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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 29.1884

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Nr. 6
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Lostalot, Alfred de: M. Félix Bracquemond, peintre graveur, 2: artistes contemporains
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https://doi.org/10.11588/diglit.24585#0543

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520

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

attendant le rayon qui ne viendra pas », poursuivons la critique des
œuvres de notre implacable justicier.

On doit à M. F. Bracquemond d’excellents portraits gravés sur cuivre
d’après nature : Théophile Gautier, J. Laurens, Daubigny, de Curzon,
Léon Cladef, Edmond de Gonconrt, Dargenty, le guitariste Bosc, et enfin
celui de Méryon, que nous publions comme un exemple frappant de la
manière large, hardie, sincère à outrance du dessinateur. Quelle plus vi-
vante effigie pourrait-on tracer de ce brave garçon dont le talent original
et si étrangement poétique fut méconnu de ses contemporains, et qui
mourut pauvre, laissant derrière lui un œuvre de graveur que les déli-
cats du monde entier se disputent aujourd’hui ! Méryon, timide, incon-
scient de sa force, se croyait incapable de fixer son rêve; il disait à
M. Burty : « Je ne sais pas graver... Bracquemond, voilà un maître-gra-
veur ! » Méryon se jugeait mal, mais il voyait bien le mérite des autres;
son portrait confirme l’opinion qu’il avait de M. Bracquemond; c’est bien
là un ouvrage de maître-graveur.

Nous le répétons, quand M. Bracquemond n’a d’autre sentiment à tra-
duire que son sentiment propre, quand il grave pour lui, il se montre
généralement peu soucieux de charmer le regard par la finesse des tailles
ou la suavité des colorations ; il se sert de la pointe comme un peintre du
crayon, sans autre ambition que de fixer une impression ressentie devant
la nature, de noter une forme caractéristique ou un jet de lumière. 11 lui
est arrivé cependant de se laisser tenter par cet art exquis de l’eau-forte,
de l’aimer pour lui-même et de célébrer ses merveilleuses ressources; il
avait au Salon, en 1882, un Coq superbe qui a fait l’admiration des aqua-
fortistes les plus expérimentés. Le croquis à la plume que nous publions
ne peut donner une idée de l’éclat extraordinaire de cette gravure ; on
peut la rapprocher des plus belles planches de Jules Jacquemart; elle en
a toute l’intensité optique et le travail, souple et varié à l’infini, dénote
une sûreté magistrale.

Voilà pour le peintre-graveur; nous en avons assez dit pour expliquer
la faveur exceptionnelle qui s’attache à ses moindres estampes originales.
Il nous reste à examiner la partie de son œuvre où son nom se trouve
accolé à celui d’un collaborateur; ce sera un peintre le plus souvent.
On a vu avec quelle facilité ce fier tempérament sait se plier au respect
du tempérament des autres, au point de tout accepter, de tout traduire,
leurs beautés et leurs faiblesses, sans jamais être tenté de se substituer
à eux pour les faire valoir. C’est la raison de l’estime dont il jouit auprès
des peintres, et Ton sait que ceux-ci n’ont généralement pas des ten-
dresses excessives pour les graveurs.
 
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