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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
diverses natures et nous paraissent avoir été fabriqués un peu partout,
mais surtout en Italie, depuis l’époque du Bas-Empire jusqu’à la fin du
xvii° siècle. Les plus anciens, parmi ceux que nous connaissons, sont une
transformation et, pour ainsi dire, une sorte de tradition des verres
chrétiens, ou fonds de coupes à sujets dorés, trouvés en si grand nombre
dans les catacombes. Mais alors que dans ces derniers la feuille d’or,
découpée et gravée au trait par enlevage à la pointe, est renfermée entre
deux verres soudés ensemble par cuisson, — procédé qui fut employé
plus tard en Bohême au xvme siècle pour les verres dits verres doublés,
— dans ceux dont nous nous occupons la feuille d’or, simplement fixée
sous une plaque de verre au moyen d’une gomme quelconque, y est
maintenue et préservée, lorsque le travail du découpage et de la gravure
est terminé, par un vernis végétal coloré en brun ou en noir, qui fait res-
sortir, en les remplissant, les traits gravés, et détache le sujet en sil-
houette d’or, sur fond noir.
M. Spitzer possède quatre de ces verres rarissimes, dont il n’existe
pas d’analogues, croyons-nous, dans les musées français, et qui méritent
une mention particulière. Le plus ancien, de forme circulaire bombée au
centre, rappelle les fonds de coupes des cimetières chrétiens ; il représente
la Vierge tenant l’enfant Jésus : à sa droite se tient sainte Catherine, et à
sa gauche une sainte en prière ; les figures sont coupées au-dessus des
genoux par une balustrade à petites arcades à plein-cintre et à trilobés.
Ces figures, dans lesquelles on retrouve une influence byzantine très pro-
noncée, sont d’un dessin assez correct, mais d’une gravure surchargée
de tailles croisées inégales manquant de pureté et produisant ainsi des
noirs un peu allourdis.
Le second de ces verres est une petite plaque rectangulaire datant
du xme siècle et formant tableau ; il représente, sous une arcade trilobée
à plein cintre supportée par des consoles, la Vierge assise à terre et tenant
devant elle, sur ses genoux, l’enfant Jésus qui entr’ouvre son manteau;
saint Joseph, également assis à terre, les regarde; au fond, derrière une
cherches à faire. Quant au mot églomisé (quelques amateurs, en Italie surtout, disent
agglomisés), l’érudit et ingénieux chercheur, M.Bonnaffé, en a indiqué, dans ce recueil
même (janvier 1884, p. 85), une étymologie qui est probablement la vraie, mais qui
ne se rapporterait en aucune façon ni à la nature même de ces verres ni à leur genre de
décoration ; ce qui est certain, c’est qu’on ne trouve ce mot dans aucun dictionnaire,
dans aucun auteur, ni même dans aucun des catalogues du siècle dernier ou du com-
mencement de celui-ci. M. du Sommerard nous parait être le premier qui lui ait
donné une sorte de consécration officielle, dans son Catalogue des objets d'art du
Musée des Thermes et de l’hôtel de Cluny (nos 4779 et 4780, p. 377).
GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
diverses natures et nous paraissent avoir été fabriqués un peu partout,
mais surtout en Italie, depuis l’époque du Bas-Empire jusqu’à la fin du
xvii° siècle. Les plus anciens, parmi ceux que nous connaissons, sont une
transformation et, pour ainsi dire, une sorte de tradition des verres
chrétiens, ou fonds de coupes à sujets dorés, trouvés en si grand nombre
dans les catacombes. Mais alors que dans ces derniers la feuille d’or,
découpée et gravée au trait par enlevage à la pointe, est renfermée entre
deux verres soudés ensemble par cuisson, — procédé qui fut employé
plus tard en Bohême au xvme siècle pour les verres dits verres doublés,
— dans ceux dont nous nous occupons la feuille d’or, simplement fixée
sous une plaque de verre au moyen d’une gomme quelconque, y est
maintenue et préservée, lorsque le travail du découpage et de la gravure
est terminé, par un vernis végétal coloré en brun ou en noir, qui fait res-
sortir, en les remplissant, les traits gravés, et détache le sujet en sil-
houette d’or, sur fond noir.
M. Spitzer possède quatre de ces verres rarissimes, dont il n’existe
pas d’analogues, croyons-nous, dans les musées français, et qui méritent
une mention particulière. Le plus ancien, de forme circulaire bombée au
centre, rappelle les fonds de coupes des cimetières chrétiens ; il représente
la Vierge tenant l’enfant Jésus : à sa droite se tient sainte Catherine, et à
sa gauche une sainte en prière ; les figures sont coupées au-dessus des
genoux par une balustrade à petites arcades à plein-cintre et à trilobés.
Ces figures, dans lesquelles on retrouve une influence byzantine très pro-
noncée, sont d’un dessin assez correct, mais d’une gravure surchargée
de tailles croisées inégales manquant de pureté et produisant ainsi des
noirs un peu allourdis.
Le second de ces verres est une petite plaque rectangulaire datant
du xme siècle et formant tableau ; il représente, sous une arcade trilobée
à plein cintre supportée par des consoles, la Vierge assise à terre et tenant
devant elle, sur ses genoux, l’enfant Jésus qui entr’ouvre son manteau;
saint Joseph, également assis à terre, les regarde; au fond, derrière une
cherches à faire. Quant au mot églomisé (quelques amateurs, en Italie surtout, disent
agglomisés), l’érudit et ingénieux chercheur, M.Bonnaffé, en a indiqué, dans ce recueil
même (janvier 1884, p. 85), une étymologie qui est probablement la vraie, mais qui
ne se rapporterait en aucune façon ni à la nature même de ces verres ni à leur genre de
décoration ; ce qui est certain, c’est qu’on ne trouve ce mot dans aucun dictionnaire,
dans aucun auteur, ni même dans aucun des catalogues du siècle dernier ou du com-
mencement de celui-ci. M. du Sommerard nous parait être le premier qui lui ait
donné une sorte de consécration officielle, dans son Catalogue des objets d'art du
Musée des Thermes et de l’hôtel de Cluny (nos 4779 et 4780, p. 377).