’est proposé de nous la
montrer en action, et il nous dépeint dans ses plus intéressants détails la vie si mou-
vementée du chevalier : la naissance du baron, son éducation, son instruction, la
vie du damoiseau et de l’écuyer, la préparation à l'ordre de la chevalerie, les
rites de la réception, les fiançailles et les noces, les expéditions, les chasses, les
pèlerinages, les tournois, etc. »
Qusnt aux illustrations dessinées par M. Merson, nous venons d’en faire l’éloge;
ajoutons qu’elles ont été gravées par l’habile M. Méaulle, qui a su rendre les plus
fines intentions du dessinateur.
Le Littoral de la France de Dunkerque au Mont-Saint-Michel, de M. Aubert, est
une revue pittoresque et animée de tous ces ports, de toutes ces plages, de toutes ces
stations qu’envahit, à l’été, le Ilot des baigneurs parisiens. Chacun y trouvera e
résumé de ses propres souvenirs. Le volume est entièrement illustré par M. Scott, un
dessinateur qui s’entend a merveille aux croquis vivement troussés.
XI. — The Raven, by Edgar Poe, illustrated by Gustave Doré. London, Samp-
son Low; 1 vol. grand in-folio, 1883.
Les grands éditeurs de Londres, Sampson Low, Marston Searle et C’e, ont fait
graver et viennent d’éditer avecun luxe et un soin inouïsl’une des dernières œuvresde
Gustave Doré, le Corbeau d’Edgar Poe. On se souvient que l’œuvre étrange du poète
américain avait été déjà commentée d’une façon plus étrange encore par le peintre
Manet. Nous n’avons pas besoin de dire que les compositions ronflantes et ampoulées
de l’illustrateur du Dante n’ont rien à voir avec les improvisations ultra simplifiées du
peintre d'Olympia. Nous avons le courage d’avouer que le génie de Doré, malgré sa
prodigalité inventive, sa verve endiablée et son intuition du fantastique, nous a tou-
jours laissé insensible. Nous craignons que l’avenir ne ratifie pas l’engouement exces-
sif des contemporains. Mais ceci posé, nous convenons que l’illustration du Raven tient
une place distinguée parmi les conceptions les plus importantes de Doré, Ce qui nous
a surtout frappé et ce qui constitue à nos yeux le plus grand mérite de ce splendide
volume, c’est la façon tout à fait supérieure dont les dessins du maître français ont
été interprétés sur bois par l’outil d’une pléiade de graveurs choisis parmi les meil-
leurs de l’Allemagne. Sur ce terrain, comme sur beaucoup d’autres, les Allemands
nous font une terrible concurrence. Voyez avec quelle autorité ont été gravées les
admirables illustrations de Menzel pour la Cruche cassée, dont notre ami, M. Alfred
de Lostalot, vient de publier chez Didot une si intéressante traduction. Nous avons
fort à faire pour maintenir notre antique supériorité dans l’ornementation du livre
par la gravure sur bois. Il ne servirait à rien de dissimuler une vérité amère : nos
voisins ont des praticiens qui égalent au moins les nôtres et qui travaillent, hélas !
à beaucoup meilleur marché. L. G,
Le Rédacteur en chef, gérant : LOUIS GONSE.
Paris. ■— Typ. A. Quantin, 7, rue Saint-Benoît. — [2036]