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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 29.1884

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Nr. 2
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Gonse, Louis: Manet
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https://doi.org/10.11588/diglit.24585#0150

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

UO

1863, grandes toiles d’une exécution appuyée, d’un réalisme trivial, rap-
pellent les mauvais Courbet. On pouvait, sans inconvénient, les laisser à
l’atelier. Ils servent tout au plus à nous montrer les incertitudes du peintre
cherchant sa voie, s’essayant timidement à mettre des ligures de taille
naturelle dans des velléités de plein air.

Manet peint encore dans la note espagnole et sous la même inspira-
tion momentanée la Jeune femme couchée en costume d’espada, le Moine
en prière, le Buveur cl’eau et le Combat de taureaux. Ce dernier tableau
fut l’objet de telles critiques que l’artiste le détruisit presque en entier.
Voici comment un contemporain le décrivait : « Un taureau microsco-
pique se tient debout, étonné, au milieu d’une arène de sable jaune. Au
premier plan, un toréador est étendu dans une pose oblique ; au troisième
plan, d’autres toréadors détachent leurs corps contre la barrière qui clôt
l’enceinte. » 11 ne subsiste plus aujourd’hui que le toréador du premier
plan, étendu dans une pose oblique, qui fut exposé au Salon de 186/l sous
le titre de Y Homme mort. C’est, un admirable morceau, dont la simplicité
émouvante révèle la main d’un maître peintre et qui s’impose par le
charme d’une exécution sans reproche. L’Homme mort devra un jour
entrer dans un musée. L’école contemporaine a rarement peint quelque
chose de plus lumineux, de plus limpide et de plus ferme.

Le Buveur cl’eau est une esquisse délicate. Pour la traduire à l’eau-
forte, notre collaborateur, M. Guérard, s’est ingénieusement souvenu de
Goya. Un mot à ce propos. Si nous avons accordé une place peut-être
excessive à la reproduction des œuvres de Manet, ç’a ôté en grande partie
avec l’intention de faire valoir les ressources de talent d’un graveur qui
a débuté à la Gazette et qui compte aujourd’hui parmi les plus personnels
et les plus habiles.

Nous voici arrivés à une œuvre dont il nous serait agréable de n’avoir
pas à parler : à Y Olympia du Salon de 1865.

Un méchant petit modèle d’atelier étale son indigente nudité sur
des draps blancs; une négresse vêtue de rose écarte les rideaux verts de
1 alcôve et lui présente un bouquet ; au pied du lit, un chat noir de sil-
houette fantastique hérisse son poil. N’insistons pas sur l’étrangeté de la
composition, l’invraisemblance de certains détails, la critique serait trop
facile. Olympia, ce qui est pire, est mal dessinée, un trait noir pénible-
ment repris en cerne les contours; le modelé, sauf les parties lumineuses
de la poitrine, est sans enveloppe. Le tableau ne se défend que par le
personnage accessoire, la négresse, qui est un excellent morceau de pein-
ture, et par la gamme des tons, qui est de qualité supérieure : des blancs
très fins, des noirs veloutés, un rose grenade, un vert profond. Le dilemme
 
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